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"Des centres de santé pluriprofessionnels communautaires pour réduire les inégalités sociales et sanitaires dans les déserts médicaux ruraux aussi bien que dans les zones urbaines pour les populations défavorisées" par Jacques Hallard

samedi 11 mars 2023, par Hallard Jacques


ISIAS Santé Sociologie Territoires Centres de santé

Des centres de santé pluriprofessionnels communautaires pour réduire les inégalités sociales et sanitaires dans les déserts médicaux ruraux aussi bien que dans les zones urbaines pour les populations défavorisées

Jacques Hallard , Ingénieur CNAM, site ISIAS – 09/03/2023

Plan du document : Préambule Introduction Sommaire Auteur


Préambule

Un brin d’humour et quelques informations basiques avant de passer à l’introduction et/ou au sommaire de ce dossier préparé dans un but didactique

Centre de santé – Site de Gron

Source

humour médical

Dessins humoristiques médicaux

humour médical

Les courts dialogues des manchots ’givrés’ du style épuré de Xavier Gorce sont quotidiennement publiés par le journal ’Le Monde’. Le thème médical y est assez rare, mais quel que soit le thème choisi, l’analyse est toujours d’une grande pertinence. Celui-ci nous a paru bien résumer la médicalisation de la société.

Source : https://lucperino.com/443/dessins-humoristiques-medicaux.html

Centres de santé professionnels communautaires - Les centres de Santé sont des structures sanitaires de proximité dispensant des soins de premier recours. Les centres de Santé élaborent un projet de santé. Ils mettent en place des actions d’éducation thérapeutique du patient, des actions de prévention et de santé publique ».

SCIC - Une société coopérative d’intérêt collectif est une entreprise coopérative constituée sous forme de SARL, SAS ou SA à capital variable qui, selon la loi de 2001 qui a institué les SCIC, a pour objet ’la production ou la fourniture de biens et de services d’intérêt collectif qui présentent un caractère d’utilité sociale’ ... [Une SCIC peut être la bonne formule pour un centre de santé]

« Une société coopérative d’intérêt collectif (SCIC) est une coopérative de production de biens ou de services de droit français. Son sociétariat doit être multiple. Il s’agit d’une société commerciale qui associe obligatoirement autour d’un projet des acteurs salariés, des acteurs bénéficiaires et des contributeurs pour produire des biens ou des services d’intérêt collectif au profit d’un territoire ou d’une filière d’activités… » - Source : https://fr.wikipedia.org/wiki/Soci%C3%A9t%C3%A9_coop%C3%A9rative_d%27int%C3%A9r%C3%AAt_collectif

« De forme privée et d’intérêt public, la SCIC (Société coopérative d’intérêt collectif) associe des personnes physiques ou morales autour d’un projet commun alliant efficacité économique, développement local et utilité sociale… » - Détails sur ce site : https://www.les-scic.coop/presentation

La SCIC : une solution pour faire évoluer les associations - Cress Paca

Désert médical - L’expression de « déserts médicaux » est abondamment utilisée pour décrire des territoires où les habitants rencontrent des difficultés d’accès aux soins. Cette expression n’apparaît pas assez précise, ni pour décrire la pluralité des difficultés rencontrées, ni pour réfléchir aux mesures permettant de les résoudre…

« Un désert médical désigne une zone géographique où la population rencontre des difficultés pour accéder à des soins de santé1. La densité en professionnels ou établissements du secteur de la santé, en particulier en médecins, est, rapportée à sa population et ses besoins, nettement plus faible que dans le reste du pays. Ils sont corrélés avec un moindre dynamisme, notamment économique ou un vieillissement de la population et une difficulté de remplacement des professionnels cessant leur activité en dépit de leur charge de travail… » - Article complet sur : https://fr.wikipedia.org/wiki/D%C3%A9sert_m%C3%A9dical

Populations défavorisées - Personnes qui vivent sous le seuil national de pauvreté, tant en milieu urbain qu’en milieu rural. UNESCO - Populations défavorisées (quart-monde, migrants), ayant des difficultés d’accès aux soins, avec des enfants souvent en situation d’échec scolaire, en condition de logement et de vie précaire, voire avec exclusion sociale… Source : https://www.santepubliquefrance.fr/docs/populations-defavorisees-le-droit-a-la-sante - Sur le plan économique, les populations défavorisées se réfèrent à des personnes vivant dans l’extrême pauvreté (c’est-à-dire avec moins de 2,15 dollars par jour). Selon la Banques Mondiale, il avait été enregistré une baisse régulière de la grande pauvreté. Cette tendance a subi une inversion brutale en 2020, à la suite des graves perturbations engendrées par la pandémie de COVID-19, conjuguées aux conséquences des conflits
et du changement climatique, déjà responsables d’un ralentissement du rythme de réduction de la pauvreté…. – Source : https://www.banquemondiale.org/fr/topic/poverty/overview

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Introduction

Ce dossier comprend tout d’abord quelques articles sur l’accès aux soins dans les milieux ruraux (les déserts médicaux) et pour les populations défavorisées en milieu urbain en France et au Canada.

Les autres documents sélectionnés se rapportent aux solutions proposées avec les centres de santé pluriprofessionnels et communautaires en France par les instances gouvernementales et des structures dédiées.

Un exemple vivant est donné finalement à travers un enregistrement de 58 minutes diffusé par ‘France Culture’ dans sa série documentaire « La santé autrement » (Épisode 2/4).

A été ajouté in fine en annexe un document pratique de la Fédération Nationale des Centres de Santé qui traite des protocoles pluriprofessionnels, des outils au service des équipes de soins… »

Les articles choisis sont indiqués avec leurs accès dans le sommaire ci-après.

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Sommaire

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§§§


  • Qu’est-ce qu’un désert médical et comment les pouvoirs publics y répondent-ils ? - Dernière modification : 09 septembre 2022 –Document officiel ‘Vie-publique.fr’
    Un désert médical désigne une zone géographique dans laquelle il est très difficile, voire impossible, de se faire soigner par un professionnel de santé en raison de l’absence de médecins à proximité. Cette situation traduit une inégalité territoriale dans l’accès aux soins et peut s’avérer dangereuse pour la santé des populations locales.

Qu’est-ce qu’un désert médical ? - La notion de désert médical renvoie à une double dimension  :

  • une dimension spatiale liée à la densité de professionnels de santé sur un territoire : un désert médical est caractérisé par un éloignement géographique entre les patients et leur médecin, ce qui implique pour eux de parcourir une longue distance pour consulter ;
  • une dimension temporelle liée au nombre de patients par médecin : plus un médecin a de patients, moins il a de temps à accorder à chacun d’eux. 
    Le développement des déserts médicaux sur le territoire national a donc pour conséquences : 
  • l’accroissement des ’files d’attente’ avant de pouvoir consulter un professionnel, au risque d’une dégradation de l’état médical des patients ;
  • le déport de consultations vers les urgences médicales. D’une part, les patients ne trouvant pas de professionnels en consultation ’classique’ recourent par défaut aux urgences pour accéder à un médecin. D’autre part, l’absence de consultations régulières aggrave les situations de santé ;
  • des difficultés majeures pour les patients à s’inscrire auprès d’un nouveau médecin traitant, en particulier lorsqu’un praticien part en retraite. S’il n’est pas immédiatement remplacé, ou si les médecins restants refusent de prendre en charge de nouveaux patients, ces derniers subissent une rupture dans leur parcours de soins coordonnés(nouvelle fenêtre), normalement garanti par le service public. Ce parcours garantie le remboursement d’une partie des frais de santé et permet d’avoir accès à un bon suivi médical en cas de besoin, notamment pour les personnes atteintes de maladies chroniques.
    En quoi consiste le zonage ?

Les pouvoirs publics se préoccupent des déserts médicaux puisqu’il s’agit de remédier à la rupture du service public de santé

Pour suivre l’évolution des déserts médicaux, les pouvoirs publics emploient la méthode du zonage, qui consiste à évaluer la répartition de l’offre médicale sur un territoire. Cette méthode est prévue par l’article L1434-4 du code de la santé publique(nouvelle fenêtre) et repose sur plusieurs critères : 

  • l’accessibilité à un professionnel de santé ;
  • les caractéristiques de la population considérée (âge, taux d’affections de longue durée, nombre de bénéficiaires de la complémentaire santé solidaire(nouvelle fenêtre), etc.) ;
  • le nombre des professionnels de santé, leur âge, leur activité, etc.
    En 2017, une importante refonte de la méthodologie de zonage a été engagée pour permettre aux agences régionales de santé (ARS) d’identifier les territoires caractérisés par une offre de soins insuffisante ou des difficultés dans l’accès aux soins.

Ainsi, l’arrêté du 13 novembre 2017 ’relatif à la méthodologie applicable à la profession de médecin pour la détermination des zones prévues au 1° de l’article L1434-4 du code de la santé publique’(nouvelle fenêtre) vise à  :

  • établir une définition harmonisée et prospective de la fragilité, partagée par tous les acteurs de la santé ;
  • concentrer les aides au maintien et à l’installation des médecins sur les territoires les plus en difficulté en termes de démographie médicale, afin réduire les inégalités d’accès aux soins ;
  • favoriser un investissement plus important dans un plus grand nombre de territoires.
    À quoi sert l’indicateur d’accessibilité potentielle localisée ?

Le zonage s’appuie sur l’indicateur d’accessibilité potentielle localisée (APL) à un médecin. Cet indicateur recouvre trois dimensions  :

  • l’activité de chaque praticien, mesurée par le nombre de ses consultations ou de ses visites ;
  • le temps d’accès au praticien ;
  • le recours aux soins des habitants, par classe d’âge, pour tenir compte de leurs besoins différenciés.
    L’APL s’exprime en nombre de consultations accessibles par an et par habitant. Il tient compte des médecins généralistes présents sur le territoire. L’âge des praticiens est également pris en compte, afin d’anticiper les futurs départs en retraite. 

Chaque région est constituée de territoires de vie-santé(nouvelle fenêtre) qui constituent le découpage territorial de référence du zonage. Ces territoires regroupent plusieurs communes. L’indicateur APL est calculé au niveau du territoire de vie-santé en faisant la moyenne (pondérée par la population de chaque commune) des indicateurs APL des communes de ce territoire.

Cette méthode a été construite avec le souci de laisser une autonomie d’action aux agences régionales de santé. Si l’APL est un indicateur socle, l’ARS peut aussi tenir compte d’autres critères justifiant un investissement supplémentaire de la part des pouvoirs publics. Une attention particulière est ainsi apportée aux quartiers prioritaires. 

Cet indicateur permet de déclencher des aides pour faciliter l’installation des médecins dans les zones où un besoin a été identifié. 

Sur la base de la méthode de zonage, l’APL a été calculé pour les autres professions de santé de premier recours  : infirmiers, masseurs-kinésithérapeutes, chirurgiens-dentistes, gynécologues, ophtalmologues, pédiatres, psychiatres et sages-femmes. 

À lire - Cet article est extrait de :La protection socialehttps://www.vie-publique.fr/catalog...

Dans la même thématique :

Vie-publique.fr — Wikipédia

Source : https://www.vie-publique.fr/

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Depuis une dizaine d’années, l’expression de « déserts médicaux » est abondamment utilisée pour décrire des territoires où les habitants rencontrent des difficultés d’accès aux soins. Cette expression, popularisée par les médias, est aussi utilisée par les pouvoirs publics, les élus locaux ou encore le grand public pour décrire une multitude de situations. En restreignant la question aux seuls médecins généralistes il s’agit, par exemple, de signifier le manque de médecins dans un territoire donné, la difficulté à en attirer de nouveaux, le non-remplacement d’un départ à la retraite ou encore des délais d’attente ou des distances d’accès jugés trop longs. Cette question du déficit d’offre dans certains territoires renvoie à la question plus large et ancienne de l’inégale répartition spatiale de la ressource médicale en France, qui date au moins du xviiie siècle (Tonnellier, 1991). Ces sujets constituent une véritable préoccupation pour les Français comme en attestent de nombreux rapports du Sénat ou de l’Assemblée nationale depuis le milieu des années 2000 (Berland, 2005 ; Bernier, 2008 ; Bruguière, 2011 ; Hubert, 2010 ; Maurey, 2013 ; Cardoux, Daudigny, 2017 ; Faure et al., 2017), des travaux institutionnels récents qui traitent frontalement des « déserts médicaux », soit dans une démarche d’objectivation (Vergier et al., 2017), soit pour faire état de situations problématiques (Castaigne, Lasnier, 2017 ; Fromentin, 2017 ; Mangeney, Grémy, 2018). Enfin, notons que le pacte Territoire santé du gouvernement de 2012 visait à lutter contre les « déserts médicaux » quand le plan du nouveau gouvernement ambitionne de renforcer l’accès territorial aux soins, sans mentionner explicitement les « déserts médicaux ».

L’utilisation du terme « désert » semble miser sur le pouvoir communicant de ce concept géographique fort qui renvoie initialement à un espace hostile ou inhabité (Brunet et al., 1993). Ce concept a été popularisé par plusieurs géographes dans l’analyse de disparités territoriales françaises, comme la place écrasante de Paris opposée au « désert français » (Gravier, 1947) ou bien d’autres déserts de la « France du vide » tels que les espaces montagnards, les plaines céréalières prospères ou encore les campagnes agricoles en crise (Béteille, 1981). Le désert renvoie à d’autres concepts largement étudiés tel que le dépeuplement (Chevillard et al., 2016) ou la faible densité (Barthe, Milian, 2011). Ces deux phénomènes ne sont pas forcément liés (Clarimont et al., 2006), car les espaces ruraux peu denses ont une grande variété de trajectoires démographiques (Pistre, 2012) ou de situations économiques (Hilal, 2012).

Ainsi, appliqué aux questions d’accessibilité aux soins et aux médecins généralistes en particulier, un « désert médical » serait un espace sans médecins ou manquant de médecins (Picheral, 2001). Ce concept n’apparaît pas assez précis pour décrire la pluralité des problématiques d’accès aux soins rencontrées par les Français, ni pour réfléchir aux mesures permettant de les résoudre. S’il permet d’imager ces situations sous un même vocable, il ne permet pas de les nuancer. Il est probablement plus juste d’aborder la question sous l’angle des inégalités d’accès aux soins et de ses déterminants. Nonobstant, dans la suite de cet article, lorsque nous parlons de « déserts médicaux » ou de leurs corrolaires des zones sous-dotées, c’est en référence aux zones pour lesquelles les pouvoirs publics ont identifié des difficultés d’accessibilité aux médecins généralistes.

Mark F. Guagliardo (2004) distingue l’accès, qui est réel ou effectif, de l’accessibilité, qui a une dimension potentielle et constitue une composante de l’accès. Roy Penchansky et J. William Thomas (1981) décrivent l’accès aux soins comme les liens entre le patient et le système de santé et identifient cinq dimensions centrales : la disponibilité de l’offre, l’accessibilité spatiale, l’organisation des services de santé (les horaires), l’accessibilité financière et, enfin, l’acceptabilité des soins selon les attentes des patients et leurs caractéristiques. Dans la littérature, la description de l’accessibilité spatiale a surtout été faite selon la disponibilité en termes de densité de médecins et de distance d’accès à l’offre de soins. En lien avec les travaux évoqués, des études soulignent aussi l’importance des facteurs non spatiaux comme les caractéristiques du médecin (genre, langue parlée), de l’organisation des cabinets (durée d’attente)(Bissonnette et al., 2012). L’accessibilité se doit d’être mise en perspective avec les besoins de soins dont on sait qu’ils varient selon les caractéristiques démographiques et socio-économiques des populations comme l’âge, le sexe, l’éducation, le revenu ou la catégorie socioprofessionnelle (Rey et al., 2009 ; Barlet, Marbot, 2016). Par exemple, les besoins de soins sont plus élevés dans les catégories sociales populaires et/ou ayant un niveau d’études bas ainsi que chez les personnes âgées.

Enfin, si la répartition des médecins généralistes sur le territoire constitue une des composantes de l’accès aux soins et, partant, reflète certains mécanismes propres à l’installation et au maintien de ces derniers, d’autres déterminants doivent être analysés afin de définir des politiques appropriées de réduction des inégalités d’accès. On sait ainsi que les médecins privilégient davantage des critères de cadre de vie familiale (loisirs, travail du conjoint, éducation pour les enfants) et de conditions d’exercice (charge de travail modérée, équipements, travail d’équipe) que des critères de revenus attendus dans la formulation de leur choix d’installation (Isnar-Img, 2014 ; Barriball et al., 2015 ; Munck et al., 2015), ce qui conduit à questionner les mesures s’appuyant sur des incitations financières.

