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“Une agriculture biologique et sans OGM pour nourrir le monde” par le Dr. Mae-Wan Ho

Traduction et compléments de Jacques Hallard

vendredi 18 avril 2008, par Ho Dr Mae-Wan

Un groupe international de 400 chercheurs scientifiques lance un appel pour des changements fondamentaux dans les pratiques agricoles. Dr. Mae-Wan Ho

Communiqué de presse de l’institut ISIS en date du 18/04/2008
L’article original en anglais, intitulé “GM-Free Organic Agriculture to Feed the World”, est accessible sur le site suivant : http://www.i-sis.org.uk/GMFreeOrganicAgriculture.php

Un groupe international de chercheurs dissipe la propagande agressive exercée par certaines grandes entreprises transnationales

Un changement fondamental dans les pratiques agricoles est nécessaire pour contrer la flambée des prix des denrées alimentaires, la faim, les inégalités sociales et les catastrophes écologiques.

Les cultures de plantes génétiquement modifiées (OGM) sont très controversées et elles ne joueront pas un rôle important pour relever les défis des changements climatiques, de la perte de la biodiversité, des famines et de la pauvreté.

Au lieu de cela, les petites structures agricoles et les méthodes agroécologiques sont la voie à suivre, avec la prise en compte des connaissances autochtones et locales qui jouent un rôle aussi important que la science officielle.

En outre, la ruée vers les cultures pour les agrocarburants pourrait aggraver les pénuries alimentaires et la hausse des prix.

Telles sont les conclusions d’un examen très approfondi de l’agriculture mondiale, exercée à une échelle comparable à celle du Groupe intergouvernemental sur les changements climatiques (GIEC).

Le rapport final de cette vaste étude : "L’évaluation internationale des sciences et technologies agricoles pour le développement", The International Assessment of Agricultural Science and Technology for Development (IAASTD), a été officiellement lancé lors d’une séance plénière, à Johannesburg, en Afrique du Sud le 15 avril 2008 [1-3] et publié simultanément à Londres, Washington, New Delhi, Paris, Nairobi et dans un certain nombre d’autres villes du monde.

L’ IAASTD est une collaboration unique en son genre lancée par la Banque mondiale en partenariat avec de multiples parties prenantes de divers groupes d’organisations, dont l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture, le Programme des Nations Unies pour le développement, le Programme des Nations Unies pour l’environnement, l’Organisation mondiale de la santé et des représentants des gouvernements de nombreux pays, de représentants de la société civile, du secteur privé et d’institutions scientifiques du monde entier [2].

Le véritable rapport est composé de 2.500 pages et il a mobilisé plus de 400 scientifiques pendant une durée de 4 ans.

D’un seul coup, cette étude a balayé des années de propagande émise par de très grandes entreprises et qui a servi à nous détourner d’une grande tâche urgente : mettre en œuvre une production alimentaire durable pour tout le monde.

Comme l’a commenté un éditorial du journal britannique Daily Mail [4] : "Pendant des années, les entreprises de biotechnologie ont répondu à la critique en insistant sur les cultures de plantes génétiquement modifiées qui auraient été essentielles pour faire baisser les prix des denrées alimentaires et pour régler les problèmes d’alimentation pour tous dans le monde. Eh bien, maintenant nous savons que ce n’est pas le cas. "

La question primordiale est de savoir comment on peut réduire la faim et la pauvreté

La question abordée est en fait primordiale [5] : « Comment peut-on réduire la faim et la pauvreté et améliorer les moyens d’existence dans les milieux ruraux ? Comment faciliter un développement durable qui soit équitable socialement et vivable écologiquement, par la création, l’accès et l’utilisation des connaissances agricoles, de la science et de la technologie ? ».

La question avait été motivée par "les conséquences sociales et environnementales non intentionnelles " des succès antérieurs concernant l’accroissement de la productivité agricole par la science et la technologie, ainsi que par les énormes défis qui nous attendent dans la fourniture de moyens de subsistance et de la sécurité alimentaire [6].

Mis à part l’épuisement des ressources en combustibles et carburants fossiles, ainsi que la raréfaction de l’eau, la pression exercée par la croissance démographique, et non des moindres, il est question du changement climatique et de la crise alimentaire qui a conduit à des émeutes dues aux famines et à des flambées de violence dans un nombre croissant de pays en développement [7] (voir Food Without Fossil Fuels Now, SiS 38).

Les connaissances scientifiques et les compétences traditionnelles ont été évaluées par un travail international dans le cadre de l’opération IAASTD : cela représente la première tentative dans ce sens.

C’est par ailleurs exactement ce qui a été effectué simultanément de notre côté et qui a fait l’objet d’un rapport sur le travail effectué dans une coopération entre nos organisations ISIS et TWN , Food Futures Now *Organic *Sustainable *Fossil Fuel Free [8] ; c’est sans doute la raison pour laquelle nous sommes arrivés à des conclusions très semblables. Les personnes qui ont contribué au travail IAASTD ont réalisé des évaluations au niveau de cinq grandes zones de la planète et une synthèse du rapport en 126 pages a été produite.[6].

