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"La communauté internationale doit prendre en charge Fukushima" par le Dr Mae Wan Ho

Traduction et compléments de Jacques Hallard

jeudi 3 octobre 2013, par Ho Dr Mae-Wan

ISIS Energie nucléaire
La comunnauté internationale doit prendre en charge Fukushima
The World Must Take Charge at Fukushima
Des fuites massives d’eau fortement contaminée, des structures délabrées et des combustibles usés qui pourraient libérer, s’ils étaient exposés à l’air, 85 fois plus de césium toxique qu’il n’en a été libéré à Tchernobyl : il y a des raisons évidentes pour lesquelles une aide d’urgence est nécessaire avec les meilleurs experts au monde. Dr Mae Wan Ho

Rapport de l’ISIS en date du 30/09/2013
L’article original intitulé The World Must Take Charge at Fukushima est accessible sur le site :http://www.i-sis.org.uk/The_World_Must_Take_Charge_at_Fukushima.php
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Pour une pétition à adresser à Monsieur Ban Ki-Moon / ONU
Harvey Wasserman, journaliste américain, auteur, militant pour la démocratie et défenseur des énergies renouvelables, nous invite à signer une pétition qui doit être adressée au Secrétaire général de l’ONU Monsieur Ban Ki-Moon : http://petitions.moveon.org/sign/the-world- communauté must ? source = s.em.mt & r_by = 6986571

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Dans une tentative désespérée pour faire face à la crise qui se poursuit depuis la catastrophe nucléaire survenue au Japon en mars 2011, la société TEPCO (Tokyo Electric Power Company) annonce qu’elle peut commencer à essayer de retirer plus de 1.300 barres de combustible irradié d’une piscine gravement endommagée, dans les 60 jours. La piscine est dangereusement perchée au sommet d’un bâtiment penché qui menace de s’écrouler tout seul ou dans un prochain tremblement de terre (un tremblement de terre relativement faible a secoué la préfecture de Fukushima le 19 septembre 2013).
Les 400 tonnes de combustibles contenus dans ce bassin pourraient libérer plus de 15.000 fois la quantité des rayonnements qui avaient été libérés à Hiroshima. La société TEPCO n’a pas les connaissances scientifiques et techniques, ni les ressources financières pour gérer le travail à faire, pas plus d’ailleurs que le gouvernement japonais. Il y a besoin d’un effort mondial coordonné avec le concours des meilleurs scientifiques et ingénieurs, a dit Harvey Wasserman [1].
Des milliers de tonnes d’eau fortement contaminée se déversent à travers le site de Fukushima (voir encadré 1). Ceci sape encore davantage les structures déjà instables de Fukushima, y ​​compris le bâtiment qui supporte la piscine à combustible du réacteur n° 4.

Encadré 1

Les eaux souterraines emportent la contamination vers l’océan et sur l’ensemble du site
Selon Greenpeace International [2] *, les documents récemment obtenus par l’Asahi Shimbun (journal d’informations internationales japonais) révèlent que les experts nucléaires américains avaient exhorté TEPCO d’installer des barrières de sol gelé dès le mois d’avril 2011 pour essayer de prévenir la contamination des eaux souterraines. Mais les responsables de TEPCO avaient envoyé une note aux représentants du gouvernement pour retarder l’annonce afin de protéger les finances de l’entreprise et la confiance des investisseurs. Banri Kaieda, alors à la tête du ministère de l’Economie, du Commerce et de l’Industrie (METI), qui supervise la promotion de l’énergie nucléaire, a décidé de repousser l’annonce, et Sakae Muto, Vice-président exécutif de TEPCO, aurait promis de procéder tranquillement en ce qui concerne le projet d’une paroi glacée, mais il ne le fit jamais. TEPCO nie que Sakae Muto ait passé un tel accord.
[* Greenpeace France a aussi consacré plusieurs notes aux conséquences de la catastrophe nucléaire de Fukushima ; voir http://energie-climat.greenpeace.fr/tag/nucleaire?gclid=CNmckPHs87kCFbQetAodhhoAxw ].
Maintenant, près de deux ans et demi après la catastrophe, on estime qu’il s’écoule chaque jour de 800 à 1.000 tonnes d’eaux souterraines à travers l’usine, et que 300 tonnes d’eau contaminée pénètrent journellement dans l’Océan Pacifique. En outre, 400 tonnes d’eau contaminée s’infiltre quotidiennement dans les bâtiments des réacteurs endommagés et les travailleurs sur place sont incapables d’identifier par où l’eau est entrée dans les bâtiments, ni de se prononcer sur la façon d’arrêter les infiltrations. Les niveaux de radiation restent si élevés qu’ils ne peuvent pas se rapprocher assez près pour y faire quoi que ce soit.
L’administration du Premier ministre Shinzo Abe a promis 470 millions de dollars, provenant de l’argent des contribuables, pour commencer à construire le mur de glace, alors que les pressions internationales montent en prévision des Jeux olympiques d’été de 2020 et que Tokyo a été récemment choisi pour les accueillir.