L’objectif de cet article est d’analyser la manière dont le faible niveau d’accessibilité aux médecins généralistes a été mesuré à différentes périodes et de la confronter au cadre conceptuel de l’accès aux soins. Nous analyserons ensuite la manière dont les pouvoirs publics ont développé une politique de lutte contre les « déserts médicaux » en définissant des zones prioritaires et en y déployant des mesures pour attirer et maintenir des médecins généralistes. À partir des constats établis et du cadre conceptuel usité, nous proposerons des perspectives de recherches pour améliorer la description de l’accessibilité aux médecins généralistes et l’évaluation de la politique menée contre les « déserts médicaux ».

Les évolutions des mesures de l’accessibilité aux soins en France

Les manières de décrire l’accessibilité aux soins

De nombreux travaux décrivent l’accessibilité spatiale aux soins en France à partir de la répartition de l’offre en termes de densité de médecins par territoire ou selon la distance à celle-ci, mais aussi à partir de dimensions non spatiales. Enfin, plus récemment, des indicateurs ou outils intégrant plusieurs dimensions ont été développés.

L’inégale répartition géographique des professionnels de santé est un problème global qui se caractérise notamment par des zones sous-dotées, principalement rurales mais aussi urbaines et défavorisées aux plans socio-économiques (Ono et al., 2014). La densité de médecins en France est dans la moyenne des pays de l’OCDE et les inégalités entre régions y sont moins élevées que dans les autres pays (OECD, 2015), mais très importantes au sein des régions (Barlet, Collin, 2009). Les départements disposant d’un centre hospitalier universitaire (chu) ou les départements littoraux de la moitié sud, les grandes villes et les villes touristiques et côtières (Rican et al., 2013) apparaissent ainsi mieux dotés en généralistes, comparativement aux autres espaces notamment ruraux (Ondps, 2016). La distance-temps est une autre manière de mesurer l’accessibilité. En 2018, 98 % de la population résident dans une commune située à moins de dix minutes d’un généraliste (Anguis et al., 2018). Les espaces concernés sont ceux, ruraux, des principaux massifs montagneux. Par ailleurs, de nouveaux indicateurs comme l’accessibilité potentielle localisée (apl) permettent de renouveler les constats de dotation en offre de soins (Barlet et al., 2012), en tenant compte du niveau d’activité des médecins pour mesurer l’offre, et du taux de recours différencié par âge des habitants pour mesurer la demande. Calculé au niveau communal, l’apl tient compte également de l’offre, de la distance à celle-ci et de la demande environnante. Ainsi pour chaque commune on connaît le nombre de consultations potentielles en médecins généralistes libéraux par habitant et par an (Vergier et al., 2017). L’accessibilité potentielle localisée montre que les communes rurales isolées sont mieux dotées que les communes rurales de la périphérie des pôles – qu’ils soient grands, moyens ou petits –, mais aussi la forte disparité de dotation des communes rurales isolées, indiquant que certaines présentent une accessibilité particulièrement faible (fig. 1).

Fig. 1

Accessibilité potentielle localisée par commune aux médecins généralistes en 2015

Fig. 1

Source : Drees, Geofla. Cartographie : Auteurs, 2017.

À ces inégalités, dont on connaît l’ancienneté (Tonnellier, 1991 ; Lévy, Allemand, 2005), s’ajoutent des dynamiques démographiques (baisse des effectifs, féminisation, vieillissement) et sociologiques des médecins généralistes pouvant avoir des impacts, ou non, sur les inégalités géographiques. Ainsi, la volonté d’équilibrer vie professionnelle et vie personnelle se traduit par un attrait notable pour certains modes d’exercice comme le salariat ou l’exercice libéral regroupé (Barlet, Marbot, 2016). Les répercussions spatiales de ces choix ne se font pas nécessairement au détriment des espaces les moins dotés puisque les centres de santé [1] sont principalement situés dans des espaces urbains ou l’offre libérale est déficitaire (Vigneron, 2014) et le regroupement sous forme de maisons de santé [2] permet d’attirer et de maintenir des médecins dans certains espaces sous dotés (Chevillard et al., 2015). En revanche, les comportements d’installation peuvent contribuer à aggraver les inégalités territoriales lorsqu’ils favorisent l’installation dans les grandes villes (proximité d’une ville pour l’emploi du conjoint), à l’exception notable de Paris (Barlet, Marbot, 2016 ; Rault, Le Breton-Lerouvillois, 2016).

Les limitations d’accès aux soins relèvent aussi de dimensions non spatiales propres à l’organisation de l’offre, mais aussi de comportements individuels des patients (Guagliardo, 2004 ; Weinhold, Gurtner, 2014). Par exemple, les délais d’obtention d’un rendez-vous, les délais en salle d’attente et les horaires d’ouverture des cabinets constituent autant de barrières potentielles (Raynaud, 2013). S’ajoutent aussi des barrières financières, comme de faibles revenus et l’absence de couverture complémentaire en présence de restes à charge tels que les dépassements d’honoraires (5 % des généralistes exercent dans un secteur conventionné à horaires libres), qui peuvent conduire à renoncer aux soins. Selon l’enquête Ehis-Esps de 2014, 25 % de la population métropolitaine et en ménage ordinaire [3] déclarent avoir renoncé à au moins un soin au cours des douze derniers mois (Fourcade et al., 2017). On sait aussi que les espaces de vie quotidiens sont plus réduits pour les classes sociales défavorisées et que cela peut amplifier les inégalités territoriales d’accès aux soins (Chauvin et al., 2013).

L’intérêt des approches pluridimensionnelles pour enrichir la description de l’accessibilité aux soins

Un certain nombre de travaux font appel aux méthodes de classification pour distinguer les espaces français d’un point de vue socio-sanitaire (Trugeon et al., 2010 ; Chevillard et al., 2015, 2016 ; Fourcade et al., 2017). Ces méthodes combinent plusieurs dimensions relatives à l’offre de soins et aux caractéristiques des populations qui permettent d’approcher les besoins de soins. Par exemple, l’état de santé des populations en est un marqueur et sa géographie révèle de profonde inégalités territoriales de santé (Rican et al., 2016). La confrontation de plusieurs dimensions montre notamment des espaces aux besoins de soins élevés (état de santé défavorable, personnes âgées surreprésentées) dotés d’une offre de soins plus faible qu’ailleurs. La plupart des espaces ruraux du Nord-Est de la France en sont un exemple.

Aussi la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees) propose une lecture des espaces qui cumulent des difficultés d’accès en considérant trois portes d’accès au système de santé : le médecin généraliste, la pharmacie ou les urgences (Vergier et al., 2017). Cela concerne 0,5 % de la population vivant principalement dans des petites communes rurales bien souvent montagneuses, dont un quart sont en Auvergne-Rhône-Alpes.

On observe ainsi que la mesure de l’accessibilité aux soins s’est progressivement étoffée, partant d’indicateurs simples (densité, puis distance) pour aller vers des indicateurs plus complexes comme l’accessibilité potentielle localisée. Des approches complémentaires, pluridimensionnelles, permettent d’enrichir la description des besoins de soins de manière agrégée. Toutefois, la description de l’accessibilité aux soins doit être complétée soit par des indicateurs au niveau national ou régional, construits à partir des bases de données médico-administratives, soit à un niveau individuel à partir de données d’enquête. Par exemple, les difficultés d’inscription à un médecin traitant, l’accès aux soins non programmés, les délais d’attente, l’accessibilité financière ou bien l’accessibilité spatiale selon d’autres modes de transport (modes doux ou transports en commun) doivent être documentés, tout comme des dimensions plus personnelles telle que l’acceptabilité des soins.

Les réponses des pouvoirs publics aux zones sous-dotées

La définition des zones sous-dotées et sur-dotées est une problématique commune à plusieurs pays et souvent bien plus ancienne qu’en France (Ondps, 2016). Ces zones ont généralement pour objectif de rééquilibrer l’offre de soins en limitant l’installation dans les zones sur-dotées et/ou en incitant à s’installer dans les zones sous-dotées. En France, la définition de ces zones est antérieure à celle des mesures pour y attirer et maintenir des médecins progressivement déployées depuis 2005. Ces mesures émanent de plusieurs acteurs : État, collectivités territoriales et assurance maladie avec parfois des zonages spécifiques (aménagement du territoire). Nous nous concentrons ici uniquement sur les zonages concernant des médecins généralistes puis sur les mesures attenantes. Nous n’abordons pas les zonages relatifs aux autres professionnels de santé de premier recours.

Les méandres de la construction des zones sous-dotées en médecins généralistes en France

De 1999 à 2005 : une définition pas-à-pas de zones déficitaires sans dispositifs d’aides à l’installation

La notion de zone déficitaire apparaît dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale (plfss) de 1999 où il est prévu qu’un fonds puisse « contribuer au financement des aides aux professionnels de santé […] où est constaté un déficit en matière d’offre de soins ». En 2003, le rapport de Charles Descours propose une cartographie pionnière des zones déficitaires identifiant les cantons dont la densité est inférieure à 3 médecins généralistes pour 5 000 habitants, sans pour autant expliquer ce seuil (Descours, 2003). L’échelle du canton s’avérait, à l’époque et en l’absence des bassins de vie [4], adéquate entre la commune et le département. La définition des zones déficitaires fut ensuite chaotique. Un décret du 28 novembre 2003, abrogé un an plus tard, définira les zones déficitaires principalement à partir des critères de densité. Puis une circulaire du 26 mars 2004, non publiée au Journal officiel, fixera de nouveaux critères (Barbat-Bussières, 2009).

En 2004, les travaux de l’Observatoire de la démographie des professions de santé (Ondps) caractérisent les cantons les moins bien dotés en médecins généralistes à partir d’indicateurs relatifs à leur densité, à leur activité et à la consommation de soins. Ce travail national devait ensuite servir aux observatoires régionaux pour définir leurs zones déficitaires, en partenariat avec les Unions régionales des caisses d’assurance maladie (Urcam) et l’État.

De 2005 à 2011 : une définition nationale des zones déficitaires ajustée localement par les missions régionales de santé (mrs)

De 2005 à 2011, des zones déficitaires en médecins sont définies au niveau national par l’assurance maladie et servent de socle de réflexion pour les missions régionales de santé (mrs) créées par la loi du 13 août 2004. La méthode de construction des zones comprend des recommandations concernant le périmètre et les critères : utilisation de la densité et de l’activité des médecins (Dhos, 2005). Les missions régionales de santé ont ainsi défini 360 zones déficitaires, regroupant 4 % de la population. Les mesures conventionnelles (assurance maladie) et fiscales pour attirer des médecins généralistes, détaillées ensuite, s’y appliquent. En parallèle et depuis 2005, des dispositifs incitatifs (exonérations fiscales, bourses d’étude) sont mis en œuvre par l’État et les collectivités territoriales pour attirer des médecins dans les zones de revitalisation rurale (zrr), puis dans les zones franches urbaines (zfu). On peut ainsi noter l’existence de deux systèmes de zonages parallèles pour attirer des médecins dans des zones prioritaires et s’interroger sur cette dissociation.

La circulaire Dhos de 2008 abroge celle de 2005 et précise la définition des nouvelles zones sous-dotées, qui se différencient par un maillage imposé, pseudo-cantons pour les unités urbaines de plus de 30000 habitants et bassins de vie dans le reste des espaces, ainsi que par des effectifs de populations résidant en zones sous-dotées ne pouvant pas augmenter de plus de 20 % ceux de 2005. Le choix de ces deux mailles, dont on sait qu’elles ne s’imbriquent pas parfaitement (Chevillard, 2015), n’est pas discuté dans cette circulaire.

De 2011 à 2017 : une définition régionale des zones sous-dotées avec une contrainte nationale de population

Fin 2011, puis début 2012, un arrêté et une circulaire précisent la définition des zones fragiles de premier recours ou « zonage pluri-professionnel ». Ces zones sont déterminées par les Agences régionales de santé (ars) dans le volet ambulatoire du schéma régional d’organisation des soins. Les indicateurs et le maillage sont librement choisis, mais, à la différence des précédents zonages, le maillage doit tenir compte d’un découpage reconnu par l’Insee. De plus, la population en zones sous-dotées est plafonnée à 7,34 % de la population nationale avec des différences entre régions, dans un objectif d’équité tenant compte des différences d’offre et de besoins de soins entre régions et de l’ancien zonage (Dgos, 2012). La fixation de ce seuil, qui semble arbitraire, tout comme l’abandon des précédents maillages sans justification ou évaluation de ceux-ci, amènent à s’interroger sur la continuité de la politique ainsi que sur sa recevabilité par les acteurs régionaux.

Ces zones accueillent les mesures suivantes : contrat d’engagement de service public (cesp), option Démographie, exonération fiscale des revenus issus de la permanence des soins ambulatoires (pdsa).

En 2013, une nouvelle aide à l’installation, le contrat de « praticien territorial de médecine générale » (ptmg) s’ajoute aux dispositifs existants. Le décret du 14 août 2013, relatif à ce contrat, prévoit que les zones ptmg peuvent être identiques, aux autres zones existantes. Ces éléments conduisent à une grande variété des zones sous-dotées dont on saisit les différences de maillage quand certaines agences régionales de santé utilisent la commune et d’autres le bassin de vie (fig. 2).

Fig. 2

Communes définies comme déficitaires par les agences régionales de santé entre 2012 et 2017

Fig. 2

Sources : Cartosanté, Geofla. Cartographie : auteurs, 2018.

À partir de 2017, une « recentralisation » de la définition des zones sous-dotées

La période 2017-2022 marque une rupture : le maillage (territoires de vie) et l’indicateur (l’accessibilité potentielle localisée) sont imposés (ministère des Solidarité et de la Santé, 2017). Le territoire de vie a été choisi car, regroupant plusieurs communes, il atteint une taille critique de façon à assurer au médecin une patientèle suffisante et à permettre la pratique en exercice coordonné (Vergier et al., 2017). Deux étapes se succèdent dans la définition des zones prioritaires. Un travail national identifie d’abord plusieurs types de zones : celles qui sont automatiquement prioritaires, pour lesquelles l’accessibilité potentielle localisée aux médecins généralistes de moins de 65 ans est inférieure à 2,5 consultations par an et par habitant (8 % de la population), et celles dites « viviers » dont l’accessibilité potentielle localisée est comprise entre 2,5 et 4. Ces seuils ont été choisis par rapport à la moyenne et la médiane de l’accessibilité potentielle localisée (4,11 et 4,07). Les agences régionales de santé ont ensuite la possibilité de choisir d’autres zones prioritaires, parmi le vivier, dans la limite de la population en zone prioritaire qui leur est attribuée (18 % au total). L’ensemble des mesures d’aides à l’installation existantes s’appliquent dans ces zones prioritaires et les Agences régionales de santé peuvent les compléter avec des zones d’action complémentaire accueillant une partie des mesures.

Ces changements apportent une simplification par rapport aux précédents zonages dans la mesure où ces nouvelles zones regroupent les différentes mesures, sont comparables entre elles et laissent une marge de manœuvre appréciable aux agences régionales de santé. Toutefois, comme précédemment, on peut s’interroger sur les nouveaux changements opérés (maillage, indicateurs) et les raisons de l’abandon de la précédente méthode.

Approche régionale : continuité ou rupture entre les zonages prioritaires ?

Afin de saisir les changements induits par les zonages de 2017, nous analysons les choix opérés dans la région Bourgogne-Franche-Comté. Nous regardons l’évolution de la population en zones prioritaires et ne prenons pas en compte les zones d’actions complémentaires définies par l’Agence régionale de santé, qui couvrent 68 % de la population régionale (tabl. 1).

Tabl. 1

Évolution de la population en zone prioritaire entre 2012 et 2017 en Bourgogne-Franche-Comté

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Effectifs

Population régionale (%)

Population dans une commune prioritaire en 2012 328602 11,7
Population dans une commune prioritaire en 2017 595610 21,2
Population dans une commune prioritaire depuis 2012 149827 5,4
Population dans une commune nouvellement prioritaire en 2017 445 783 15,8
Population dans une commune anciennement déficitaire en 2012 180458 6,4
Population hors zone prioritaire en 2017 2043423 72,4

Source : Agence régionale de santé Bourgogne-Franche-Comté

La part de population régionale considérée comme résidant en zone déficitaire était estimé à 11,7 % en 2012. Les indicateurs utilisés par la Franche-Comté concernaient l’offre de soins (densité, distance et part de généralistes de plus de 60 ans), la population (plus de 75 ans, enfants de moins de cinq ans, affections longue durée) et les services (établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes, urgences, services de soins infirmiers à domicile), tandis que le maillage utilisé n’est pas précisé (ars Franche-Comté, 2012). En Bourgogne, les indicateurs décrivaient, pour chaque profession, le niveau de recours, la densité, la part des plus de 55 ans, l’activité moyenne, ainsi que la part de population de plus de 75 ans, et le maillage était le bassin de vie (ars Bourgogne, 2012).