« Étant donné l’ampleur des défis qui nous attendent, il était très clair pour nous tous que continuer ainsi sur la lancée actuelle n’était pas l’option à retenir », a déclaré Hans Herren, le coprésident de l’opération IAASTD [1].

Il s’exprimait lors d’une séance plénière intergouvernementale qui s’est déroulée au centre d’affaires à Johannesburg, en Afrique du Sud, où les résultats de l’évaluation ont été examinés avant la présentation du rapport.

On estime [selon les rapports de la FAO] que 850 millions de personnes ont faim et souffrent de malnutrition aujourd’hui, car ils ne peuvent pas avoir accès aux denrées alimentaires dont ils ont besoin ou ils ne peuvent pas se les payer, a ajouté Hans Herren :
« Nous avons besoin d’une alimentation de bonne qualité et qui soit disponible aux bons endroits ».

Il a déclaré par la suite à la BBC [9] que "des positions politiques et économiques de nature contentieuse" affectent les tentatives pour remédier à certains de ces déséquilibres.

Plus précisément, de nombreux pays membres de l’OCDE sont profondément opposés à tout changement dans les régimes commerciaux ou les systèmes de subventions.

« Sans réformes, de nombreux pays pauvres connaîtront des temps très difficiles », a-t-il annoncé.

Le rapport a indiqué que les efforts devraient se concentrer sur les besoins des petits agriculteurs dans divers écosystèmes et dans les zones qui ont les plus grands besoins.

Les mesures devraient comprendre un meilleur accès des agriculteurs aux connaissances, à la technologie et au crédit financier.

Elles devraient également être assorties d’investissements destinés à fournir les informations nécessaires et les infrastructures dans les zones rurales.

Les industriels des biotechnologies et les États-Unis dans le collimateur

La session plénière a été marquée par certains désaccords tenaces sur les biotechnologies et les échanges commerciaux.

Au cours d’un long débat sur les biotechnologies, la réunion a bien failli être interrompue [1].

Les délégués gouvernementaux des États-Unis et de l’Australie ont émis des objections quant à la formulation des textes, dans le rapport de synthèse, qui mettent en lumière les préoccupations sur le fait de savoir si les OGM utilisés dans les aliments étaient bien inoffensifs et sans danger pour la santé publique.

Syngenta et les autres sociétés de biotechnologie et des pesticides [industries phytosanitaires] avaient déjà abandonné le processus d’évaluation à la fin de l’année 2007.

L’impasse vécue lors de la séance plénière a été solutionnée lorsque les deux pays [Etats-Unis et Astralie] ont accepté le principe d’une note incluse dans le rapport et qui indique leurs réserves au sujet du texte formulé, afin d’accepter alors le rapport dans son ensemble, tandis que le Canada et le Swaziland exprimaient la même position, mais sans adopter le rapport intégral.

Les sujets concernant les biotechnologies à travers les modifications génétiques et les échanges commerciaux ont été amplement débattus au cours des quatre années pendant lesquelles le processus IAASTD s’est déroulé et le libellé final reflète bien les preuves scientifiques qui ont été rapportées.

Le rapport ajoute que les biotechnologies concernées ont un rôle à jouer à l’avenir, bien qu’elles restent un sujet qui fait l’objet d’un contentieux.

Le rapport stipule en outre que le brevetage des gènes entraîne des problèmes, à la fois pour les agriculteurs et pour les chercheurs.

Les 60 pays qui étaient représentés à la session plénière ont finalement adopté le rapport IAASTD.

Un scientifique britannique sur le pont

Le directeur du Secrétariat IAASTD, Robert Watson, responsable de la recherche auprès de la Banque mondiale (et qui est aussi directeur scientifique indépendant au Ministère de l’Environnement, de l’Alimentation et de l’Agriculture du Royaume-Uni), a pris la parole lors du lancement du Rapport à Londres [9].

« Nous avons essayé d’évaluer les implications des connaissances en matière d’agriculture, de recherche scientifique et de technologie, en examinant aussi bien le passé, que le présent et l’avenir, à partir d’une série de questions très critiques", a expliqué le ministre Watson "Ces questions sont la faim et la pauvreté, les moyens d’existence des populations rurales, la nutrition et la santé humaine... Le point essentiel est de savoir comment nous allons pouvoir aborder ces questions d’une manière qui soit écologiquement, socialement et économiquement durable ? "

« L’agriculture ne peut plus être abordée comme une question unique », a-t-il averti.

« Nous avons besoin d’examiner les problèmes écologiques de la biodiversité et de l’eau, les aspects économiques et les affaires commerciales, ainsi que les préoccupations sociales relatives à la nature des populations et à leurs cultures ».

