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"Fructose et hyperphagie favorisent l’épidémie d’obésité" par le Dr Eva Sirinathsinghji

Traduction et compléments de Jacques Hallard

jeudi 28 février 2013, par Sirinathsinghji Eva

ISIS Alimentation Santé
Fructose et hyperphagie favorisent l’épidémie d’obésité
Fructose and Overeating Fuelling the Obesity Epidemic
Une nouvelle étude d’imagerie cérébrale montre que c‘est le fructose - et non pas le glucose - qui provoque une activité cérébrale distincte, associée à un manque de satiété et de plénitude alimentaire. Dr Eva Sirinathsinghji

Rapport de l’ISIS en date du 25/02/2013
Une version entièrement référencée et illustrée de cet article intitulé Fructose and Overeating Fuelling the Obesity Epidemic est disponible et accessible par les membres de l’ISIS sur le site http://www.i-sis.org.uk/Fructose_and_Overeating.php ; elle est par ailleurs disponible en téléchargement ici
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Une nouvelle étude révèle que la consommation de fructose a des effets distincts sur les régions du cerveau qui régulent l’appétit, un mécanisme possible pour expliquer la boulimie et l’augmentation généralisée de l’épidémie d’obésité et des autres troubles connexes. Pour cette étude, l’équipe dirigée par le Dr Robert Sherwin à l’Université Yale aux États-Unis, a utilisé l’imagerie par résonance magnétique (IRM) pour examiner l’activité des régions du cerveau qui sont associées à l’appétit et aux systèmes de récompense, et pour évaluer comment ces régions cérébrales réagissent en présence de fructose ou de glucose [1] .

L’augmentation spectaculaire de la consommation de fructose est en corrélation avec l’obésité et le diabète

L’augmentation de la consommation de fructose s’est considérablement accrue depuis la création de sirop de maïs riche en fructose qui a largement remplacé le sucre de table comme édulcorant industriel le plus commun, en particulier aux États-Unis, où la plupart des aliments transformés, y compris les boissons gazeuses, contiennent des niveaux élévés de fructose et remplacent le sucre.
À l’échelle industrielle, une surproduction du maïs aux Etats-Unis, depuis l’ère Nixon dans les années 1970, a jeté les bases de l’utilisation répandue du sirop de maïs bon marché. Cela continue aujourd’hui : les Etats-Unis consacrent environ un quart de leurs terres agricoles pour les cultures de maïs, dont la majeure partie est maintenant constituée à partir de l’utilisation de semences de plantes génétiquement modifiées (OGM).
L’augmentation de la consommation de sirop de maïs au cours des dernières décennies, semble être en corrélation avec la forte augmentation de l’obésité et des autres troubles liés à l’alimentation, y compris le diabète, ce qui suggère que le fructose puisse être l’un des principaux facteurs en cause. Le sirop de maïs utilisé dans les boissons est habituellement composé de 55% de fructose et de 41% de glucose. Depuis son introduction, les quantités de sirop de maïs ajoutées ont agmenté plus que les quantités de saccharose, bien qu’il soit plus sucré (le saccharose est un disaccharide dont la molécule comprend à la fois du fructose et du glucose). La consommation excessive de fructose est donc considérée comme un risque majeur pour la santé.