En 2017, l’estimation de la part de la population régionale considérée comme vivant en zone déficitaire augmente significativement (21,2 %). Ainsi, 5,4 % des habitants étaient déjà en zone déficitaire en 2012, 15,8 % le sont nouvellement et 6,4 % habitent dans une commune qui n’est plus considérée comme déficitaire, mais qui peut être en zone complémentaire. De la sorte, les nouvelles zones définies en 2017 rassemblent davantage de population, mais la continuité est relative, car 55 % des habitants ne sont plus en zone déficitaire. Ce dernier résultat peut être interprété ainsi : dans un contexte d’augmentation du nombre de territoires prioritaires, ceux qui ne le sont plus ont, à priori, une situation relative qui s’est améliorée ou moins dégradée qu’ailleurs. Les zones prioritaires en 2017 se situent principalement dans la Nièvre, l’Yonne, le Châtillonais en Côte-d’Or, le Sud du Jura, le Nord-Est du Doubs ou encore le Charollais ou le Creusot en Saône-et-Loire (fig. 3). Les zones quittant le zonage prioritaire sont notamment la Bresse bourguignonne, l’Arbois ou encore le Tonnerrois.

Fig. 3

Types de communes selon les zonages prioritaires des médecins généralistes en 2012 et 2017

Fig. 3

Source : Ars Bourgogne-Franche-Comté, Geofla, Insee. Cartographie : auteurs, 2018.

Zones déficitaires : quelles logiques de continuité et/ou de rupture ?

Le vocable des zones déficitaires en médecins généralistes a évolué sans faire mention explicitement de « déserts médicaux » : zones déficitaires, zones sous-dotées, zones sous-denses ou encore zones prioritaires. La définition de ces zones, après des débuts balbutiants, a commencé par une approche nationale ajustable régionalement (tabl. 2). La période suivante, 2012-2017, s’est démarquée par une très grande liberté laissée aux Agences régionales de santé, quand les derniers zonages sont un compromis entre des consignes nationales et une marge de manœuvre régionale. La définition de ces zones semble plutôt suivre une logique d’équité pour couvrir les espaces ayant le plus de besoins. En effet, initialement, l’égalité prévalait avec une approche nationale ciblant tous les espaces les moins dotées. Puis, progressivement, les marges de manœuvre laissées aux acteurs régionaux leur ont permis de cibler leurs zones prioritaires avec toutefois des quotas prenant compte les différences d’offre de soins entre régions. Par exemple, la Bourgogne-Franche-Comté a « droit » à 21,9 % de sa population en zones prioritaires quand cette proportion est de 3,8 % en Provence-Alpes-Côte d’Azur.

Tabl. 2

Synthèse des différents zonages déficitaires en médecins généralistes

Tabl. 2

Au fil du temps, les dispositifs de lutte contre les « déserts médicaux » sont venus s’inscrire dans ces zones parfois avec un manque de cohérence, rectifié dans les derniers zonages. Ainsi, au fil des périodes, il n’y pas eu de continuité dans le choix des maillages. Aussi peut-on se demander si cela n’entraîne pas une rupture dans l’accompagnement des zones déficitaires ou, plus généralement, dans la lisibilité de la politique. En outre, pour construire ces zones déficitaires, les pouvoirs publics ont utilisé les indicateurs disponibles à chaque période qui, nous l’avons vu, omettent certaines dimensions de l’accessibilité aux soins, ainsi que des zonages différents sans forcément justifier leur maintien ou leur changement. Ainsi la marge de manœuvre laissée aux Agences régionales de santé pourrait répondre en partie à ces enjeux. Pour autant, les apports de l’accessibilité potentielle localisée et du dernier zonage utilisé apparaissent notables, ceci aussi bien pour le zonage, présenté comme le bon niveau pour déployer des réponses aux « déserts médicaux », que pour les dimensions couvertes par l’accessibilité potentielle localisée qui enrichissent significativement les approches initiales cantonnées à la densité de médecins.

Les dispositifs pour attirer et maintenir des médecins généralistes dans les zones sous-dotées

En France où les médecins disposent d’une totale liberté d’installation, des mesures incitatives financières ont été mises en œuvre pour attirer et maintenir des médecins généralistes dans les zones déficitaires, principalement rurales, malgré la moindre appétence des médecins pour ces mesures par rapport aux autres déterminants de l’installation et du maintien que sont le cadre de vie et les conditions d’exercice (fig. 4). Un rééquilibrage s’est ensuite progressivement opéré vers des dispositifs d’amélioration des conditions d’exercice. Ces mesures interviennent à différents moments de la carrière des médecins : formation, installation, exercice.

Fig. 4

Les différentes mesures visant à améliorer la répartition géographique des médecins généralistes : zonages et acteurs associés

Fig. 4

Conçue par les auteurs, 2018.

Le premier temps d’intervention concerne la formation des médecins durant laquelle plusieurs leviers sont disponibles. Il est possible de faire varier le nombre d’étudiants en médecine via le numerus clausus en fin de première année, puis la répartition selon les spécialités par les postes proposés aux épreuves classantes nationales (ecn). Il s’agit de leviers de long terme, car la formation dure au minimum neuf ans. Des aides financières aux étudiants sont proposées par les collectivités territoriales depuis la loi de développement des territoires ruraux (ldtr) de 2005 (aides au logement, bourses d’études, indemnités de transport), ainsi que par l’État avec le contrat d’engagement de service public (cesp) depuis 2010. Ce dernier est une bourse d’étude versée contre un engagement de s’installer en zone déficitaire. L’existence concomitante de dispositifs similaires rend le suivi de ces zones et dispositifs complexe et peut conduire à des effets contre productifs. Par exemple, les bourses des collectivités territoriales ont été ensuite concurrencées par celles des Agences régionales de santé (Barthe, Lima, 2012). Enfin, l’obligation de stage en médecine générale, prévue par la loi en 2012, peut aussi être un moyen de susciter des vocations de médecins généralistes.

Le deuxième temps d’intervention est celui de l’installation. Des aides émanent d’abord des collectivités territoriales : primes à l’installation, prêt de locaux. Des aides logistiques ou juridiques comme les plates-formes d’appui aux professionnels de santé ont aussi été mises en place en 2011. Puis les soutiens à des « praticiens territoriaux de médecine générale » instaurés en 2013 consistent à garantir des revenus aux médecins s’installant dans des zones sous-dotées et à leur offrir une couverture sociale. Ces contrats sont complétés, en 2015, pour les praticiens territoriaux de médecine ambulatoire, étendant le principe à d’autres spécialités médicales. La convention d’août 2016 entre l’assurance maladie et les médecins prévoit notamment un contrat d’aide à l’installation pour les médecins s’installant en groupe en zones déficitaires (50 000 euros versés sur deux ans en contrepartie d’un engagement de trois ans d’exercice), ainsi qu’un contrat de transition pour soutenir les médecins, proches de la cessation d’activité et qui accueillent un médecin nouvellement installé.

Les aides à l’exercice ambitionnent de rendre l’exercice en zone déficitaire plus attractif. Les premières mesures proviennent de la loi de développement des territoires ruraux consistant en des incitations fiscales pour les médecins exerçant en zone de revitalisation rurale (exonérations de la taxe professionnelle, de l’impôt sur le revenu, des charges patronales pour l’embauche d’un salarié). En 2007, un avenant à la convention médicale permet aux médecins exerçant en groupe en zones déficitaires de bénéficier d’une majoration de 20 % de leurs honoraires. Cet avenant a été restructuré en 2011 par l’option Démographie où les aides sont plafonnées à 20000 euros par an et complété par l’option Santé solidarité territoriale (qui deviendra un contrat en 2016) prévoyant que des médecins de zones sur-dotées épaulent leurs confrères en zones sous-dotées. Des contrats de praticien territorial de remplacement existent depuis 2017 et facilitent les remplacements dans les zones sous-dotées (Cardoux, Daudigny, 2017). Dans la lignée des aides à l’exercice, une série de mesures vise à soutenir le développement des maisons de santé, sur le plan de l’ingénierie, de la construction et du fonctionnement. Ce sont des structures d’exercice pluriprofessionnel comprenant au moins deux médecins généralistes et un paramédical ayant rédigé un projet de santé. Les pouvoirs publics supposent qu’elles offrent un cadre d’exercice plus attractif pour les médecins (Mousquès, Bourgueil, 2016).

Les mesures mises en œuvre pour améliorer la répartition géographique des médecins en France demeurent peu évaluées, à l’exception d’un rapport récent (Cardoux, Daudigny, 2017). Pour l’heure, les aides des collectivités territoriales ne sont pas recensées intégralement, ni évaluées. Pour les aides provenant de l’État, tels que les contrats d’engagement de service public ou de praticiens territoriaux de médecine générale, on connaît le nombre de postes proposé et leur coût, ainsi que le coût des exonérations fiscales, mais pas encore le nombre d’installations ou de maintiens qu’elles ont engendré. Les aides conventionnelles de l’assurance maladie comme les majorations d’honoraires, ont été jugées coûteuses et peu efficaces avant leur restructuration (Cour des comptes, 2014). Toutefois des données plus récentes (Cardoux, Daudigny, 2017) renseignent sur le nombre de bénéficiaires et le coût des nouveaux dispositifs conventionnels sur plusieurs années, ainsi que sur les installations dans les zones fragiles. Il en ressort que la part des installations en zones fragiles n’a que faiblement augmenté depuis 2010, comparativement aux autres zones (+0,5 point).

Concernant les maisons de santé, co-financées par plusieurs acteurs, de plus en plus d’éléments chiffrés permettent d’évaluer le coût d’une partie de ces structures (Chevillard, Jerber, 2016 ; Cardoux, Daudigny, 2017). On sait, en outre, que les espaces avec maisons de santé enregistrent une évolution plus favorable de leur densité de médecins généralistes libéraux que des espaces similaires qui n’en ont pas (Chevillard et al., 2015) et que ces structures permettent des premières installations de médecins généralistes (Chevillard, Jerber, 2016).

Réflexions sur la politique de lutte contre les zones sous-dotées et propositions de recherches

La politique publique de lutte contre les zones sous-dotées est fondée sur plusieurs éléments : la qualification de l’accessibilité aux soins, la définition de zones à difficultés, la connaissance des déterminants de l’installation et du maintien des médecins, qui peuvent expliquer les disparités et le déploiement de mesures pour y répondre. L’évaluation de cette politique nécessite donc la prise en compte de plusieurs aspects. On attend des zones qu’elles reflètent au mieux la situation, tant d’un point de vue objectif (la réalité locale) que relatif (la comparaison à d’autres territoires), qu’elles correspondent à une échelle pertinente et enfin qu’elles permettent de déployer efficacement des mesures de correction. On attend des mesures qu’elles répondent aux déterminants de l’installation des médecins et qu’elles aient un impact sur l’installation et le maintien de ces derniers.

Les mesures de l’accessibilité aux soins se sont progressivement enrichies, mais certaines dimensions ne sont pas encore décrites et relèvent de dimensions personnelles, comme l’accessibilité financière, ou professionnelles comme les caractéristiques du soignant. D’autres dimensions relèvent de l’organisation des soins tels que les délais d’attente avant un rendez-vous ou les horaires d’ouverture. À cet égard, la qualification de ces dimensions manquantes doit être étoffée à partir de données médico-administratives et, le cas échéant, à partir d’enquêtes. Ces dernières demeurent toutefois coûteuses et complexes à mettre en œuvre (Vergier et al., 2017). En outre, on pourrait utiliser d’autres cadres conceptuels pour décrire les difficultés d’accès aux soins. Par exemple, Ines Weinhold et Sebastian Gurtner (2014) identifient cinq types d’inadéquation aux besoins de soins : le manque de soignants, l’inégale répartition géographique, le déficit de qualité des soins, la limitation d’accès et l’utilisation inefficace des services de santé. Si la plupart de ces dimensions sont communes au cadre conceptuel que nous avons utilisé, le déficit de qualité de soins, est lui, rarement étudié. Il s’agit, par exemple, de la difficulté à réaliser des soins coordonnés dans les zones en déficit de professionnels de santé (infirmiers et médecins). De surcroît, les données relatives à la satisfaction des usagers en médecine générale demeurent parcellaires (Castell, Dennevault, 2017) et, à notre connaissance, lacunaire sur le ressenti des habitants vivant dans un « désert médical », appelant ainsi à de nouvelles recherches. Enfin, nous nous sommes intéressés à l’accessibilité aux médecins généralistes, mais de telles questions doivent être étendues aux autres professionnels de santé de premier recours ou de second recours.

La définition des zones sous-dotées a connu une grande variabilité selon les régions. Ces zones sont désormais un compromis entre des consignes nationales et une marge de manœuvre régionale. Afin de cerner les effets de l’évolution des zonages et indicateurs sur les territoires, il serait intéressant de prolonger l’exploration menée pour la Bourgogne-Franche-Comté, à l’ensemble de la France et depuis 2005. De tels éléments sont un préambule pour distinguer l’effet zonage de celui des dispositifs dans la lutte contre les « déserts médicaux ». Seulement le recueil de telles données n’a pas forcément été historicisé et les acteurs chargés de définir les zones ont pu évoluer, les Agences régionales de santé ayant été créées en 2010. Un autre moyen serait de mesurer les disparités territoriales de médecins généralistes avant et après la mise en place de ces zones et de savoir si elles s’accroissent ou bien régressent. Aussi la comparaison de la politique de lutte contre les déserts médicaux avec d’autres politiques territorialisées et leurs évolutions (zones de revitalisation rurale, quartiers prioritaires, réseaux d’éducation prioritaire) constitue une perspective de recherche utile pour mieux qualifier et évaluer ces différentes politiques.

Certains élus appellent à imposer davantage de contraintes sur les lieux d’installation des médecins (Maurey, 2013 ; Faure et al., 2017), alors que les éléments d’évaluation de l’impact des dispositifs existants demeurent parcellaires. À l’instar des évaluations de l’impact des maisons de santé sur l’évolution de la densité de médecins généralistes (Chevillard et al., 2015), d’autres sont nécessaires sur les dispositifs non évalués (praticiens territoriaux de médecine générale, contrat d’engagement de service public, aides fiscales), les initiatives locales (médecins étrangers, salariat) ainsi que sur les effets de l’addition de plusieurs dispositifs dans un territoire donné. De plus, les exemples de la restriction de la liberté d’installation chez les infirmiers et sages-femmes montrent que, depuis 2010, les nouvelles installations ont certes été limitées dans les zones sur-dotées, mais ont surtout profité aux zones intermédiaires et très peu aux zones sous-dotées (Cardoux, Daudigny, 2017). Aussi, face à la baisse prévue des effectifs de médecins généralistes, il faudra « faire plus avec moins » (Ono et al., 2014) au cours des prochaines années. Les solutions peuvent alors provenir de gains d’efficience chez les médecins généralistes, à travers le regroupement pluriprofessionnel (Mousquès, Bourgueil, 2014), ou de la délégation de tâches auprès des infirmières, comme cela existe désormais avec les « infirmières de pratiques avancées » comme celle du dispositif Asalée (Fournier et al., 2018). Il apparaît aussi vital de rendre plus attractive la médecine générale, pour disposer d’effectifs plus élevés (Faure et al., 2017) et partant, tenter de résorber les déséquilibres géographiques.

Les mesures déployées jusqu’alors par les différents gouvernements s’appuient majoritairement sur des incitations financières, et insuffisamment sur les déterminants de l’installation et du maintien des médecins. Nous avons également vu que la définition et le renouvellement de zones sous-dotées semblent avoir primé sur les mesures qui y sont déployées. On peut se demander s’il ne faudrait pas mettre au même plan ces éléments, afin de renouveler les mesures à l’œuvre au-delà de la nécessité de les évaluer. Ainsi, de nouvelles mesures, en amont de la formation des médecins, pourraient être testées, comme cela a pu être souligné par ailleurs (Castaigne, Lasnier, 2017). À titre d’exemple, la prise en compte de l’origine géographique des étudiants est de nature à favoriser l’installation de jeunes médecins dans des espaces sous-dotés puisque les étudiants issus du milieu rural ont plus de probabilité que les autres de s’y installer et d’y rester (McGrail et al., 2016). Par ailleurs, le cadre de vie familial est primordial et, à ce niveau, les politiques d’aménagement du territoire peuvent améliorer l’attractivité de certains espaces en améliorant les possibilités d’emplois pour le conjoint (télétravail), l’accès à des services publics (enseignement des enfants), à des services de la vie quotidienne ou à des équipements (loisirs). Il s’agirait ainsi d’inscrire la lutte contre les « déserts médicaux » dans une politique plus large d’aménagement et de cohésion des territoires ou, à défaut, en articulation avec un certain nombre de dispositifs déjà existants comme cela existe avec la co-présence de maisons de santé et de maisons de services au public (Chevillard, Jerber, 2016), d’autant plus que, dans certains territoires, les enjeux dépassent les seules questions d’accessibilité aux soins. Par exemple, dans les espaces ruraux en dépeuplement, s’additionnent des problèmes de vieillissement, de désertification médicale et de pauvreté (Savignat, 2013 ; Chevillard et al., 2016), quand dans les espaces hyper-ruraux, se trouvent un « entassement de handicaps naturels ou créés » (Bertrand, 2014) : faible densité de population, vieillissement, enclavement, manque d’équipements ou services. Les espaces fragiles constituent un autre exemple cumulant fragilités démographiques, économiques et sociales, et recouvrent principalement des espaces de faible densité humaine (Rieutort et al., 2018). De nouvelles recherches sur les politiques territoriales visant à garantir des services dans les espaces peu denses, comme cela existe pour les pharmacies ou la poste, pourraient aussi apporter des enseignements pour la politique luttant contre les déserts médicaux et/ou les espaces qui cumulent des fragilités.

