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"La contamination par le glyphosate s’est largement répandue aux Etats-Unis " par le Dr Eva Sirinathsinghji

Traduction et compléments de Jacques Hallard

vendredi 26 juin 2015, par Sirinathsinghji Eva

ISIS Santé
La contamination par le glyphosate s’est largement répandue aux Etats-Unis
Une étude la plus complète sur le sujet révèle que le glyphosate et l’AMPA se retrouvent dans l’environnement depuis 9 ans et dans 38 états des Etats-Unis. Dr Eva Sirinathsinghji

Rapport de l’ISIS en date du 08/10/2014

L’article original s’intitule Widespread Glyphosate Contamination in USA et il est accessible sur le site : http://www.i-sis.org.uk/Widespread_Glyphosate_Contamination_in_US.php

La recherche la plus complète qui a été conduite à ce jour sur les teneurs en glyphosate [matière active à effet herbicide] dans l’environnement, révèle une contamination généralisée des sols et des eaux aux États-Unis, ainsi que dans les systèmes de traitement des eaux.

En ayant fait des prélèvements à partir d’un large éventail de lieux géographiques, des chercheurs de l’US Geological Survey (USGS) ont analysé 3.732 échantillons d’eau et de sédiments et 1.081 échantillons dans le cadre des procédures d’assurance qualité, qui avaient été recueillis entre 2001 et 2010, dans 38 États américains et dans le district de Colombia [Washington].

Les chercheurs ont trouvé du glyphosate dans 39,4% des échantillons (1.470 sur 3.732), d’une part, et son métabolite AMPA (acide α-amino-3-hydroxy-5-méthyl-4-isoxazolepropionique) dans 55% des échantillons, d’autre part [1].

Les échantillons d’eau provenaient de ruisseaux, des eaux souterraines, des fossés et des drains, des grands fleuves, ainsi que de l’eau du sol, des lacs, des étangs et des zones humides, des précipitations recueillies, des sols et des sédiments, et enfin des usines de traitement des eaux usées.

On pouvait s’attendre à ces résultats

Ces résultats étaient à prévoir car l’utilisation du glyphosate a augmenté de façon constante aux États-Unis (et il en est de même au Canada) au cours des dernières années, en particulier depuis l’introduction de cultures de plantes génétiquement modifiées [OGM] tolérantes à un herbicide à base de la matière active glyphosate.

La croissance constante de l’apparition de ‘mauvaises herbes’ résistantes au glyphosate signifie également que les agriculteurs ont besoin de pulvériser davantage de produits chimiques qu’auparavant, afin de protéger leurs cultures de plantes OGM.(voir [2] Monsanto Defeated by Roundup Resistant Weeds, SiS 53).

Le glyphosate représente 32-36 % de tous les pesticides (insecticides, herbicides et fongicides) qui étaient utilisés aux États-Unis en 2007, selon les données de l’EPA [3]. Il s’agit du premier produit utilisé en agriculture et le second pour les utilisations chez les particuliers (jardins et abords) et par les établissements industriels et commerciaux.

L’utilisation agricole est passée de 3.180 tonnes (de matière active de glyphosate) en 1987, à 82.800 tonnes en 2007 ; l’utilisation non-agricole de cet herbicide a également augmenté de façon constante aux États-Unis, passant de 2.270 tonnes en 1993 à 9.300 tonnes en 2007 (Figure 1 dans l’article original).

L’usage commun du glyphosate dans les zones urbaines est également exacerbé par les surfaces imperméables des villes, ce qui entraîne des apports substantiels de pesticides vers les systèmes de drainage urbain de récupération des eaux pluviales et des eaux de ruissellement.

Jusqu’à récemment, les données sur la présence de glyphosate dans l’environnement ont fait défaut, bien que les études publiées au cours des deux dernières années aient soulevé des inquiétudes. La détection du glyphosate dans les eaux de surface, dans les eaux de pluie et même dans les eaux souterraines, est en contradiction avec l’affirmation des fabricants de ce produit selon lesquels ce dernier aurait une propension à se lier chimiquement à des sédiments, ce qui l’empêcherait de s’infiltrer dans les nappes d’eaux souterraines (voir [4] GM Crops and Water - A Recipe for Disaster, SiS 58).

Figure 1. Utilisation du glyphosate et superficies semées en maïs et en soja de 1987 à 2008

La collecte des données a déjà été limitée, non seulement par une grande solubilité et la polarité du produit qui rendent sa détection plus difficile, en particulier aux niveaux appropriés pour doser le glyphosate dans l’environnement, mais aussi en raison de la position officielle qui avait été adoptée par les autorités et selon lesquelles le glyphosate était sûr, c’est-à-dire inoffensif en termes de sécurité.