Des assemblages de combustible usé constituent le risque majeur dans les piscines exposées et endommagées

Plus de 6.000 assemblages combustibles sont maintenant posés dans une piscine commune à seulement 50 mètres de l’unité 4 ; certains de ces assemblages contiennent du plutonium. L’eau de la piscine n’est pas contenue et la structure de la piscine reste vulnérable vis-à-vis des pertes de liquide de refroidissement, de l’effondrement d’un immeuble voisin, d’un tremblement de terre ou de tout autre accident [1].
Plus de 11.000 assemblages de combustible sont éparpillés autour du site de Fukushima, et cette quantité correspond à un danger estimé à 85 fois la quantité de césium qui avait été libéré à Tchernobyl, selon l’expert, réputé de longue date et ancien officiel du Ministère de l’Énergie : Robert Alvarez.
Le combustible usé doit être maintenu sous l’eau, car il est enrobé d’un alliage de zirconium qui pourrait s’enflammer spontanément s’il venait à être exposé à l’air. Chaque tige non découverte émet un rayonnement suffisant pour tuer une personne à proximité en quelques minutes. Un incendie pourrait obliger l’ensemble du personnel à fuir et provoquerait l’arrêt du fonctionnement des appareils électroniques. Un nouvel incendie du combustible à l’unité 4 ferait cracher un flot continu de poisons de radiations mortelles pendant des siècles.
Arnie Gundersen, ingénieur nucléaire depuis quarante ans, qui fabriquait dans le passé les tiges de combustible, souligne que les barres de combustible dans le cœur de l’unité 4 sont pliées, abîmées et cassantes au point de s’écrouler. Des caméras ont révélé d’inquiétantes quantités de débris dans la piscine de combustible déjà détruite. Les obstacles techniques et scientifiques pour vider la piscine de l’unité 4 « uniques et décourageantes », selon André Gundersen, et doivent être levés avec « une perfection à 100% ».
Mais ce n’est pas tout !

L’eau radioactive fuit à partir des réservoirs de stockage

À la mi-septembre, TEPCO stockait 435.000 tonnes d’eau radioactive dans les réservoirs aériens, ainsi que dans les sous-sols des bâtiments des réacteurs, 137.000 tonnes de plus que l’année précédente sont stockées [2], et ces quantités sont en hausse. Mais ces réservoirs de stockage ne sont plus étanches.
Les lectures par mesures des rayonnements observés ont bondi de plus de 20% par rapport à leurs niveaux les plus élevés au début du mois de septembre [3]. Des points critiques (‘hotspots’) de radiations se sont propagés à trois zones d’attente pour des centaines de réservoirs de stockage de l’eau contaminée qui avait été projetée sur les trois réacteurs qui avaient fondu en mars 2011.
Les mesures effectuées juste au-dessus du sol, à proximité d’un ensemble de réservoirs, ont montré un rayonnement très de 2.200 mSv, le 3 septembre 2013 (un jour avant que le séisme de magnitude 6,9 ​ne se produise ​au large du sud du Japon), le record précédent en zone d’attente des réservoirs, de 1.800 mSv, avait été enregistré 3 jours auparavant. Ces deux niveaux sont capables de tuer une personne non protégée en quelques heures. L’Autorité de régulation nucléaire (NRA) a déclaré que les ‘hotspots’ récemment découverts sont très concentrés et peuvent être facilement blindés.
TEPCO a déclaré que l’un des réservoirs fuyait le mois dernier. Une autre petite fuite a été retrouvée plus tard et le nombre croissant de zones à rayonnement concentré soulève des préoccupations quant à d’autres fuites.
Le gouvernement a ordonné à TEPCO de transférer toute l’eau qui est contenue dans environ 310 réservoirs faiblement boulonnés dans des réservoirs maniables et plus fiables, mais qui prennent plus de temps à construire, même si un fonctionnaire de l’organisme NRA a déclaré que certains des réservoirs maniables pourraient également ne pas être sans danger, car ils sont alignés à même le sol sur le site, plutôt que d’être construits sur une fondation en béton.