Conclusion

L’objectif de cet article était de rendre compte de l’évolution de la mesure de l’accessibilité aux médecins généralistes en France au regard du cadre conceptuel classique de l’accès aux soins. Il s’agissait d’analyser ensuite la manière dont les pouvoirs publics s’en sont emparés pour qualifier les « déserts médicaux » et mettre en place des mesures pour lutter contre ces derniers. À partir des constats établis, nous proposons des pistes de recherches pour mieux qualifier les situations de « déserts médicaux », enrichir la politique actuellement mise en œuvre et améliorer l’évaluation des dispositifs qui la composent.

La définition des espaces connaissant des difficultés d’accès aux médecins généralistes s’est faite en plusieurs étapes en tirant profit des améliorations dans la mesure de l’accessibilité. On est ainsi passé d’approches utilisant des ratios de médecins par habitant et situant les espaces les uns par rapport aux autres, à des mesures pluridimensionnelles. C’est dans ces différents espaces prioritaires qu’ont successivement été instaurés des dispositifs incitatifs pour attirer et maintenir des médecins généralistes.

Le champ des « déserts médicaux » nécessite d’être étudié encore sous plusieurs autres angles. D’autres dimensions de l’accès aux soins doivent être qualifiées, en particulier celles décrivant les dimensions personnelles, mais aussi la qualité des soins dans les zones sous-dotées. L’évaluation de la politique de lutte contre les « déserts médicaux » nécessite une évaluation de l’ensemble des zonages définis, des dispositifs déployés et de leur addition, ou encore des effets individuels des zonages, puis des dispositifs. Par ailleurs, il persiste un décalage entre les déterminants connus de l’installation des médecins et les mesures déployées.

Le lien entre aménagement du territoire et « déserts médicaux » doit aussi être davantage exploré afin d’en comprendre les origines ou bien les enjeux des territoires cumulant plusieurs formes de fragilités. On pourrait, par exemple, se demander si la situation actuelle des « déserts médicaux » est issue d’un manque temporaire de médecins généralistes, liée à la baisse du nombre de médecins formés dans les années 1990, et/ou de causes liées à l’aménagement ou à l’attractivité des territoires en lien avec la métropolisation d’espace français.

Notes

  • [1]
    Les centres de santé regroupent différents professionnels de santé qui sont salariés. Ces centres peuvent être monodisciplinaires (infirmiers ou dentaires) ou polyvalents et regrouper alors plusieurs professions médicales et paramédicales (médecin généraliste, infirmier, etc.).
  • [2]
    Les maisons de santé regroupent au minimum deux médecins généralistes libéraux et un paramédical libéral (infirmier ou autre). Ces structures se distinguent des cabinets de groupe par la rédaction d’un projet de santé validé par l’Agence régionale de santé et qui atteste d’un exercice coordonné.
  • [3]
    L’enquête EHIS-ESPS concerne les personnes vivant en ménages ordinaires et exclut donc les personnes les plus dépendantes qui vivent en institution.
  • [4]
    Selon l’INSEE, le bassin de vie est le plus petit territoire sur lequel les habitants ont accès aux équipements et services les plus courants.

Mis en ligne sur Cairn.info le 07/01/2019

https://doi.org/10.3917/eg.474.0362

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  • Accès aux soins des populations défavorisées : la relation soignant-soigné – Par Huguette Boissonnat-Pelsy, Chantal Sibue-DeCaigny - Dans Laennec 2006/2 (Tome 54), pages 18 à 30 – Document ‘Cairn.inf’
    De nombreuses initiatives ont pour but de favoriser l’accès à la santé des plus démunis et de mieux coordonner les dispositifs existants : l’accès de tous au système de droit commun est une préoccupation majeure des acteurs du monde sanitaire. Le « droit à la santé des plus fragiles » nécessite une réflexion dans les domaines de la couverture sociale, de la prévention, des soins, avec pour objectif non seulement l’accès aux soins mais bien aussi l’amélioration de l’état de santé des plus pauvres. Ces questions ne peuvent se résoudre sans développer une meilleure connaissance des problèmes liés à la précarité et une plus grande coordination des acteurs intervenant dans ce domaine.

Le mouvement Aide à toute détresse (ATD) Quart-Monde a été largement porteur de ce courant qui bouscule l’idée que « l’on n’a rien à apprendre des pauvres » et qui affirme, bien au contraire, que c’est aussi par la prise de parole des plus démunis et par leur participation aux actions de lutte contre la pauvreté que l’effectivité de l’accès aux droits se construit [1]. De nombreux professionnels sont conscients que leurs prestations et leurs interventions en direction des publics exclus ne produisent pas toujours les effets escomptés, quand bien même elles s’inscrivent dans le droit-fil des enseignements reçus, des dispositions institutionnelles législatives, voire des plans d’action mis en œuvre avec les autres partenaires [2]. Les actions Quart-Monde Université – 1996-1998 [3], Quart-Monde Partenaire – 2000-2001 [4], la promotion de formations fondées sur les savoirs d’expérience des très pauvres – 2002 [5], constituent autant de défis pour reconstruire une réciprocité citoyenne et préparer une société plus démocratique fondée sur les droits de l’homme.

Dans cette perspective, le Mouvement ATD Quart-Monde a initié une recherche/action intitulée « La relation soignant/soigné dans le cadre de l’accès aux soins et à la prévention des populations démunies » [6]. Cette étude s’appuie sur l’expression, la rencontre, du monde des soignants et de celui des plus démunis.

Composition du groupe de réflexion, thèmes abordés et méthodologie

Commencé en 2000 à Nancy, ce travail se poursuit actuellement. Il trouve son origine dans la création d’un groupe de réflexion composé de quatre entités : des personnes en situation de précarité ; des professionnels de santé et du secteur social impliqués dans des actions de santé auprès de ce public ; des membres actifs du Mouvement ATD Quart-Monde en situation de pauvreté ou en poste de soignant ; des institutionnels, des associations et des responsables politiques de la santé.
Les thèmes abordés sont les suivants :

  • la relation établie entre les offreurs de soins et les plus pauvres
  • prévention bucco-dentaire et population démunie – ressenti et propositions des groupes de travail [7]
  • la pharmacie de quartier, lieu d’éducation et d’accès à la santé pour les personnes en précarité ? – cette dernière étude étant en voie d’achèvement.
    Le souci d’obtenir une participation réelle de toutes les personnes et de permettre le croisement de leurs expériences a été le principal objectif de cette recherche/action. Fondée sur des échanges, la méthodologie suivie favorisait un réel respect de la personne grâce aux espaces de paroles créés. Par sa rigueur et son recul, une analyse sociologique des débats a permis d’optimiser la prise en compte de la parole de chacun dans son intégralité.
    La première phase de la recherche portait sur la question : « quels sont les cheminements nécessaires » entre, d’une part, le moment où le besoin d’actes et de gestes de santé est exprimé ou ressenti mais non formalisé et, d’autre part, le moment de la réalisation ou de la non-réalisation de l’acte ou du geste de santé. Le thème du « regard qu’on porte sur l’autre » a été intégré dans cette réflexion car il sous-tendait ces cheminements.
    Dans une deuxième phase, les groupes se sont réunis à nouveau afin de proposer des pistes d’amélioration pour la prévention et l’accès aux soins.

Les constats

Constats établis par les plus démunis

Des malades « différents » ?

Le préalable à tout acte de soin pour une personne en situation de pauvreté est d’accepter, lorsqu’elle arrive dans une structure, de ne pas « être considérée forcément comme les autres malades ». Les modes de prise en charge sont différents, elle ne peut pas avancer d’argent ni, souvent, s’engager sur du long terme, car elle vit au jour le jour de rupture en rupture. À l’hôpital « bien que ce ne soit pas toujours simple, on est sûr d’être pris et soigné ». « On a quand même l’impression qu’on soigne nos papiers d’abord et nous après. » « On nous dit d’emblée : “Vous avez vos papiers, vous avez la sécu, une mutuelle, la CMU [8] ?” » « On nous fait un dossier, on vit avec une tête en forme de dossier. » [9] À l’arrivée dans les structures de santé, les professionnels reprochent à certaines personnes en situation de précarité leur agressivité. Mais celles-ci expliquent que « souvent l’agressivité est un signe de défense, à cause de la honte, et c’est la défense devant un système qui nous écrase, un système loin de notre mode de vie. » « Attendre une heure en salle d’attente, quand on lit, ça va ; mais quand on ne sait pas lire… » « On accepte l’attente si on peut s’occuper, sinon, c’est infernal quand on ne sait pas ce qui va nous arriver. »

Le suivi des soins : un parcours du combattant

Fréquemment, le soin ne peut pas se mettre en place de façon durable et, après l’acte d’urgence, le patient est perdu. Mais c’est, expliquent les personnes en situation de fragilité, parce qu’elles ont « souvent besoin de quelqu’un d’autre » « pour pousser au soin », « pour faire baisser le niveau d’énergie nécessaire pour aller se soigner », « pour faire des démarches qui facilitent l’accès au soin », « pour traduire et expliquer », « pour aider parce que si on ne parle pas la langue, c’est difficile ». « Les autres [les professionnels] n’imaginent pas quelle énergie il nous faut pour arriver jusqu’au soin. » « Les démarches personnelles sont nombreuses et s’additionnent aux soucis et aux inquiétudes du lendemain. » « Rien n’est simple quand on n’a pas les sécurités de base pour survivre. »

Les soins peuvent aussi s’interrompre : « Quelquefois, on entame une procédure de soins suite aux recommandations de l’école ou de nos proches, mais c’est une énergie pour rien : le système n’est pas de notre côté et, dépendre du bon vouloir des responsables, ça nous met dans l’inquiétude, rien n’est jamais acquis. Tu perds tes droits, tu as un petit boulot, plus de CMU et tu ne peux plus payer une mutuelle et tu as commencé la désensibilisation du gosse, l’orthophonie de la petite, les soins des dents du père et ça te met dans les dettes. » « Quand ce qu’on a, on l’a parce qu’on travaille, et qu’on gagne des sous, on peut payer, ça dépend de nous, on sait où l’on va, mais quand on dépend de ce que les autres nous donnent, des seuils choisis par des gens dans les bureaux, on tend le dos, on risque toujours de perdre ce qu’on a… Alors on n’entreprend pas… On hésite. » « Et l’on nous dit : “On veut vous soigner et vous n’êtes pas demandeurs…” »

La prévention peut aussi aller dans le sens opposé à celui qui est attendu. Le dépistage détecte des problèmes de santé, permet de connaître l’état de santé de ces populations exclues… mais ensuite ? Avons-nous les moyens de traiter les pathologies ainsi mises à jour ? Ne devrait-on pas, éthiquement, offrir aux patients la possibilité d’accéder au soin des pathologies dépistées ? Combien de diagnostics posés et de traitements qui ne pourront être réalisés, faute de moyens ? L’inquiétude suscitée par ces examens de dépistage est alors insupportable : « Il vaudrait mieux qu’on ne sache pas ; on nous dit : “Vous avez une tache, ça peut être le cancer… Mais vous ne pouvez pas payer les examens complémentaires, alors rhabillez-vous.” » « C’est comme pour les caries, ils viennent nous regarder comme les chevaux ou les esclaves, sous le nez, et ils nous disent : “T’as des caries, ta mère doit te faire soigner.” » « Bon, on voit que c’est pas eux qui paient. »

Il faut aussi parler de la frustration engendrée par les démarches de soin mises en œuvre et qui n’ont pas réussi, ou qui ont généré des problèmes quelquefois insurmontables pour les personnes concernées : enfants placés durant l’hospitalisation et non récupérés, précarisation des ressources, perte d’emploi, inscription à la COTOREP [10] et perte de la possibilité de garder son emploi, etc. Cette angoisse est très présente et conduit les patients pauvres dans des logiques de refus de soins que nous ne comprenons pas toujours. « Lorsqu’on veut se faire soigner, disent les plus démunis, il faut être prêt à payer des dépassements d’honoraires qui vont vous mettre dans une situation financière difficile et pendant un moment. » « Et parfois, même si on prévoit, il faut faire face à des dépenses parce qu’on ne sait pas à l’avance ce que certains soins impliquent : remboursement des médicaments, prix des lunettes, coût des soins dentaires et des prothèses, examens de radiologie, examens cardiaques, examens chez les ophtalmologistes, examens complémentaires… »

« Pour se soigner lorsqu’on est pauvre, il faut essayer plusieurs endroits où l’on entend dire : “Je n’ai pas de place” ; “Je ne prends pas les CMU” ; “Voilà le prix du soin, avez-vous de quoi payer ?” » Sinon, c’est l’hôpital et « là on ne nous demande pas de payer, mais plusieurs semaines plus tard on reçoit la facture » ; et si on ne peut pas payer, les poursuites se mettent en place et, à la fin, c’est « la saisie de tes meubles, de ton compte, par l’hôpital », « c’est la valse du Trésor Public », « là c’est le rouleau compresseur, tu ne peux rien faire ».

Autant dire que, des renoncements aux soins, nous en voyons de plus en plus.

Les difficultés de la fin de vie

S’agissant de la mort et des conditions de fin de vie, une réalité concrète suscite des réflexions : « La CMU n’est pas une mutuelle comprenant une couverture-décès comme une mutuelle classique. » Auparavant, les communes pratiquaient l’« enterrement d’indigent ». Lors de la mise en place de la CMU, les travailleurs sociaux ont pensé que celle-ci couvrirait les frais d’enterrement et l’on a assisté à des situations dramatiques. Plusieurs personnes ont témoigné des difficultés rencontrées pour enterrer les isolés de leurs quartiers. Des associations ont vu le jour, des paroisses ont été sensibilisées. Des municipalités se mobilisent. Le coût de ces ensevelissements n’est pas négligeable, alors les plus pauvres s’organisent comme ils peuvent. « Tu as eu une vie de chien, tu as quand même envie d’être enterré décemment et la CMU, elle ne paie pas. » « Il faut qu’on prenne une assurance-décès, c’est important ; c’est pour que nos enfants ne paient pas quand on meurt, ils s’endetteraient. »

Les réticences face aux suivis psychologiques

Les suivis psychologiques, les traitements psychiatriques dispensés dans des structures sociales ne sont pas perçus comme « banals », et pourtant beaucoup de familles y sont encouragées pour un de leurs proches. Elles ont du mal à répondre à cette demande et sont souvent méjugées : « On nous note : refus de soins ». Cependant, cette démarche est difficile à entreprendre et ressentie comme stigmatisante : « Si tu fais traiter un enfant pour un rhume, tu es bon parent ; si tu fais traiter un enfant pour un handicap social ou sociologique, tu es un mauvais parent. » « Tu peux faire du co-voiturage pour aller au supermarché, mais pour aller chez un psychologue, tu peux difficilement le demander. » La durée de la prise en charge amène aussi à des refus de soins : « Les problèmes de langage, de comportement perturbé, ne sont pas des problèmes aigus, ce n’est pas une maladie. Mais il faut des traitements longs ; tu te projettes sur l’avenir, le tien ou celui de l’enfant… Pour pouvoir se projeter, il faut avoir un minimum de sécurité de vie. »

Le pharmacien, référent santé

Le rôle des pharmaciens devient de plus en plus important dans l’éducation pour la santé et dans l’accès à la santé. La pharmacie devient un interlocuteur privilégié dans les zones défavorisées : le lieu est ouvert, le conseil gratuit. Le pharmacien est souvent cité comme un référent santé, celui à qui on parle en premier de ses problèmes. Son rôle est déterminant pour que les soins ne s’arrêtent pas ou puissent commencer, « c’est le professionnel de proximité qui est encore “obligatoirement” présent sur les quartiers pauvres et qui donne les premiers conseils ».