Le cerveau réagit différemment au fructose

Dans la nouvelle étude, 10 personnes ont consommé des boissons de fructose ou de glucose 15 minutes avant que leur cerveau ne soit analysé pour la circulation sanguine cérébrale, qui est une mesure indirecte de l’activité cérébrale. Ils ont ensuite tracé les régions du cerveau où le flux sanguin était réduit de façon significative ; des schémas très différents sont apparus avec la consommation des deux sucres (Figure 1).
Figure 1 - Réduction du débit sanguin cérébral (marqué en bleu) après le glucose (panneau supérieur) et l’ingestion de fructose à différentes sections du cerveau sur l’IRMf
Le glucose réduit le débit sanguin cérébral dans l’hypothalamus, une région qui contrôle l’appétit et la détection de l’aliment et qui régule la faim, entre autres processus métaboliques, y compris la soif et le rythme circadien. Le glucose a également réduit l’activité dans d’autres régions cérébrales qui sont censées agir en synchronie pour lire l’état métabolique d’une personne et sa motivation d’entraînement et de récompense : le thalamus, l’insula, le cortex cingulaire antérieur et le striatum.
Le fructose réduit l’activité cérébrale dans le thalamus postérieur, dans le cortex cingulaire postérieur, dans le gyrus fusiforme, dans le cortex visuel et dans l’hippocampe, une région bien plus connue pour son rôle dans l’apprentissage et dans la mémoire, ainsi que dans les réponses émotionnelles de médiation vis-à-vis de l’alimentation. L’activité de l’hippocampe chez les rongeurs a déjà été repérée comme étant associée à une inhibition du comportement alimentaire. La connectivité fonctionnelle après la consommation de fructose, était seulement augmentée entre l’hypothalamus et le thalamus.
L’analyse de la connectivité fonctionnelle a également été réalisée pour identifier les régions du cerveau qui sont temporellement et donc fonctionnellement liées. Là encore, les deux sucres ont des profils très différents (figure 2).
Figure 2 - Augmentation de la connectivité fonctionnelle (taches brillantes jaunes et rouges) après ingestion de glucose (panneau supérieur) et de fructose (panneau inférieur), à différentes sections optiques du cerveau
Le glucose augmente la connectivité fonctionnelle entre l’hypothalamus et le striatum ainsi que dans le thalamus, d’autres régions qui sont impliquées dans le comportement alimentaire. D’autre part, le fructose n’a augmenté que la connectivité fonctionnelle entre l’hypothalamus et le thalamus. Les tests de comportement effectués avec les participants ont montré que le fructose conduit à une réduction des sentiments à la fois de la satiété et de la plénitude alimentaire.
Des expériences métaboliques ont permis de montrer que le glucose - mais pas le fructose -, induit une augmentation significative de l’insuline dans le sang, une hormone qui agit de façon centrale pour induire la satiété et pour valoriser la récompense due à la nourriture. Enfin, ces expériences ont permis de détecter du fructose dans le cerveau de rongeurs après une perfusion périphérique de cette molécule, montrant ainsi la capacité de la molécule de fructose à traverser la barrière hémato-encéphalique.
Tous ces résultats mis bout à bout indiquent que le cerveau réagit différemment vis-à-vis du fructose, laissant les individus avec une sensation de moindre satiété et les poussant donc à manger davantage.

Cette nouvelle étude confirme les résultats obtenus antérieurement

Cette étude n’est pas la première à établir un lien entre l’obésité et le fructose, en liaison avec des troubles métaboliques. Une étude d’alimentation à long terme conduite chez des rats a permis de constater qu’une alimentation pendant 6 mois, avec une haute teneur en fructose, suivie par 2 semaines de régime riche en graisses, conduit à un gain de poids qui résulte du développement de la résistance à la leptine pendant le régime riche en fructose [2]. La leptine est une hormone libérée par le tissu adipeux comme un signal de satiété après avoir mangé. Le fructose a également été démontré comme étant capable de provoquer la prise d’aliments chez les rongeurs, ainsi que de réduire le taux de molécules circulantes liées à la satiété, comme l’insuline et le glucagon-like 1 polypeptide (GLP-1) [3].
En effet, le fructose a été utilisé par les scientifiques comme un outil pour générer le diabète et / ou pour des modèles animaux d’obésité dans le cadre de certaines recherches. Plus récemment, un modèle de diabète chez des primates a été induit par une diète riche en fructose. Les singes rhésus ont développé une résistance à l’insuline et de nombreuses caractéristiques du syndrome métabolique, y compris une obésité centrale, une dyslipidémie (taux anormaux de lipides dans le sang, par exemple le taux de cholestérol / graisses) et de l’inflammation dans un court laps de temps : d’ailleurs ces observations ont montré qu’un sous-ensemble de singes avaient développé un diabète de type 2 [4]. Les auteurs ont ensuite suggéré qu’en raison de la « rapidité avec laquelle les changements métaboliques se produisent », que la consommation de fructose est un système « pratique et efficace » à adopter pour ces travaux de recherche.
D’autres recherches ont montré que le fructose est métabolisé d’une manière différente que celle qui prévaut pour le glucose : le fructose a une plus forte propension à être converti en graisse corporelle, un processus appelé lipogénèse. La consommation prolongée de fructose – mais pas celle de glucose – s’est montrée capable d’induire la lipogenèse de novo dans le foie [5]. De même, il a été suggéré que le fructose favorise les dépôts graisseux sous-cutanés et dans les viscéres, une caractéristique plus fréquente des troubles métaboliques, qui se rencontre notamment dans les cas de diabète [6].

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Définitions et compléments

Fructose et hyperphagie favorisent l’épidémie d’obésité

Traduction, définitions et compléments :

Jacques Hallard, Ing. CNAM, consultant indépendant.
Relecture et corrections : Christiane Hallard-Lauffenburger, professeur des écoles
Adresse : 585 Chemin du Malpas 13940 Mollégès France
Courriel : jacques.hallard921@orange.fr
Fichier : ISIS Alimentation Santé Fructose and Overeating Fuelling the Obesity Epidemic French version.3 allégée.