La poursuite du déversement d’eau radioactive dans l’océan Pacifique

La société TEPCO a admis qu’elle avait déversé au début de septembre 1.130 tonnes d’eau, censées être de l’eau faiblement radioactive, dans l’Océan Pacifique proche, après de fortes pluies qui ont entraîné la collecte d’eau par les barrières dressées autour des réservoirs d’eau contaminée [2].
Les fonctionnaires ont déclaré que l’eau contenue contenait entre 3 et 23 Bq / L de strontium radioactif. Bien que la limite légale de strontium dans l’eau de mer soit de 30 Bq / L. TEPCO a reconnu plus tard que les teneurs en césium ( Cs-134 et Cs-137) dans l’eau, n’avaient pas testé.
Les puits d’eau souterraine de la région, à la suite d’une récente fuite sur le site de Fukushima de 300 tonnes d’eau hautement radioactive, ont commencé à montrer des niveaux croissants de contaminations. Il a éété trouvé dans des échantillons prélevés dans un puits à proximité de la fuite le 14 septembre, des teneurs de 170.000 Bq / L de tritium.
Les pêcheurs du Japon sont outrés : ils disent qu’ils vont mettre une zone hors d’exploitation pour la pêche à l’appât blanc de seiche jusqu’au printemps prochain et la confiance des consommateurs reste faible. Le NAR prévoit de commencer les tests radiologiques des eaux océaniques au large des côtes de Fukushima, à l’aide d’un navire avec un compteur de rayonnements qui examinera le fond de l’océan, à l’intérieur d’un cercle de 1.000 km de rayon.
Le gouvernement de Corée du Sud a refusé de lever une interdiction indéterminée sur les importations de fruits de mer en provenance de 8 préfectures japonaises, qui a été imposée le 9 septembre 2013.
Il y a un an que le NRA a été mis en place pour superviser la sécurité nucléaire. Le Président Shunichi Tanaka a rappelé que la catastrophe de Fukushima est toujours dans un état précaire et qu’elle représente un danger pour les citoyens du Japon.

Les réacteurs restants sont à déclasser

Le Premier ministre Abe a demandé aux responsables de TEPCO de démanteler les deux réacteurs 5 et 6 restants et intacts. TEPCO a hésité, en espérant qu’ils pourraient être remis en marche pour réaliser des profits. Le gouvernement a déjà injecté un milliard de yens dans la société TEPCO l’année dernière. La société peut demander un autre milliard de dollars pour les coûts de démantèlement.
TEPCO a finalement accepté de fermer les réacteurs 5 et 6 qui, de toute façon, arrivent à la fin de leur durée de vie de 40 ans [4]. Cela permettrait à l’entreprise de concentrer ses travailleurs et d’autres ressources pour faire face au déclassement de réacteurs 1, 2, 3 et 4, un processus qui devrait prendre 40 ans.

Pas de retour facile à la maison pour les personnes évacuées

Environ 160.000 personnes ont été forcées d’évacuer dans les premiers jours de la crise, et des dizaines de milliers de personnes demeurent déplacées [3].
L’Institut national de la science industrielle avancée et de la technologie estime le coût total des décontaminations à 50 milliards de dollars. Les fonctionnaires municipaux sont concernés puisque les résidents ne reviendront pas, car les efforts de décontamination n’ont pas été couronnés de succès, et la peur des radiations reste élevée dans la population. Beaucoup d’anciens résidents sont inquiets du fait que les conditions à la centrale de Fukushima sont encore instables.
Bien que le gouvernement lève l’ordre d’évacuation une fois que les niveaux des radiations tombent en dessous de 20 mSv par an, la Commission internationale de protection radiologique recommande que l’exposition ne dépasse pas 1 mSv par an.
De nombreux habitants ne croient plus les estimations officiellles des mesures des rayonnements qui sont publiées par le gouvernement japonais, car ces mesures sont souvent inférieures aux lectures recueillies par les citoyens et les organisations indépendantes à l’aide de compteurs Geiger portatifs.
Nobuyoshi Ito, un agriculteur de Iitate, a déclaré à l’agence Reuters : « Ils ont enlèvé le sol sous les pieux, versé un peu de sable propre, épandu une couche de béton, plus une plaque de métal, puis ils ont mis le poste de surveillance par là dessus. En effet, cela protège des rayonnements émis par le sol. J’ai demandé au maire, « Pourquoi ne protestez-vous pas auprès du gouvernement central ? » Mais la municipalité ne fait rien pour corriger la situation ».
Pour plus d’informations sur l’ampleur réelle de la catastrophe de Fukushima et comment faire face à la contamination radioactive voir [5] Mort Camp Fukushima Tchernobyl - un rapport spécial ISIS , SiS 55.
[Vous pouvez aussi vous reporter à nos traductions en français des publications de l’ISIS, se rapportant au nucléaire, qui figurent à la suite et qui sont accessibles sur notre site ISIAS]