La mise en place des médicaments génériques, pour les personnes qui ont un mauvais rapport à la lecture ou qui n’osent pas demander, a donné lieu à des erreurs de prise de comprimés qui ont eu des conséquences fâcheuses. « Pour les personnes qui avaient l’habitude de médicaments avec une forme et une couleur depuis de nombreuses années, intégrer le fait que les génériques aient des couleurs, des formes indistinctes et qu’ils changent de nom très souvent est déstabilisant. » De plus, les plus pauvres ont eu du mal à admettre que, lorsqu’ils ont enfin réussi à être en confiance avec « le docteur qui leur prescrit un traitement, un jeune pharmacien se permet de changer ce que le docteur a dit ».

Constats faits par des professionnels

Pour les professionnels de la santé, la mise en œuvre du soin pour les plus démunis est plus complexe à cause des démarches nécessaires. Elle est plus risquée, aussi, au niveau de l’équilibre financier et social des structures. Elle engage également davantage en termes de temps et se révèle être plus difficile du fait des pathologies rencontrées. Lorsqu’ils accueillent des personnes en situation de précarité pour faire des gestes de soins, les acteurs de santé décrivent des cheminements, des attitudes, des actes, des engagements de type humanitaires qu’ils doivent accomplir en plus, pour que le soin puisse se mettre en place et durer. Le président d’un syndicat de pharmaciens présent dans le groupe de travail nous disait : « Dans la mesure où on a décrété quelque part que les gens étaient égaux et qu’ils avaient effectivement les mêmes droits, alors il faut leur donner les moyens de faire valoir leurs droits… Et c’est souvent nous, les professionnels, qui devons le faire en plus de l’acte de soin. Nous y sommes mal formés et ce n’est pas notre vocation première. »

Soigner des personnes démunies est difficile car « les personnes en situation de précarité ne sont pas des usagers comme les autres ». Pour elles, il faut effectuer des démarches particulières, il faut expliquer ou accomplir ces démarches à leur place pour l’obtention des droits, l’accès au soin. Il faut se renseigner et connaître des procédures-types facilitant l’accès aux soins de ces populations, avec le risque de ne pas être payé. « Pour soigner des personnes démunies qui relèvent de la CMU, on nous impose de débourser plus d’argent pour faire le soin que ce qui nous est payé », disent les opticiens, les pharmaciens et les dentistes présents ; « Soigner ces personnes coûte de l’argent au professionnel. » À l’hôpital, leur prise en charge coûte cher ; elles sont traitées aux urgences et renvoyées dès que possible pour éviter d’encombrer les services.

Dans les endroits où elle existe, la Permanence d’accès aux soins (PASS) peut, dans certains cas, favoriser l’accès aux soins ; mais elle doit également trouver des solutions pour que le suivi de santé soit effectif. Lorsque la relation de confiance est établie, les populations démunies demandent à leur soignant un accompagnement qui relève de l’éducation à la santé, et c’est précieux pour tous. Mais le professionnel remplit alors un deuxième rôle, celui d’interlocuteur privilégié pour répondre à l’inquiétude des parents, aux problèmes de contraception, de violence, de drogue etc. Et il n’a pas toujours le temps, la disponibilité et la formation nécessaires pour satisfaire cette attente exigeante.

Très souvent, le manque d’harmonisation des politiques et des diagnostics entre la médecine du travail, les vérifications des accidents du travail, les aides au reclassement, l’instruction des dossiers COTOREP, a des conséquences pénalisantes pour les personnes en situation de précarité, leur accès au travail n’est pas protégé. Il s’ensuit des comportements de non-dit : « Faut rien dire ! Quand on dit quelque chose à la médecine du travail, de toute façon, on est viré… On est viré du boulot… On est viré de l’entreprise. » « On ne pourrait pas protéger un peu le travail pour les personnes en situation précaire ? »

Constats énoncés par le groupe de réflexion tout entier

Les problèmes d’accès aux soins des personnes défavorisées comportent certes un aspect financier, mais aussi un aspect culturel et relationnel. La relation soigné/soignant/institution se trouve au cœur de cette problématique. Le travail en commun des institutions, des travailleurs sociaux, des associations et des professionnels de santé avec des personnes pauvres est rare. Cependant, il est indispensable de trouver des « espaces de construction » de la réflexion et des espaces de « confrontation », pour évaluer les dispositifs qui s’élaborent autour de cette « patientèle ».

Le manque de confiance dans les dispositifs institués doit être intégré comme un élément essentiel du recul des populations démunies face aux soins et aux dépistages proposés ; il est lié à la complexité des systèmes développés à l’usage des plus pauvres, toujours différents, variant avec les décideurs, mis en place pour eux, sans eux. Une femme du Quart-Monde nous faisait part de cette réflexion : « Si on prend des mesures pour nous, sans nous, alors fatalement elles seront un jour contre nous. »

La problématique de l’accès aux soins devient celle « des possibilités offertes de recours aux soins » pour les plus démunis. Les difficultés rencontrées dans le recours aux soins de ville et de proximité par les plus fragiles, constitue un vrai problème de santé publique.

Des pistes d’amélioration

Travailler à combler le fossé culturel

Les aspects culturels intervenant dans la relation « soignant-soigné » sont extrêmement importants. Il y a convergence parfois, mais plus souvent opposition, entre le monde des « patients » et celui des « professionnels », et cela contribue à freiner l’accès aux soins. Les professionnels nous ont confié que, face aux personnes en situation de précarité, ils sont davantage conscients des écarts qui peuvent exister entre soignant et soigné. Les attentes des uns par rapport aux autres montrent bien que, souvent, ces deux groupes sociaux vivent avec des images, des représentations des uns sur les autres. En modifiant le jugement et le regard, en comprenant mieux ce que signifie l’urgence pour chaque partie, en développant des conditions d’accueil favorables, enfin en travaillant les projets de prévention avec les populations concernées, on pourrait combler le fossé qui existe entre les structures de soins et les plus démunis. Cette distance entre les soignants et les soignés a été largement étudiée ; les passerelles tendues vers les plus exclus pourraient servir de voie d’accès à tous. L’expérience montre que des réformes qui prennent en compte d’abord les plus fragiles au sein d’une société sont des réformes qui bénéficient à toute la population.

Favoriser une relation juste

Des actions d’éducation à la santé pourraient être construites avec les personnes en situation défavorisée, des actions sur le terrain pour leur donner des éléments de base concernant les comportements à avoir en situation d’accès aux soins.

Permettre aux deux mondes de se découvrir dans les meilleures conditions et d’avoir une relation juste passe par des étapes de « co-formation » [11].

Mais la santé concerne la personne dans tous ses aspects et déborde souvent le cadre strict du soin « technique ». Si certaines améliorations sont nécessaires sur le plan interpersonnel, des « interfaces » extérieures à la relation de soin proprement dite peuvent aussi y contribuer. Ainsi, l’accompagnement de la personne soignée par un membre de son entourage, de sa communauté culturelle, de son encadrement social ou associatif, est sûrement un élément « facilitateur » ; cependant, la définition et le respect de conditions éthiques dans sa mise en œuvre semblent indispensables pour que cet accompagnement reste bien une interface entre le soignant et le soigné, et que l’accompagnant ne prenne pas toute la place.

De la part des personnes soignées, cette relation demande de surmonter le sentiment de honte, de culpabilité ou d’agressivité, de retrouver la confiance et de considérer le soignant comme un individu partenaire. Plus qu’une relation égalitaire, qui ne serait pas juste, c’est une relation de participation qui doit s’instaurer, où chacun des protagonistes respecte la place de l’autre. Il faut d’abord répondre à la demande, mais quelque chose ensuite doit « accrocher » très vite entre le soignant et le soigné pour que, petit à petit, la relation se fasse – et cela peut mettre des années. « L’agressivité tombe parce qu’on sait à quoi on s’attend et qu’on a été accueilli par quelqu’un. » « Quand on parle de notre docteur, si la relation est bien établie, on ne parle pas de culpabilité ou d’incompréhension, parce que le docteur, c’est un individu. » « C’est à nous. »

Mais quand les plus pauvres parlent de l’hôpital, de l’administration, de l’urgence, des docteurs de SOS médecins, c’est la peur qu’ils expriment par rapport à une machine, une structure qui risque de les écraser, de les identifier comme pauvres et de les faire entrer dans un dispositif qu’ils ne contrôleront plus.

Cette relation demande beaucoup aux soignants : les professionnels de santé pensent qu’ils savent, qu’ils sentent qu’avec telle personne, on doit agir d’une certaine façon, avec telle autre d’une autre manière, « parce que je la connais depuis longtemps » ou « parce que je ne la connais pas », « parce que je la sens comme ça ». Ce n’est peut-être pas de l’intuition mais plutôt du pragmatisme ; c’est ce qu’on a appris dans sa vie professionnelle. Tous les professionnels de santé travaillent sur et dans la relation. Ils s’impliquent pour trouver la juste collaboration avec le plus pauvre. « C’est aux professionnels de faire le premier pas, de faire de l’auto-réflexion »

Des sujets d’inquiétude

La loi de 1998 affirmant l’accès à la santé pour tous n’a pas contrecarré la réforme Juppé de 1996, qui se traduit par une diminution de l’offre de médecine de ville. Dans des quartiers défavorisés ou dans des secteurs de campagne profonde, les soignants en secteur libéral sont de moins en moins nombreux. Pour les plus pauvres, c’est l’hôpital qui devient le recours en matière de soins de spécialité, et bientôt pour les soins de médecine ; les délais sont parfois très longs, avec des renvois éventuels vers la médecine libérale via des réseaux de soins coûteux et peu fonctionnels – en particulier lorsque la médecine de ville n’est pas prête à s’investir auprès de ces patients. Les réglementations utilisées pour cadrer les « parcours de soins » des usagers, de manière comptable et normalisée, risquent d’exclure inévitablement les publics fragilisés des lieux de soins de proximité. « Une famille défavorisée, une personne âgée, une personne fragilisée par la vie ont une demande de consultation et un parcours de soins moins typés que les autres et plus chaotiques que ceux du reste de la population. »

La réforme du médecin traitant interroge également : « Qui acceptera d’être le médecin traitant des personnes qui sont dans la rue ? » « Et qui s’engagera à leur faire suivre un parcours de soin ? » « Quel professionnel prendra ce risque ? » C’est bien l’« hôpital traitant » qui devra s’y engager. Comment s’établira alors la relation duale soignant/soigné plébiscitée par cette étude ? Quelle sera la capacité de l’hôpital à se resituer dans une perspective de service public ouvert à tous, et pas seulement à la haute technicité vers laquelle on le fait tendre depuis 1958 ? Les PASS existent, oui ; mais… l’hôpital a-t-il des services suffisamment généralistes pour remplir cette mission ? On risque d’aboutir à des mesures spécifiques rapidement « stigmatisantes », et n’ouvrant pas sur le droit commun comme le prônait la loi de 1998.

Conclusion

Si les professionnels veulent répondre aux personnes très pauvres qui nécessitent des soins, ils doivent se « brancher » sur leurs réalités de chaque jour et entendre leur point de vue. Depuis les bureaux, les services, les cabinets, nous n’avons pas la même perception des obstacles à franchir pour accéder au système de soins que ceux qui sont dans la rue, les quartiers, les cités. Se tenir à l’écoute des personnes soignées vivant dans des conditions de précarité extrême est donc essentiel pour révéler les obstacles non perçus par les administrations, les structures et les professionnels. Les dispositifs sont multiples ; la difficulté de leur mise en adéquation sur le terrain nous force à constater qu’il n’est pas possible de « faire la santé » des personnes malgré elles ou sans elles. Pour qu’elles adhèrent aux propositions qui leur sont faites, il est nécessaire qu’elles y reconnaissent des offres qui répondent à leurs aspirations et à leurs propositions. Alors seulement elles pourront « aller vers la santé », sortir de l’urgence et entrer dans les démarches de prévention proposées.

Notes

  • [1]
    Fayard D. « Professions et pauvreté : le défi de la formation », Revue Quart-Monde, 2002, 2, 182 : 4-5.
  • [2]
    Debionne F.P. La santé passe par la dignité, l’engagement d’un médecin, Éditions de l’Atelier et Éditions Quart Monde, 2000.
  • [3]
    « Le Quart-Monde à la Sorbonne : croiser les savoirs », Revue Quart-Monde, 170.
  • [4]
    Groupe de recherche Quart- Monde Université, Le croisement des savoirs : quand le Quart- Monde et l’Université pensent ensemble, Éditions de l’Atelier, Éditions Quart-Monde, 1999.
  • [5]
    Ferrand F. et C. « Vers un lieu permanent de co-formation », Revue Quart-Monde, 2002, 2, 182 : 16.
  • [6]
    DRASS Lorraine, ATD Quart- Monde, « Relation Soignant/Soigné : relations étudiées dans le cadre de l’accès aux soins des populations en situation de précarité », 2003.
  • [7]
    DRASS Lorraine, ATD Quart- Monde, « La prévention bucco-dentaire en milieu défavorisé : ressenti et propositions par des personnes en précarité et des professionnels de terrain dans le cadre d’un partenariat institution, professionnels et usagers précaires », 2005.
  • [8]
    CMU : Couverture maladie universelle.
  • [9]
    Nous avons conservé l’intégralité des guillemets autour des multiples citations afin de mieux rendre compte de la diversité des participants au groupe de réflexion (NDLR).
  • [10]
    COTOREP : Commission technique d’orientation et de reclassement.
  • [11]
    Ferrand F. et C. Op. cit.

Mis en ligne sur Cairn.info le 01/01/2012 - https://doi.org/10.3917/lae.062.0018

Source : https://www.cairn.info/revue-laennec-2006-2-page-18.htm

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  • Canada – Québec - Santé environnementale et population défavorisée en milieu urbain : l’apport de la recherche sur les représentations sociales - Étienne van Steenberghe, Lucie Sauvé, Alain Deccache – Document ‘inspq.qc.ca’
    Contexte :
    Cette communication présente certains résultats d’une recherche exploratoire sur les représentations sociales relatives au lien entre la santé et l’environnement de populations défavorisées en milieu urbain. Cette recherche tend à contribuer au développement de stratégies appropriées en éducation relative à la santé et à l’environnement. Les questions de santé et d’environnement se rejoignent en effet et font appel à des interventions particulières, surtout dans un contexte de pauvreté urbaine.

Pour plusieurs auteurs, les problèmes de santé des populations concernées peuvent être perçus comme le reflet d’un environnement « malsain », d’un « décor pathologique ». Un logement inadéquat, des habitudes de vie comme le tabagisme, ou encore l’isolement social sont parmi les facteurs qui affectent la santé.

Or si la mise en place d’actions éducatives vise à susciter des changements de comportements et de conduites bénéfiques pour la santé des personnes de milieu défavorisé, celles-ci manifestent généralement peu d’intérêt pour ces initiatives. Il apparaît donc important de considérer les représentations de ces groupes sociaux comme point de départ des interventions puisque l’univers phénoménologique est étroitement relié aux comportements et à l’agir quotidien.

La santé ne peut être en effet appréhendée comme une simple mesure objective, elle est étroitement liée au contexte culturel, social et au milieu de vie des personnes. Si plusieurs travaux ont permis de mettre en évidence l’existence de « savoirs profanes » relatifs à la santé profilée à la maladie, notre recension d’écrits montre le peu de recherches sur les représentations de la santé profilée à l’environnement.

En vue de palier à ce manque de savoir, notre recherche exploratoire a pour objectif de caractériser les représentations sociales de la santé, de l’environnement et des liens entre les deux, de populations défavorisées en milieu urbain tant au Québec qu’en Belgique et ultimement, d’identifier des pistes stratégiques pour la prise en compte de ces représentations sociale dans l’élaboration et la mise en oeuvre de stratégies de promotion et,ou d’éducation relative à la santé environnementale.

Méthode :
Cette recherche doctorale s’inscrit dans un courant qualifié de « recherche qualitative-interprétative ». Un tel type de recherche se moule sur la réalité de nos répondants et prend en compte les interactions que les individus établissent entre eux et avec leur environnement. L’environnement est abordé dans sa dimension de proximité : quartier, rue, logement. L’objectif du chercheur consiste à interpréter une réalité socialement construite et multiple. La collecte des données se fait dans deux quartiers urbains défavorisés : l’un à Montréal (Québec) et l’autre à Bruxelles (Belgique). Trois stratégies de collecte de données ont été retenues : l’entrevue individuelle semi-structurée, le groupe de discussion et l’observation.

Résultats :
En donnant la parole aux personnes défavorisées sur leur santé et leur environnement, nous suscitons une prise de conscience auprès de celle-ci. Par ailleurs, nous reconnaissons l’importance de leur « savoir » et la prise en compte de ceux-ci dans nos interventions.