Cela a rendu l’évaluation de la présence du glyphosate dans notre environnement moins importante quant à la priorité accordée, et cela a donc abouti à ce que le sujet ait été peu étudié et l’usage du produit non réglementé. Las déclarations faites [apaisantes] en matière de sécurité, ont également encouragé les agriculteurs à abuser de l’emploi du glyphosate : il est la plupart du temps pulvérisé sur les parcelles cultivées au stade ’post-émergence’ [avant la sortie de terre des plantules], ou encore après que les plantes cultivées et les ‘mauvaises herbes’ aient émergé du sol ; l’herbicide est également souvent appliqué à maintes reprises tout au long de la saison de culture, surtout depuis l’apparition des ‘mauvaises herbes’ résistantes au glyphosate. En outre, les traitements herbicides sont aussi abondamment appliqués sur des cultures de plantes non-OGM comme un déshydratant (agent de séchage et de dessiccation) pour faciliter las récoltes (voir [5] How Roundup® Poisoned my Nature Reserve, SiS 64).

Pour remédier au manque de connaissances dans ce domaine, des chercheurs de l’USGS ont commencé à développer leurs propres méthodes de dosages dans les années 2000, en utilisant l’extraction en phase solide et la spectrométrie de masse avec la méthode de chromatographie liquide : ces techniques sont capables de détecter le glyphosate et son métabolite l’AMPA à des niveaux aussi bas que 0,02 mg / litre (soit 0,02 ppb ou partie par milliard) pour les deux composés en question.

Les résultats sont présentés dans le tableau 1 : le glyphosate et son métabolite l’AMPA ont été le plus fréquemment détectés dans le sol, puis à partir des drains et des fossés, dans les eaux pluviales et dans les grandes rivières. Pour les sols et les sédiments, et pour l’eau du sol, un total de 45 échantillons de sols et de sédiments ont été prélevés sur sept sites dans les états du Mississippi et de l’Indiana : le glyphosate et l’AMPA qui ont été détecté tous deux au moins une fois dans les échantillons de tous les sept sites. Les deux substances chimiques ont été détectées dans 90% des échantillons de sédiments avec des concentrations souvent supérieures à 10 μg / kg, avec une moyenne de 9,6 μg / kg. Dans 116 échantillons de sols, le glyphosate et l’AMPA ont été détectés dans 34,5% et 66,5% des cas, respectivement. Les grands fleuves ont montré des niveaux moyens de 0,03 μg / kg dans 53,1% des échantillons testés. Les niveaux les moins fréquents, mais détectables ont été trouvés dans des échantillons d’eaux souterraines, avec 5,8% et 14% d’échantillons positifs pour le glyphosate et l’AMPA, respectivement.

Le glyphosate est considéré par les partisans des biotechnologies comme une substance qui n’est pas capable de s’infiltrer dans les réserves d’eaux souterraines, mais les travaux rapportés ici et une étude précédente qui avait été réalisée en Catalogne en Espagne, ont tous deux permis de détecter sa présence dans les nappes souterraines [4], qui sont une source importante d’eau potable.

La présente étude a également mis en évidence une augmentation des concentrations dans le temps, montrant des niveaux plus élevés pour la période 2006-2010 par rapport aux années précédentes (2001-2005), conformément à l’augmentation de l’utilisation de l’herbicide, à la fois pour les usages agricoles, domestiques, industriels et commerciaux. Cependant, les tendances au cours du temps n’ont pas été enregistrées et leur évolution varie probablement au cours des saisons agricoles.

L’étude met en évidence la contamination omniprésente de l’environnement avec les herbicides à base de glyphosate, et ceci à des niveaux toujours croissants. Cet herbicide est très toxique pour les humains, pour les animaux d’élevage et pour la faune sauvage, et cette toxicité se manifeste à des niveaux aussi faibles que 0,1 ppb [partie par milliard].

Il existe en effet un dossier solidement argumenté pour mettre un terme à toutes les utilisations de la matière active à effet herbicide, le glyphosate (voir [6] Ban GMOs Now,

[Voir la version en français : « Il faut interdire les OGM dès maintenant à cause des risques sanitaires et environnementaux et surtout à la lumière des connaissances actuelles en génétique » par le Dr. Mae-Wan Ho et le Dr. Eva Sirinathsinghji de l’Institut de la Science dans la Société ISIS basé à Londres. Traduction et compléments de Jacques Hallard, vendredi 7 juin 2013.