Références

“The crisis at Fukushima’s Unit 4 demands a global take-over” Harvey Wasserman, Common Dreams, 20 September 2013, https://www.commondreams.org/view/2013/09/20-1
“Fukushima nuclear crisis update for September 17 to September 19, 2013, Christine McCann, 20 September 2013, Greenpeace International, http://www.greenpeace.org/international/en/news/Blogs/nuclear-reaction/fukushima-nuclear-crisis-update-for-september/blog/46707/
“Record radiation readings near contaminated water tanks”, Aaron Sheldrick and Mari Saito, Reuters, 4 September 2013, http://www.reuters.com/article/2013/09/04/us-japan-fukushima-tanks-idUSBRE98301020130904
“Fukushima nuclear crisis update for September 20th to September 23rd, 2013, Christine McCann, 23 September 2013, Greenpeace International, http://www.greenpeace.org/international/en/news/Blogs/nuclear-reaction/fukushima-nuclear-crisis-update-for-september/blog/46748/
Ho MW, Greaves S and Saunders PT. Death Camp Fukushima Chernobyl, ISIS special report, 2012, also Science in Society 55, 11-42, 2012.
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Quelques unes de nos traductions en français des publications de l’ISIS, traitant du nucléaire, qui figurent à la suite et qui sont accessibles sur notre site ISIAS :
"La vérité sur Fukushima" par le Dr Mae-Wan Ho
"Les retombées radioactives de Fukushima rivalisent avec celles de Tchernobyl" par le Dr Mae-Wan Ho
"Les papillons mutants de Fukushima confirment les méfaits des faibles doses de rayonnements ionisants" par le Dr Mae-Wan Ho
"Arrêter le nucléaire" par le Dr. Mae-Wan Ho et le Professeur Peter Saunders
"Le rapport de l’OMS sur Fukushima est une parodie" par Susie Greaves
"L’illusion nucléaire du Royaume-Uni" par le Prof Peter Saunders
"La pectine de pomme est utilisable comme moyen de radioprotection" par le Dr. Mae-Wan Ho
"Le nucléaire français n’est pas sûr du tout" par Susie Greaves
"Suite à l’accident de Tchernobyl, le nombre de morts atteindrait un million d’après des preuves réelles" par le Dr Mae-Wan Ho
"Au Royaume-Uni, les subventions au secteur nucléaire se pratiquent sous des formes déguisées" par la Prof Peter Saunders
"Le thorium est-il une réponse pour fournir une énergie propre ?" par le Prof Peter Saunders
"Emploi de l’oxyde de graphène pour la décontamination nucléaire" par le Dr Mae-Wan Ho
"Les effets de proximité multiplient les doses et les méfaits des rayonnements ionisants" par le Dr Mae-Wan Ho
"La controverse à propos de la pectine" par Susie Greaves

Information de dernière minute

Fukushima : nouvelle fuite d’eau contaminée
Le Monde.fr avec AFP | 03.10.2013 à 00h37 • Mis à jour le 03.10.2013 à 09h36
« La compagnie Tokyo Electric Power (Tepco), qui gère tant bien que mal la centrale de Fukushima depuis l’accident de 2011, a annoncé, jeudi 3 octobre, avoir découvert une nouvelle fuite d’eau radioactive d’un réservoir, et n’exclut pas qu’une partie de l’eau se soit déversée dans l’océan Pacifique … »
Article complet sur http://mobile.lemonde.fr/planete/article/2013/10/03/fukushima-decouverte-d-une-nouvelle-fuite-d-un-reservoir_3488854_3244.html

Traduction et complément d’articles en français, issus de l’ISIS et traitant du nucléaire […]

Jacques Hallard, Ing. CNAM, consultant indépendant
Relecture et corrections : Christiane Hallard-Lauffenburger, professeur des écoles.
Adresse : 585 Chemin du Malpas 13940 Mollégès France.
Courriel : jacques.hallard921@orange.fr
Fichier : ISIS Energie nucléaire The World Must Take Charge at Fukushima French version.7
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