Conclusion :
L’analyse du contenu des verbatim permet le repérage et la description des représentations. La présentation de nos premiers résultats rend compte de plusieurs éléments représentationnels partagés sur la santé (origine de la santé, la définition et les conduites), sur la maladie et sur l’environnement (définition et conduites en matière d’environnement). Ces résultats mettent en évidence que la relation entre la santé et l’environnement est complexe.

Bulletin des JASP - Contactez-nous - © Gouvernement du Québec, 2022(le lien est externe) - Source : https://www.inspq.qc.ca/jasp/sante-environnementale-et-population-defavorisee-en-milieu-urbain-l-apport-de-la-recherche-sur-les-representations-sociales

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  • Rétrospective - Les centres de santé : une histoire, un avenir – Par Marie-Pierre Colin, Dominique Acker - Dans Santé Publique 2009/hs1 (Vol. 21), pages 57 à 65
    Les maisons de santé sont aujourd’hui promues comme un concept répondant à des besoins nouveaux en matière de soins primaires. Elles doivent apporter une solution au problème de la démographie médicale et se doter des moyens d’une spécialité de premier recours avec ses missions de santé publique, de prise en charge des maladies chroniques, de prévention, de dépistage...

Qu’en est-il des centres de santé dont l’existence remonte au début du siècle dernier ? Comment se situent-ils au sein de ce nouveau paysage sanitaire ? Quelle est leur histoire ? Quels sont leurs objectifs ? Comment fonctionnent-ils ? Leur expérience peut-elle servir à une nouvelle organisation des soins primaires ? Quels sont les différences et les points communs entre les centres de santé et les maisons de santé ?

Des consultations charitables aux centres de santé

Il est habituel de faire remonter l’histoire des centres de santé aux consultations charitables pour « pauvres malades », instituées au XVIIe siècle par Théophraste Renaudot, médecin que Richelieu nomma commissaire général des pauvres du Royaume. Les consultants ne paient pas s’ils n’en ont pas les moyens et les médecins doivent être « renommés ». Des patients de toutes conditions sociales les fréquentent.

Jusqu’à la dernière guerre mondiale, des dispensaires se développeront, la plupart du temps, par legs philanthropiques de grandes familles bourgeoises. Leur gestion sera confiée à des associations caritatives ou à des congrégations religieuses. D’autres types de dispensaires verront le jour vers le milieu du XIXe siècle dans un concept différent « d’entraide solidaire ». Ils seront créés par les organisations ouvrières pour les familles de leurs membres. Le principe de solidarité remplace celui de charité.

De nombreux centres de santé vont alors être créés, dans les zones urbaines, à l’initiative d’associations caritatives ou non, de municipalités, de mutuelles, exprimant à la fois un courant « humaniste » et « hygiéniste ». Le Front Populaire, puis la Libération, avec l’avènement de la Sécurité Sociale, seront propices à ces initiatives. Les gestionnaires des centres de santé, particulièrement les municipalités, développeront progressivement le rôle de ces structures de soins de proximité en support d’une politique locale de santé publique, associant éducation pour la santé et vaccination, dépistage des cancers, des caries, des virus (VIH, VHC…), stratégies d’interventions coordonnées pour les pathologies chroniques…

Certains services de santé publique collective s’agrégeront avec les services de soins des centres de santé, pour parfois s’en dissocier plus tard : mise en place de PMI, de services de vaccinations, de dispensaires de soins des maladies vénériennes, services de soins spécialisés en alcoologie, puis en toxicomanie. Les centres de santé ont été, dès le départ, des relais importants pour le travail en réseau.

Une grande diversité mais des objectifs communs

En 1995, il existait environ 1 500 centres de santé, toutes disciplines confondues (données CNAMTS) [3] :

  • 29 centres de santé médicaux, de petite taille, regroupant des médecins généralistes ;
  • 357 centres de santé polyvalents, offrant des consultations de médecine générale et de spécialité, des services paramédicaux (kinésithérapie, service infirmier…), des services dentaires, des plateaux techniques (imagerie médicale, laboratoire) ;
  • 377 centres de santé dentaires ;
  • 691 centres de soins infirmiers.
    Les centres de santé élaborent un projet de santé qui inclut des dispositions favorisant l’accès et la coordination des soins et le développement d’actions de santé publique. Ils s’attachent à répondre à un objectif commun : une médecine de qualité pour tous, prenant en compte le patient dans sa globalité et son milieu de vie.

Les gestionnaires sont le plus souvent des associations (450), des mutuelles (354), les organismes d’assurance maladie (318), des congrégations (centres de soins infirmiers surtout). Les municipalités gèrent 12 % des centres de santé principalement en région parisienne (données CNAMTS).

Les centres de santé relèvent d’un cadre juridique triple :

  • le Code de la Santé publique, pour ce qui a trait à leurs missions, à leur place dans le système de soins ambulatoires et à leur agrément ;
  • le Code de la Sécurité sociale, pour le conventionnement avec l’Assurance Maladie (accord national 2003) ;
  • le Code général des collectivités territoriales, pour le régime d’aides dont ils peuvent bénéficier de la part des collectivités territoriales (articles L 1511-8 et R 1511-44).
    Les personnels des centres médicaux, dentaires et polyvalents sont salariés mais relèvent de statuts variés.

Un cadre conventionnel récent et porteur

L’accord national [5], promulgué le 19 avril 2003, définit les missions des centres de santé : « Structures de proximité se situant au plus près des assurés et de leurs besoins, ils participent à l’accès de tous à la prévention et à des soins de qualité. Ils pratiquent le tiers payant et s’engagent à respecter les tarifs conventionnels. En lien avec la démarche curative, les centres de santé participent activement à des actions de prévention et de promotion de la santé, favorisant une prise en charge globale de la santé des personnes ». Les centres de santé sont définis comme « les dispositifs novateurs de coordination des soins, tant dans leurs modalités organisationnelles que financières. Pour ce faire, les parties s’engagent à encourager toute démarche de coopération développant des complémentarités avec les autres offreurs de soins en articulation avec les services des secteurs social et médico-social. Ainsi, les centres de santé contribuent pleinement aux nécessaires évolutions du système de santé actuel à travers une redéfinition de son organisation, de ses modes de financement et de la distribution des soins ».

Un système optionnel (par catégorie de centres : médicaux, dentaires, infirmiers) permet la reconnaissance de la spécificité organisationnelle des centres de santé. Il finance une partie de la coordination des soins médicaux dans les centres de santé « optants » par l’attribution d’une rémunération forfaitaire annuelle : en dehors des centres de soins infirmiers, ce système bénéficie à moins de 10 % des centres.

Ce cadre conventionnel place donc les centres de santé en situation de précurseurs d’une nouvelle organisation des soins primaires tout en leur attribuant des missions spécifiques.

Une approche populationnelle et un objectif principal : réduire les inégalités de santé

La plupart des centres de santé s’inscrivent dans un projet collectif qui s’adresse à une population. Des usagers participent aux instances décisionnelles de certains centres de santé associatifs (à Belfort, la présidence de l’association gestionnaire est assurée par un usager). Les liens avec les services extérieurs, médicaux (PMI, réseaux toxicomanie, HIV…) et les services sociaux sont développés et entretenus.

Une des priorités est de favoriser l’accessibilité financière aux soins de santé primaire (et souvent aux spécialistes). Les centres sont fréquemment installés dans des zones identifiées comme fragiles, et pratiquent systématiquement le tiers payant pour le régime d’assurance maladie obligatoire. Le conventionnement avec les organismes complémentaires, variable en fonction des centres considérés, permet souvent la dispense totale d’avance des frais. Le bénéfice du tiers payant, le respect des tarifs conventionnels et la maîtrise des dépassements en dentaire, constituent, pour beaucoup d’usagers, le seul moyen de ne pas renoncer aux soins.

La proportion de patients inscrits à la CMUC est supérieure à la moyenne libérale : « Au niveau national, la CNAMTS fait état de 12 % de patients en CMUC dans les centres de santé, contre 9 % dans la patientèle libérale, soit un écart de 3 % entre les deux. Ce chiffre moyen ne rend pas compte des écarts entre centres, les centres mutualistes accueillant dans l’ensemble moins de patients relevant de la CMU que les autres » [1]. À Belfort, selon les données de l’audit 2005, 23 % des patients sont bénéficiaires de la CMU.

Dans les centres de santé, la qualité de l’accueil favorise l’accessibilité fonctionnelle, culturelle et psychosociale des populations les plus précaires. L’accompagnement social facilite l’accessibilité économique, administrative et sociale. Afin d’adapter la prise en charge des personnes qui s’adressent aux centres de santé, les professionnels travaillent à la mise en œuvre d’un indicateur de vulnérabilité sociale. Le score EPICES a été développé à partir de l’activité des Centres d’examens de santé de l’Assurance Maladie (notamment le centre de Bobigny) [6]. Il fait aujourd’hui l’objet d’une importante étude EPIDAURE menée dans 21 centres de santé grâce à une collaboration entre le Comité National de Liaison des Centres de Santé, le centre d’examens de santé du 93 et l’Institut de Recherche et Documentation en Économie de la Santé.

La qualité des soins, la santé publique et la prévention

Les centres de santé s’attachent « dans ce cadre de médecine sociale modernisée, à offrir à tous les patients les prestations techniques et scientifiques de la plus grande qualité » [4]. Ils font de la qualité des soins un de leurs axes forts car ils savent que, s’il s’agit avant tout d’une exigence éthique à l’égard des patients, c’est également une condition de leur attractivité pour les patients et les professionnels. La mixité sociale du public qui s’adresse aux centres de santé est essentielle à leur fonction d’intégration sociale.

L’évaluation des pratiques professionnelles est un des objectifs dont la mise en œuvre s’est concrétisée par la rédaction d’un référentiel d’évaluation, portant essentiellement sur les pratiques organisationnelles, établies avec la Haute Autorité de Santé [2]. Il intègre également certains aspects de l’Évaluation des pratiques professionnelles (EPP) dans leurs aspects collectifs (travail en équipe, partage du dossier du patient) ou organisationnels (continuité des soins, information, confidentialité…).

L’exercice coordonné et protocolé [3] est effectif. Il permet la coordination des soins et repose sur des points essentiels : le dossier partagé, les réunions de coordination, la rédaction des protocoles de soins…

Dans le souci d’une prise en charge globale de la santé des personnes qui s’adressent à eux ou qui vivent sur leur territoire géographique, les centres de santé développent des actions spécifiques de santé communautaire, s’intégrant la plupart du temps dans le cadre de la politique de la ville.

Une réponse à la démographie médicale et à l’innovation

Le mode d’exercice est attractif : « Les centres de santé […] s’inscrivent dans un exercice collectif et pluridisciplinaire qui permet essentiellement le partage des charges de fonctionnement, le partage des contraintes liées à la permanence des soins, un travail collectif… ». Le statut de salarié implique la décharge quasi totale des démarches et charges administratives notamment en matière de gestion de la structure. Il permet « de recentrer au maximum les professionnels sur les soins » [1].

Les centres de santé, de par le statut salarié de leurs personnels, leur pluridisciplinarité et leur pratique du travail collectif, se prêtent particulièrement bien à des avancées dans le domaine de la délégation de tâches. Certains grands centres la pratiquent dans des domaines comme l’ophtalmologie. Les possibilités offertes par la télémédecine s’inscrivent bien dans le cadre des centres qui, du fait de leur volume d’activité, peuvent, plus qu’un cabinet de groupe, assurer les investissements en matériel et réseau de communication nécessaires.

Les difficultés liées au cadre conventionnel

Il est soumis aux aléas des relations de l’Assurance Maladie avec les médecins libéraux. Avant 1960, en l’absence de convention entre la Sécurité sociale et les médecins libéraux, la Sécurité sociale a facilité le développement des dispensaires, voire en a créé, afin de permettre l’accès aux soins des populations ne pouvant assumer financièrement les actes médicaux dispensés par les médecins libéraux. Après 1960, en échange de l’adhésion des médecins libéraux à des conventions départementales, les caisses s’engagent à ne pas encourager l’extension des dispensaires dans les localités à majorité médicale conventionnée dans la mesure où cette majorité s’y opposerait. Les tarifs des dispensaires sont soumis à des abattements par rapport à ceux des libéraux.

La situation économiquement injuste et l’état de subordination des centres de santé aux avis d’un monde médical libéral hostile, justifient la création en 1960 du Comité national de Défense et de Liaison des Centres de Santé à but non lucratif. Les actions visant à faciliter l’accès aux soins (et notamment la pratique du tiers payant) sont considérées comme relevant de la compétence de l’État, et ne feront pas l’objet de financements. Les options (médicale et dentaire) sont basées sur l’adhésion individuelle des patients et ne sont pas facilement applicables auprès d’un public précaire. Les avancées de la convention entre l’Assurance Maladie et les médecins libéraux ne sont jamais transposées de manière automatique. Les exemples sont nombreux. Ainsi, les centres de santé ne peuvent percevoir le forfait de 40 € par patient lorsqu’ils initient un dossier d’Affection de longue durée (ALD), ils sont exclus du forfait numérisation de 3 ou 4 € par examen radiologique, leur participation à la permanence des soins n’est pas rétribuée, l’indemnisation de leurs charges sociales est moindre que celle de leurs confrères libéraux…

Les fonds destinés aux actions de santé publique initialement prévus ont été supprimés. L’instance nationale de concertation ne verra jamais le jour, ce qui supprime toute possibilité de représentation des personnels salariés dans le cadre de la médecine ambulatoire, mais aussi prive la profession d’un lieu idéal de réflexion sur les projets sanitaires innovants menés par les centres de santé et sur leur partage et/ou transposition possible à d’autres structures (maisons de santé, pôles de santé).

Des charges non couvertes

Les centres de santé ont donc comme ressource quasi unique la rémunération des actes qu’ils effectuent. Les frais relatifs au fonctionnement de la structure ne sont pas pris en compte, ni les frais spécifiques à la prise en charge de la santé de populations précaires qui représentent un surcoût notable. L’accueil et le secrétariat, ainsi que les fonctions support telles la comptabilité, la gestion du personnel, la gestion administrative et financière constituent les principales charges. Le coût du tiers payant est évalué de 3 à 3,3 € par acte (selon une étude des mutuelles de France) [1]. La complexité des situations rend les consultations plus longues. Un certain nombre de difficultés administratives comme les dispositifs relatifs au parcours de soins coordonnés inadaptés au tiers payant, la lourdeur du dispositif de coordination représentent des charges importantes au quotidien.

Ainsi, les centres de santé, sans les aides financières publiques (collectivités territoriales) ou privées (organismes caritatifs, associations…), ne pourraient survivre. Or, renvoyant à l’État la responsabilité de la couverture financière de la solidarité, celles-ci (les collectivités) intègrent pleinement les normes de rentabilité et de productivité peu compatibles avec celles d’une politique sociale d’assistance [1]. Certaines communes remettent actuellement en cause la poursuite de leur engagement politique dans le domaine de la santé par le financement des centres de santé.

Les centres de santé de demain

Dans ce contexte économique difficile, quel avenir pour les centres de santé ? Il apparaît très difficile de le prédire, tant leur situation actuelle est caractérisée par des tendances contradictoires : le contexte est à la fois inquiétant, comme cité précédemment, mais aussi porteur d’espoir du fait de l’intérêt croissant pour les pratiques instaurées par les centres de santé. Plusieurs éléments convergent vers une meilleure reconnaissance des centres de santé et de leurs pratiques.

Le mode d’exercice, regroupé et coordonné, prenant en compte la globalité des problèmes sanitaires des populations, et dont les centres de santé ont été les promoteurs historiques, est actuellement valorisé par les pouvoirs publics. Il est aussi soutenu par les principaux syndicats de médecins généralistes. Leur inscription en clair dans l’offre de soins ambulatoire figure dans le projet de loi Hôpital patients santé et territoires, aux côtés des maisons de santé, avec la possibilité de se voir confier des missions de service public explicitées dans un contrat d’objectifs. Le texte prévoit qu’ils « élaborent un projet de santé incluant des dispositions tendant à favoriser l’accessibilité sociale, la coordination des soins et le développement d’actions de santé publique ». La pratique du tiers payant, le régime salarié des médecins et les actions d’éducation et de prévention sont confirmés. La possibilité de soumettre à l’Agence régionale de santé (ARS) des protocoles concernant la collaboration entre professionnels de santé et de participer à leur formation est une reconnaissance de la qualité et du caractère innovant de leurs pratiques. En ce qui concerne les gestionnaires, la possibilité de création a été étendue aux établissements de santé publics ou privés d’intérêt collectif (à but non lucratif).