Préface - L’agriculture qui utilise les plantes génétiquement modifiées (OGM) est un échec sur tous les plans, alors que les risques pour la santé et l’environnement sont mis de plus en plus en lumière. L’opposition aux OGM prend de l’ampleur dans le monde entier, mais les entreprises qui distribuent les semences d’OGM continuent leur expansion sans relâche. Ce type d’agriculture basée sur les OGM est une recette pour conduire au désastre, comme ce rapport le démontre clairement.

Mais cela ouvre également la voie de la transition vers une agriculture durable qui est déjà en marche dans les communautés locales partout dans le monde et qui peut vraiment permettre aux populations de se nourrir en période de changement climatique.

C’est le moment d’agir dès maintenant pour interdire les disséminations des OGM dans l’environnement, localement dans les communautés, dans les villages, les villes, les municipalités, les régions, ainsi qu’au niveau national et mondial…

Conclusion - Le mode d’agriculture basé sur les OGM est une recette fatale pour aller vers un désastre généralisé, comme ce rapport le démontre clairement. Notre rapport ouvre également la voie de la transition vers une agriculture durable et des pratiques qui ont déjà été adoptées dans les communautés et les collectivités locales partout dans le monde : elles peuvent vraiment permettre aux populations de se nourrir en période de changement climatique. Les générations futures ne nous pardonneraient pas si nous n’arrêtions pas dès maintenant l’essor des OGM, avec la dissémination des plantes génétiquement modifiées.

Article à lire sur le site : http://www.isias.lautre.net/spip.php?article311 ).

Table 1 - Concentrations en glyphosate et son métabolite AMPA dans divers environnements aux Etats-Unis

Situation hydrologique Nombre d’échantillons % et (nombre) de détections avec du glyphosate

Teneurs medianss en glyphosate en μg/l ou μg/kg

Teneurs maximales de glyphosate en μg/l ou μg/kg

Pourcentage et (nombre) de détection de l’AMPA

Teneurs médianes d’AMPA en μg/l ou μg/kg

Teneurs maximales d’AMPA en μg/l or μg/kg

Tous les sites 3 732 39.4 (1,470) <0.02 476 55.0 (2,052) 0.04 397
Ruisseaux 1 508 52.5 (791) 0.03 73 71.6 (1,079) 0.20 28
Nappes souterraines 1 171 5.8 (68) <0.02 2.03 14.3 (168) <0.02 4.88
Fossés et drains 374 70.9 (265) 0.20 427 80.7 (302) 0.43 397
Grandes rivières 318 53.1 (169) 0.03 3.08 89.3 (284) 0.22 4.43
Eaux du sol 116 34.5 (40) <0.02 1.00 65.5 (76) 0.06 1.91
Lacs, étangs et marais 104 33.7 (35) <0.02 301 29.8 (31) <0.02 41
Précipitations 85 70.6 (60) 0.11 2.50 71.8 (61) 0.04 0.48
Sols et sédiments 45 91.1 (41) 9.6 476 93.3 (42) 18.0 341
WWTP outfall * 11 9.09 (1) <0.02 0.30 81.8 (9) 0.45 2.54

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Emissaires de rejet des installations de traitement des eaux usées

Références

  • Battaglin WA, Meyer MT, Kuivila KM, and Dietze JE. Glyphosate and Its Degradation Product AMPA Occur Frequently and Widely in U.S. Soils, Surface Water, Groundwater, and Precipitation. Journal of the American Water Resources Association (JAWRA) 2014, 50, 275-290. DOI : 10.1111/jawr.12159
  • Sirinathsinghji E. Monsanto Defeated By Roundup Resistant Weeds. Science in Society53, 40-41, 2011.
  • 2006-2007 Pesticide Market Estimates, 3.4 Amount of Pesticides Used in the United States : Conventional. US Environmental Protection Agency. http://www.epa.gov/opp00001/pestsales/07pestsales/usage2007_2.htm
  • Sirinathsinghji E. GM Crops and Water – A Recipe for Disaster. Science in Society 58, 8-10, 2013.
  • Mason, R. How Roundup Poisoned My Nature Reserve, SiS 64, to appear
  • Ho MW and Sirinathsinghji E. Ban GMOs Now, ISIS, London, June 2013,http://www.i-sis.org.uk/Ban_GMOs_Now.php
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Traduction en français :

Jacques Hallard, Ing. CNAM, consultant indépendant.

Relecture et corrections : Christiane Hallard-Lauffenburger, ex professeure des écoles.

Adresse : 585 Chemin du Malpas 13940 Mollégès France

Courriel : jacques.hallard921@orange.fr

Fichier : ISIS Santé Widespread Glyphosate Contamination in USA French version.3

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