En contrepartie, cette reconnaissance s’accompagne d’une suppression de l’instance de concertation qui n’a jamais été mise en place et le texte, en dehors des contrats pluriannuels, n’apporte que peu d’éléments nouveaux sur le mode de financement. C’est pourquoi, parallèlement à cette reconnaissance législative, la perspective de participer à l’expérimentation de nouveaux modes de rémunération de la médecine générale peut être envisagée comme une opportunité pour les centres de santé. Dès la fin 2007, l’article 44 de la loi de financement de la Sécurité sociale 2008 avait précisément ciblé les centres de santé. Dans ce cadre, une vingtaine de centres se sont portés volontaires, avec autant de maisons de santé, pour expérimenter :

  • une rémunération forfaitaire de la structure, qui s’ajouterait au financement à l’acte actuel ;
  • une rémunération, forfaitaire là encore, de nouveaux « services » aux patients comme l’éducation thérapeutique des malades atteints de pathologies chroniques, la coordination d’actions de prévention en milieu scolaire, les liens avec l’hôpital, la réalisation d’actes de petite chirurgie permettant de relayer les urgences hospitalières ;
  • une rémunération adaptée aux nouvelles coopérations entre professionnels de santé.
    D’autres chantiers pourraient être encore explorés comme la mise en œuvre de la télémédecine et plus particulièrement de la télésurveillance ou encore le forfait à la pathologie… Dans tous les cas, il apparaît clairement, à travers cette expérimentation, que les structures comme les centres de santé, y compris dans leur dimension d’emploi de personnels salariés, se prêtent aux pratiques les plus avancées. Leur engagement sur les tarifs opposables est un facteur de maîtrise globale des dépenses de santé à la charge des patients et de la collectivité.

Si on compte sur les seuls centres de santé pour faire évoluer non seulement les pratiques mais aussi les modes de financement des soins et de la prévention (ce qui n’est pas le moindre des chantiers), leurs interventions ne seront pas suffisantes pour résoudre les inégalités qui se creusent et les difficultés grandissantes dans l’accès aux soins. Il faut prendre la mesure des réponses à apporter tout de suite, au cas par cas. Le Fonds d’intervention pour la coordination et la qualité des soins (FICQS), les Contrats d’amélioration des pratiques de groupe (CAPG), ou encore la possibilité pour les ARS de conclure des contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens (CPOM) sont des réponses au financement de certains coûts non rémunérés actuellement par le paiement à l’acte. En revanche, la question du financement du tiers payant, nécessaire pour garantir l’égalité d’accès aux soins, ainsi que celle de la transposition intégrale de la convention libérale restent entières.

Conclusion

La prise en compte des besoins sanitaires conduit à ne pas opposer les différentes formes de l’exercice regroupé et coordonné. Les centres de santé souhaitent être reconnus comme des lieux de soins primaires ayant une grande expérience de l’exercice collectif exerçant des activités de soins mais aussi de santé publique. Ils ne veulent pas être perçus comme une solution par défaut, lorsque les réponses libérales peinent à s’inscrire dans des réalités locales socialement difficiles. Selon les situations locales, les engagements des collectivités et des professionnels de santé, des centres de santé, des maisons de santé et des pôles de santé peuvent être mis en place. Les évolutions sociologiques en cours tendront certainement à rapprocher ces modes d’exercice.

Remerciements - Ce travail a été réalisé avec la collaboration précieuse des Drs A. Lesiour et R. Lopez, membres du Comité national de liaison des centres de santé.

Notes

  • [3]
    Les centres de santé des régimes miniers relevant d’un régime spécifique et non rattachés au régime général n’ont pas été répertoriés en 1995. Ils ont été récemment intégrés dans le droit commun à l’occasion de la réforme du régime minier.

Mis en ligne sur Cairn.info le 01/10/2009 - https://doi.org/10.3917/spub.090.0057

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  • Comment est-on soigné dans les centres de santé ? - 21 avril 2017 – Document ‘france-assos-sante.org’ - Médecin traitant et parcours de soins coordonnés, Actualités
    Savez-vous ce qu’est exactement un centre de santé ? Quelle est la différence par rapport à un cabinet médical ou une maison de santé ? Quels types de soins y sont prodigués ? Quels sont les professionnels de santé qui y travaillent ? Des généralistes, des spécialistes, des infirmières ? Toutes les spécialités y sont-elles représentées ? Pourquoi certains sont municipaux, d’autres privés ? Les soins sont-ils de qualité ? Comment est-ce financé ? Et d’ailleurs est-ce gratuit ?

Les centres de santé sont les héritiers de ce que l’on appelait auparavant les dispensaires, des structures qui avaient vocation de permettre un accès gratuit aux soins à tous, dont (et peut-être surtout) les plus démunis. Ils représentent, du fait de leur fonctionnement sur les plans juridiques, administratifs et financiers, une offre de soins à mi-chemin entre la médecine libérale et l’hôpital. Bien loin du scandale de Dentexia en matière de soins dentaires, qui fait figure d’exception parmi les 1900 centres de santé en activité sur le territoire français, les centres de santé sont bel et bien une composante dynamique, qualitative et engagée sur l’accès aux soins de notre système de santé.

Le fonctionnement des centres de santé est défini dans l’article L6323-1 du code de la santé publique. Voici ce qu’il est important de savoir :

  • Ils sont forcément créés et gérés par des organismes à but non lucratif ;
  • Ils proposent des soins de premiers recours ;
  • Ils pratiquent les tarifs de secteur 1 et le tiers-payant ;
  • Les professionnels de santé y sont salariés, contrairement aux maisons de santé ou aux cabinets médicaux où sont regroupés des professionnels exerçant en libéral ;
  • Ils sont amenés à organiser des actions de prévention et de promotion de la santé.
    Les différents centres de santé

Le statut d’organisme à but non lucratif du gestionnaire peut faire qu’il provienne de différents types d’organisations, comme par exemple :

  • Les collectivités territoriales : les municipalités gèrent notamment les centres de santé municipaux.
  • Les mutuelles : on les appelle souvent les centres de santé mutualistes.
  • Les caisses de sécurité sociale : comme les centres de santé de l’Assurance maladie ou du Régime des Mines.
  • Les associations loi 1901 : qui peuvent alors être des initiatives privées, juridiquement organisées en association, mais qui doivent cependant respecter les principes des centres de santé, comme les tarifs de secteur 1 et le tiers-payant.
    Tous ces centres pratiquent des soins de premiers recours, c’est-à-dire une médecine de proximité, qui comprend la médecine générale, les soins infirmiers, le dentaire, certaines spécialités comme la gynécologie et l’ophtalmologie. Il peut également y avoir de la kinésithérapie, de l’imagerie médicale, bien que ces plateaux techniques soient chers et plus difficilement gérable sur le plan financier.

On compte aujourd’hui environ 1900 centres de santé en France. Certains sont des centres qui pratiquent uniquement la médecine, d’autres uniquement des soins infirmiers ou uniquement du dentaire. Enfin certains centres sont polyvalents.

Les centres de santé constitués d’équipes pluridisciplinaires (environ 700 centres polyvalents) ont l’avantage de contribuer à une prise en charge globale des patients puisqu’il est alors possible de mettre en place une partie du parcours de soins à l’intérieur même du centre.

Le rapport de l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS) sur les centres de santé établi en 2013 indique que 69% des centres de santé sont finalement de taille modeste et emploient moins de 10 salariés en équivalent temps plein.

Interview du Docteur Richard Lopez, Président de la Fédération nationale des centres de santé et praticien en centre de santé à Saint-Denis (93)

Y a-t-il une différence concernant la qualité des soins et la prise en charge des patients d’un centre à l’autre ?

Aujourd’hui, les centres de santé ont à peu de choses près tous le même mode de pratique professionnelle. Il se standardise de plus en plus, d’autant que depuis le début 2017, chaque centre est invité à déclarer des indicateurs de suivi de qualité de ses activités sur une plateforme nationale informatique, appelée « Observatoire e-cds (centre de santé) ». Ces renseignements permettent d’avoir une vision sur les pratiques et l’organisation des centres. C’est à partir des éléments renseignés sur cette plateforme que les centres de santé sont financés. En effet, les centres de santé, tout comme les professionnels libéraux, ont droit à des financements conventionnels de la part de l’Assurance maladie. Il s’agit d’une rémunération pour un certain nombre d’activités, en plus des actes, comme les pratiques organisationnelles qui sont identifiées dans les engagements pris entre les professionnels de santé et la CNAMTS : soit dans le règlement arbitral pour les libéraux en Maison de Santé, soit dans la convention des centres de santé pour nous. On a tous une rémunération versée par l’assurance maladie qui correspond à nos pratiques de structure, nos horaires d’ouverture, au fait que l’on prenne ou pas des patients sans rendez-vous, au fait qu’il y ait une coordination pilotée, qu’il y ait des réunions pluri-professionnelles au cours desquelles on discute des cas complexes, que l’on prenne des internes en médecine, des étudiants infirmiers ou dentaires … Cette plateforme permettra surtout d’avoir une connaissance exacte du nombre et du type d’activités des centres qui jusqu’à ce jour sont méconnus des tutelles.

Autant d’indicateurs intéressants dont on espère qu’ils seront également accessibles au grand public. La collecte de ces indicateurs donnera peut-être lieu à des informations agrégées mais pour l’instant même les centres de santé n’ont accès qu’à leur seule déclaration. C’est tout nouveau puisque cela date de janvier 2017 mais on peut imaginer qu’il y ait une extraction consolidée des données soit par les services du Ministère de la santé, soit par l’Assurance maladie à partir de mai 2017.

Puis-je demander qu’un médecin généraliste en centre de santé soit mon médecin traitant et puis-je espérer me sentir pris en charge comme par un médecin de famille ?

Bien sûr ! C’est en fait l’équipe médicale du centre de santé qui sera officiellement le médecin traitant, ce qui garantit la continuité de la prise en charge, y compris en cas d’absence du médecin habituel, mais il est tout à fait possible d’avoir un médecin « attitré » qui suive une patientèle comme le ferait un médecin de famille. En ce qui me concerne, j’exerce en centre de santé depuis une trentaine d’année (d’abord à Champigny (94) puis à Saint-Denis (93)) et je fais même quelques visites à domicile pour les patients qui le nécessitent. Quand un de mes patients a vieilli et qu’il a des difficultés à se déplacer à un certain moment, je ne vais pas arrêter de le suivre. Mais sur ce sujet du médecin traitant, lorsqu’il est abordé sous le prisme du nombre de patients par médecin traitant, il peut se révéler assez trompeur et n’est pas forcément un indicateur probant. En effet, en libéral, on enregistre en moyenne 800 patients par médecin traitant, alors qu’en centre de santé, on est en moyenne à 500. On peut nous rétorquer que c’est par ce que l’on travaille moins de temps que les médecins libéraux, mais ce n’est pas la raison. La raison, c’est que lorsqu’un médecin en centre de santé intègre dans son temps d’activité des actions de promotion de la santé, de prévention, d’éducation thérapeutique, on ne peut pas recevoir autant de patients qu’un médecin qui ne fait que du curatif. C’est un choix. Je précise que tous les centres de santé ne font pas forcément de prévention. Les centres associatifs ne peuvent pas toujours se le permettre s’ils veulent être en équilibre financier car ils ne sont pas adossés à une collectivité, une mutuelle ou une fondation pour leur permettre d’équilibrer un budget. Les actions de promotion de la santé ou de santé publique ne sont pas toujours financées par les agences régionales de santé (ARS) et si elles le sont ce n’est pas complètement couvert, nécessitant du gestionnaire une participation au financement. Cependant, c’est l’un des indicateurs à renseigner dans la nouvelle déclaration « obervatoire e-cds », donc la part d’engagement d’un centre à faire de la prévention va désormais être plus lisible.

Le volet « prévention » est-il mis à l’honneur dans les centres de santé ?

Bien qu’il soit inscrit dans la loi que les centres de santé « mènent des actions de santé publique, de prévention, d’éducation pour la santé et des actions sociales  » il y a des centres de santé qui se rapprochent plus dans la pratique des médecins qui y exercent de celle des médecins libéraux. Dans de tels cas, les centres de santé en question intègrent souvent dans la rémunération de leurs médecins un pourcentage par rapport à leur volume d’activité. C’est évident que quand la rémunération dépend du volume d’activité, on a tendance à développer les soins à l’acte, plutôt que d’intégrer des éléments de santé publique. Je dirais que c’est sur ce point que peut se poser la différence d’un centre de santé à l’autre. Un centre de santé avec un gestionnaire municipal sera sûrement davantage intégré comme un outil de la politique de santé sur le territoire et on y développera plus facilement des actions de prévention et de promotion de la santé, alors qu’un centre de santé associatif répond souvent à un besoin de prise en charge médicale immédiate, comme le font les médecins libéraux, et n’auront souvent pas le temps, ni surtout les moyens, de faire de la santé publique. Les réformes des modes de rémunération et les réformes conventionnelles visent justement à intégrer un peu plus de financement forfaitaire, populationnel, organisationnel, de pratiques de qualité, et de diminuer la part du paiement à l’acte dans la rémunération des professionnels ou des structures, afin d’inciter l’ensemble de l’ambulatoire à être dans une démarche globale, pas uniquement dans le curatif.

Les médecins salariés des centres de santé peuvent donc être rémunérés à l’acte ? Cela a-t-il un impact sur la qualité de la prise en charge des patients ?

En fait, rares sont les centres de santé médicaux, dentaires ou polyvalents qui payent les médecins à la fonction. La plupart ont introduit, d’une façon ou d’une autre, une forme d’intéressement dans la rémunération des professionnels de santé. Ce sont principalement les centres municipaux (environ 12% des centres de santé en France) qui ont un mode de rémunération à la fonction, même si certains ont décidé de passer à une forme d’intéressement. Il faut dire que cela peut aussi dépendre de la couleur politique des municipalités. Dans les déserts médicaux, également on retrouve davantage de rémunération à la fonction afin de garantir un salaire fixe aux médecins.

Mais le mode de rémunération ne va rien changer pour le patient sur sa prise en charge individuelle. Que les patients sachent comment sont rémunérés les médecins en centres de santé n’a ni plus ni moins d’intérêt que de le savoir dans le secteur libéral. On n’a pas les moyens de savoir, en secteur libéral, combien de patients voit chaque médecin quotidiennement, ni combien de temps il leur consacre en moyenne. Il faut surtout travailler sur des indicateurs qui traduisent la qualité de la prise en charge, plutôt que de regarder le mode de rémunération, en imaginant que le mode de rémunération du médecin va impacter ou non son volume d’activité et que la qualité de la prise en charge va en pâtir.

Je pense qu’il vaut mieux mettre en évidence des critères de qualité. Pour l’instant, le seul qui s’affaire vraiment sur ce sujet, c’est l’Assurance maladie, mais à travers l’atteinte d’objectifs qui restent principalement financiers et quantitatifs (combien les médecins prescrivent de médicaments génériques, combien de patients âgés ou en ALD sont vaccinés contre la grippe, combien ont-ils fait réaliser de dépistages de cancer du sein ?). On est sur des indicateurs plus médico-économiques que de qualité médicale. Je pense qu’il serait pertinent d’introduire des éléments d’appréciation des patients, dans la validation ou la valorisation de la qualité d’une équipe pluriprofessionnelle. La fédération travaille en ce moment sur des enquêtes de satisfaction de la population. Et cela devrait d’ailleurs s’élargir et ne pas concerner uniquement les centres de santé, mais toute l’activité médicale. Cependant, rien n’est simple, car des enquêtes de satisfaction peuvent se révéler très subjectives. En effet, il y a des médecins qui voient beaucoup plus de patients quotidiennement que la moyenne et qui sont très appréciés. Donc cela montre bien que le temps passé pour chaque patient n’est pas forcément un critère d’appréciation positif aux yeux des patients.

Comment fonctionnent les centres de santé sur le plan financier ?

Dans la mesure où les centres de santé ont des gestionnaires à but non-lucratif, le mot « rentabilité » sur le plan financier n’est pas pertinent. On parlera plutôt d’équilibre financier. Or d’un gestionnaire à l’autre, les objectifs diffèrent.

Pour les centres associatifs, c’est une nécessité de financer la totalité de leurs charges. Si un centre de santé associatif ne couvre pas l’ensemble de ses dépenses, il ne tient pas un mois et fait faillite car personne ne viendra combler les déficits.

Pour les collectivités locales, c’est plus faisable. Le maire peut décider que le financement d’un ou de plusieurs centres de santé est un choix politique, au même titre que la municipalité financerait un théâtre ou des installations sportives. Cela rejoint le choix de faire plus ou moins de prévention dans un centre de santé, qui va avoir des conséquences sur le volume d’activité payé à l’acte. C’est à la municipalité de décider comment elle intervient dans le financement du centre, et comment elle veut le mettre en avant dans sa politique de santé publique. Il en va un peu de même pour les centres gérés par des caisses de sécurité sociale ou des fondations.

Enfin, les centres mutualistes sont à mi-chemin. De plus en plus de mutuelles cherchent à ce que chaque centre parvienne à l’équilibre, même si l’objectif de l’accès aux soins pour tous reste une priorité dans laquelle elles peuvent choisir d’investir en finançant en partie les centres de santé dont elles sont gestionnaires.

Ce qui est certain, c’est que l’exemple des centres dentaires DENTEXIA, qui ont défiguré et escroqué beaucoup de gens, est une exception dans le monde des centres de santé. La recherche de profit ne fait pas partie de la mission des centres de santé, et il ne faut pas faire d’un contre-exemple une généralité, ni que cela entraîne une suspicion excessive, des contrôles trop stricts de nos organisations, qui plomberaient le développement des centres de santé.

Les tarifs de santé sont-ils moins chers dans les centres de santé ?

A priori oui, car telle est à l’origine la mission des centres de santé : permettre l’accès aux soins au plus grand nombre, et prioritairement aux personnes qui vivent dans la précarité. De toute façon, il est inscrit dans la loi qu’un centre de santé doit pratiquer les tarifs de secteur 1 (sans dépassement d’honoraires) ainsi que le tiers-payant. Mais pour les soins à tarifs libres, comme les prothèses dans le cadre des soins dentaires, les tarifs en centres de santé sont dans l’ensemble moins chers que dans le secteur libéral de leur territoire. Lorsque l’on a négocié notre accord national, il y a deux ans avec la CNAMTS, les chiffres ont montré que les centres de santé, là où ils sont implantés, ont des tarifications prothétiques de 20 à 25% inférieures à la moyenne de la tarification locale des libéraux.

66 Millions d’IMpatients s’est rendu dans deux centres de santé parisiens, l’un géré par la CRAMIF, l’autre privé. Découvrez comment s’est déroulée notre visite et l’interview des responsables de chacun des deux centres :

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Source : https://www.france-assos-sante.org/2017/04/21/comment-est-on-soigne-dans-les-centres-de-sante/

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Les centres de santé sont soit mono-professionnels, soit pluri-professionnels. Les professionnels de santé y sont salariés et les centres de santé sont tenus de pratiquer le tiers payant.

Les centres de santé doivent élaborer un projet de santé attestant de leur exercice coordonné qu’ils transmettent à l’agence régionale de santé (ARS) en même temps que leur règlement intérieur. Ils sont appelés à conclure avec l’ARS un contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens préalablement à tout versement d’une aide financière par l’agence. On compte plus de 2200 centres de santé (dont 455 pluriprofessionnels). A l’exception des centres de soins infirmiers, ils sont implantés majoritairement en milieu urbain.

Le guide ’ centre de santé ’ - Consulter l’article sur le guide relatif aux centres de santé

Un appel à candidatures national a été lancé pour la mise en place d’une expérimentation de centres et maisons de santé dits « participatifs ».
Pour plus d’informations, rendez-vous sur la page Appels à projets

Textes de référence

Article L6323-1, D6323-1 à D6323-10 et R6323-23 à R. 6323-25 du code de la santé publique ;

Article L. 162-32 du code de la sécurité sociale

Arrêté du 30 juillet 2010 relatif au projet de santé et au règlement intérieur des centres de santé mentionnés aux articles D. 6323-1 et D. 6323-9 du code de la santé publique

Référentiel d’évaluation des centres de santé de l’HAS

Instruction n° DGOS/PF3/2012/384 du 12 novembre 2012 relative au guide méthodologique relatif à la circulation, au sein des centres et des maisons de santé, des informations concernant la santé des patients.

pdf Instruction interministérielle n°DGOS/SG-CIV/PF3/2012/351 du 28 septembre (...) Téléchargement du pdf (565.7 ko)


Dans cette rubrique

ContactsArchives presse- Source : https://sante.gouv.fr/systeme-de-sante/structures-de-soins/article/les-centres-de-sante-211965

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  • Qu’est-ce qu’un centre de santé ? FAQ – Document ‘lescentresdesante.com’
    À côté des hôpitaux et des cabinets libéraux, un mode d’organisation des soins original, dans la grande tradition des dispensaires et de la médecine sociale.

Des médecins généralistes, des spécialistes, des dentistes, des infirmiers, des kinésithérapeutes et des assistants sociaux sont à votre écoute.

  • Qu’est-ce qu’un centre de santé ?
    Un lieu de santé de proximité, de soins primaires -médecine générale, soins infirmiers et/ou chirurgie dentaire- et parfois de soins secondaires, de santé publique – prévention et promotion de la santé- où sont pris en charge tous ceux qui le souhaitent.

Combien y a-t-il de centres de santé en France ?

  • 1750 selon la Direction Générale de l’Offre de Soins en 2017 , dont près de 500 sont des centres de santé polyvalents ou médicaux. Les autres sont infirmiers ou dentaires.
    Quels soins peut-on recevoir dans un centre de santé ?
  • Tous les soins courants, médecine générale, médecins spécialistes, radiographie, échographie, analyses médicales, kinésithérapie, soins infirmiers, sur place ou à domicile, soins et prothèses dentaires. Il existe aussi des centres exclusivement dentaires ou infirmiers.
    Les centres de santé sont-ils plus spécialement réservés aux pauvres ?
  • Non. Les centres de santé sont ouverts à tous, combattent la médecine à deux vitesses et contribuent à la lutte contre les inégalités sociales de santé. Ils défendent une médecine de qualité pour tous. Ils proposent systématiquement le tiers-payant et respectent les tarifs opposables, donc ne font pas de dépassements d’honoraires.
    Pourquoi ne trouve-t-on pas des centres de santé partout ? Se développent-ils ?
  • Parce que leur histoire explique leur implantation : ils sont les plus nombreux là où les promoteurs historiques, municipalités ou mutuelles à forte motivation sociale, ont décidé de les créer et de les développer : en Ile de France, en PACA et particulièrement dans les Bouches du Rhone, dans les régions minières (centres de santé dits « miniers »)…
  • Depuis plus de 5 ans (2011), les centres de santé connaissent un nouvel essor, se développant dans toutes les régions de France, répondant avec pertinence et efficacité aux enjeux d’aujourd’hui : prise en charge complexe des maladies chroniques et des patients polypathologiques, réduction des inégalités sociales de santé, amélioration de l’efficience des interventions des soignants et lutte contre les DÉSERTS MÉDICAUX.
    Les centres de santé font-ils des efforts particuliers pour la santé de certaines populations ?
  • Oui, ils sont notamment en pointe dans les soins aux toxicomanes et dans la réduction des risques. Les équipes sont aussi très motivées pour les soins aux malades du sida. Grâce à leurs liens avec les services sociaux, les centres de santé proposent un accueil aux patients exclus socialement ou désinsérés. Les centres de santé sont également très actifs dans les secteurs de la petite enfance, de la planification familiale, de l’adolescence et du maintien à domicile.
    Quelles sont les problématiques que soulève le modèle médico-économique des centres de santé ?
  • D’une part, les centres de santé ont un coût structurel lié à leurs missions d’accessibilité sociale aux soins, et la première d’entre elle, le tiers payant qui n’est pas financé ni par les caisses d’assurance maladie ni par les complémentaires. La prise en charge de ce coût qui est (enfin !) reconnu par le gouvernement est une urgence. Sauf à prouver que la généralisation du tiers payant inscrite dans la Loi de Modernisation de notre Système de Santé l’efface totalement… Wait and see.
  • D’autre part, leurs missions de prévention sont elles mêmes insuffisamment financées.
  • Enfin leurs pratiques médicales en équipe et coordonnée, portant économes pour l’Assurance Maladie (limitation des prescriptions multiples, absence d’intérêt à une multiplication des actes) ne sont que peu valorisées. Le dernier Accord National en vigueur depuis le 1er janvier laisse espérer une évolution positive du financement des pratiques innovantes des centres.
    Pourquoi les délais sont-ils parfois si longs pour obtenir un rendez-vous ?
  • La plupart des centres de santé ne sont pas en mesure de satisfaire la demande autant que les besoins de la population le nécessiteraient. Ce type d’établissement rencontre un succès durable. Le problème est particulièrement difficile dans le secteur dentaire où les tarifs sont trop peu normalisés, souvent excessifs et mal remboursés.
    Quelle est la différence avec un cabinet médical privé classique ?
  • La pluriprofessionalité : généralistes et spécialistes, dentistes, kinés et infirmières, un dossier médical partagé, des praticiens généralement payés à la
  • fonction, garantie d’indépendance, et non pas à l’acte, la possibilité pour les professionnels de consacrer du temps à la prévention, à l’éducation pour la santé, un gestionnaire public (communal) ou à vocation sociale (mutualiste), la pratique systématique du tiers-payant, l’absence de dépassements tarifaires.
    Dans un centre de santé, qui porte le projet d’établissement : les professionnels ou le gestionnaire ?
  • Obligatoirement les deux ensembles. Sans les professionnels, il n’y a pas de centre de santé, sans un promoteur – une municipalité, une mutuelle, une association ou un établissement de santé – qui porte un projet de santé populationnel et territorial, ce n’est qu’un cabinet de groupe. Les évolutions de notre société plaident pour un nouveau modèle en devenir, dans lequel le dialogue s’enrichira avec l’émergence d’un nouvel acteur, l’usager. Celui ci trouve de plus en plus sa place dans les centres de santé à travers des comités d’usagers consultatifs ou sa participation directe à l’élaboration de projets de santé portés par les centres.
    Les réseaux de médecins vont-ils remplacer les centres de santé ?
  • Centres de santé et réseaux répondent à la même préoccupation : répondre à la complexité croissante de la décision médicale en faisant appel à des compétences médicales diverses et complémentaires au service du patient. Tous les médecins vont avoir tendance à se regrouper, et au minimum à développer les échanges informatisés (messageries, banques de données médicales). Les centres de santé offrent la particularité d’avoir déjà réalisé des regroupements de médecins et d’autres professionnels de santé dans des lieux facilement accessibles au public.
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Source : https://lescentresdesante.com/centre-de-sante-questions-frequentes/

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Entrée d’un centre médico-social. ©Maxppp - Richard VillalonPhoto

Les inégalités sociales de santé sont bien documentées, mais peu prises en compte par la médecine classique. Depuis une vingtaine d’années, une poignée de médecins et de professionnels de santé ont monté des centres où ces inégalités sont au cœur de l’organisation des soins.

« Je pourrais lui donner un médicament. Mais ce dont il a besoin pour ne plus avoir mal au ventre, c’est d’une voiture ». L’histoire de cet homme tordu de douleur car il lui manque une voiture pour accepter un emploi qui le sauverait, Didier Ménard la raconte souvent. Généraliste à la retraite, il a passé sa vie à pratiquer et défendre la santé sociale, ou communautaire : où la santé est un fait global, indissociable des conditions sociales et environnementales. Il explique ainsi : “En étant militant de la santé communautaire, on pose la question de la finalité de ce que veut dire être médecin aujourd’hui. Ma finalité, c’est que tout le monde ait accès à un traitement, mais que la personne qui est porteuse d’une maladie devienne, avec l’aide des soignants, un acteur de sa maladie. C’est vraiment un regard politique sur la souffrance qui s’exprime dans un cabinet médical, sur l’exclusion, sur le racisme, les violences vis-à-vis des femmes, l’inégalité des salaires, tout ce qui va se matérialiser concrètement dans la vie de la personne à travers l’expression de la douleur”.

Cette idée est défendue par une poignée de centres de santé militant, comme la Case de Santé à Toulouse. Là-bas, on défend une autre idée des relations patients médecins : les consultations sont longues, des médiateurs en santé expliquent et accompagnent, et régulièrement des ateliers et des repas mettent usagers et médecins sur des plans de quasi égalité.

L’une des médecins généralistes du centre, Virginie, définit ce qu’est la santé communautaire : “C’est une autre façon de faire de la santé. La santé n’est pas seulement une maladie, et un traitement de la santé. Elle peut se voir que dans la globalité, en prenant en compte tous les déterminants de la santé et notamment les déterminants sociaux de la santé. Ca sous-entend que si on veut agir en santé, il va falloir mettre en œuvre des choses qui ne sont pas seulement médicales. D’où le sens de travailler en pluridisciplinarité avec accueillants, médiateurs en santé, travailleurs sociaux, psychologues, infirmiers, sages-femmes, sans oublier les administrateurs, pour pouvoir, bien sûr nous aider à fonctionner”.

La Case de Santé a ainsi ouvert un pôle Santé Droit. Pour l’équipe de la Case, santé et accès aux droits vont de pair : on ne peut pas se soigner correctement si on n’a pas d’hébergement ou qu’on vit en situation irrégulière. Le centre a longtemps été précaire et souvent menacé de fermeture. Mais un nouveau dispositif de financement de ces centres, expérimenté par l’Assurance Maladie, lui offre aujourd’hui une certaine stabilité. Et permet à d’autres centres de se lancer.

Car le modèle essaime : à la Brillane, dans un désert médical des Alpes de Haute-Provence, une jeune équipe s’apprête à ouvrir un centre, avec l’appui du conseil municipal.

Un documentaire de Claire Richard, réalisé par Assia Khalid.

Avec :

  • Didier Ménard, médecin généraliste à la retraite
  • Virginie, médecin généraliste
  • Audrey, infirmière
  • Samah, médecin généraliste
  • Marie et Tchotcho, patientes d’un centre communautaire
  • Zoéline Froissart, médecin généraliste à Manosque, membre du futur centre de santé communautaire de la Brillane.
  • Najet, travailleuse sociale
  • Raïssa, Faïza et Tewfik, médiatrices et médiateur de santé
    Société Santé Politiques de santé publique Documentaire radiophonique Documentaires de société

L’équipe -

Perrine KervranPerrine Kervran Production - Claire Richard Production - Maryvonne Abolivier Collaboration - Anahi Morales Collaboration - Annelise Signoret Collaboration - Assia Khalid Réalisation

Dans la même série > 59 min - Episode 1/4 : Après le sida, la démocratie sanitaire

France Culture – Écouter la radio en direct et podcasts ...

Radio France | Écoutez en ligne vos radios

Source : https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/lsd-la-serie-documentaire/les-centres-de-sante-communautaire-3164678

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Annexe pratique en matière de santé - Les protocoles pluriprofessionnels, des outils au service des équipes – Document de la Fédération Nationale des Centres de Santé

Les équipes des centres de santé pluriprofessionnels prennent en charge les patients de façon coordonnée. Ce travail en équipe permet de faciliter le parcours de soins et met en œuvre une prise en charge globale de la santé des patients. Les protocoles pluriprofessionnels sont des outils facilitant la prise de décision des équipes pluriprofessionnels notamment pour les situations concernant les maladies aiguës longue durée.

Les équipes des centres de santé peuvent élaborer et mettre en œuvre leur propre protocole, en suivant la méthodologie préconisée par la HAS.

Après avoir détaillé une méthode d’élaboration des protocoles pluriprofessionnels de soins de premier recours, la HAS publie une fiche ’points clés et solutions’ pour leur élaboration et leur mise en œuvre.

Il existe actuellement 7 protocoles pluriprofessionnels :

Un groupe de travail organisé par la FNCS s’est réuni une première fois le 14/09/2015, nos adhérents peuvent prendre connaissance du compte rendu et participer en répondant au questionnaire en ligne.

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https://www.fncs.org/sites/default/files/styles/zlarge/public/field/image/mecanisme_dentele.jpg?itok=oOJkEZZr

Autre source d’information : https://www.femasif.fr/protocoles-pluriprofessionnels-maison-de-sante/

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Collecte de documents et agencement, [compléments] et intégration de liens hypertextes par Jacques HALLARD, Ingénieur CNAM, consultant indépendant – 09/03/2023

Site ISIAS = Introduire les Sciences et les Intégrer dans des Alternatives Sociétales

Site : https://isias.info/

Adresse : 585 Chemin du Malpas 13940 Mollégès France

Courriel : jacques.hallard921@orange.fr

Fichier : ISIAS Santé Sociologie Territoires Centres de santé.7.docx

Mis en ligne par le co-rédacteur Pascal Paquin du site inter-associatif, coopératif, gratuit, sans publicité, indépendant de tout parti, un site sans Facebook, Google+ ou autres GAFA, sans mouchard, sans cookie tracker, sans fichage, un site entièrement géré sous Linux et avec l’électricité d’Énercoop , géré par Yonne Lautre : https://yonnelautre.fr - Pour s’inscrire à nos lettres d’info > https://yonnelautre.fr/spip.php?breve103

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