Le ministre Watson a décrit certains des défis auxquels devra faire face le secteur agricole et alimentaire au cours des 50 années à venir : « Nous devons renforcer les moyens d’existence dans les zones rurales, où vivent la plupart des pauvres avec un ou deux dollars par jour.

Nous avons également besoin de stimuler la croissance économique parce que la moitié des pays d’Afrique ont un pourcentage important de leur PIB qui provient du secteur agricole.

Dans le même temps, nous devons répondre à des normes de sécurité alimentaire et nous assurer que nous n’avons pas de résidus de pesticides et des niveaux inacceptables d’hormones ou de métaux lourds.

Tout cela doit être fait d’une façon durable écologiquement et socialement ».

Il a par la suite déclaré à John Vidal du journal britannique The Guardian [10] que les gouvernements et les industriels se concentrent trop sur l’augmentation de la production alimentaire, en apportant insuffisamment d’attention et de respect pour les ressources naturelles ou la sécurité alimentaire.

« Le fait de poursuivre avec les tendances actuelles reviendrait à accentuer la division entre les nantis et les pauvres. Cela nous laisserait face à un monde dans lequel personne ne voudrait plus habiter.

Nous devons rendre les aliments plus abordables et plus nutritifs, sans dégrader la terre », a précisé le ministre Watson.

Le gouvernement britannique ne figure pas parmi les 60 pays qui ont signé le rapport, mais le ministre Watson a indiqué qu’il avait le soutien total du Premier ministre britannique [3].

Les plantes génétiquement modifiées n’apportent pas la solution

Les grandes sociétés mondiales des biotechnologies, les structures commerciales et les organismes scientifiques ont exploité la crise alimentaire pour intensifier leur propagande en faveur de cultures de plantes génétiquement modifiées.

Le Conseil pour la recherche scientifique et économique du Royaume-Uni, l’Economic and Social Research Council (ESRC), a été mis à l’index pour avoir utilisé abusivement des fonds publics importants dans le but de soutenir la commercialisation des plantes OGM auprès des agriculteurs britanniques et la publication d’un communiqué de presse trompeur sur la façon dont les agriculteurs britanniques sont "optimistes face aux OGM" [11, 12] (Marketing Masquerading as Scientific Survey and "UK Farmers Upbeat about GM Crops" Debunked, SiS 38)

Le Professeur Watson a également déclaré au Daily Mail que [3] : « Sur la question simpliste de savoir si les OGM sont la solution à la faim et la pauvreté. Il a encore dit que davantage de recherches étaient nécessaires pour déterminer si les OGM offrent des avantages et ne causent pas de nuisances à l’environnement.

L’industrialisation de l’agriculture, qui repose en partie sur les plantes transgéniques, a conduit à l’utilisation massive d’engrais de synthèse et d’autres produits chimiques ; ces derniers ont apporté des nuisances à la structure du sol et aux cours d’eau qui sont pollués.

Il résulte du lessivage des éléments minéraux essentiels des sols, que les aliments produits sont de moins bonne qualité nutritionnelle qu’il y a 60 ans.

Le document IAASTD affirme ceci [10] : « L’évaluation de la technologie est en retard par rapport à son développement, les informations sont fragmentaires et contradictoires, et l’incertitude sur les éventuels avantages et les dommages possibles est inévitable ».

Les auteurs ont également prévenu que la ruée vers les agrocarburants n’est pas durable.

« Le détournement des plantes cultivées pour des usages énergétiques est responsable de l’augmentation des prix des produits alimentaires et de la réduction de notre capacité à soulager les famines.

Les conséquences sociales négatives risquent d’être aggravées dans les cas où les petits agriculteurs sont marginalisés ou se retrouvent éloignés de leurs terres ».

Janice Jiggins, professeur à l’Université de Wageningen aux Pays-Bas, l’un des chercheurs scientifiques co-auteur de l’IAASTD, a contesté que les plantes génétiquement modifiées aient été considérées comme sûres et inoffensives [sur le plan de la sécurité alimentaire et de la santé publique] [3] : « Il y a beaucoup de préoccupations légitimes quant à la présence des produits transgéniques dans l’alimentation, ainsi qu’en ce qui concerne les normes de sécurité qui sont requises pour faire entrer les OGM dans l’alimentation humaine et animale », a-t-il dit.

Un rapport largement salué par les ONG (Organisations Non Gouvernementales)

Un groupe international composé d’organisations consacrées à la consommation et à l’environnement, notamment Third World Network, Practical Action, Greenpeace et les Amis de la Terre, a indiqué ceci dans une déclaration : « C’est un triste bilan de l’échec de l’agriculture industrielle.

Les petits agriculteurs et les méthodes écologiques nous montrent la voie à suivre pour éviter la crise alimentaire actuelle et pour répondre aux besoins des collectivités et des populations ».

Lim Li Ching de l’ONG Third World Network, a déclaré : « Cela montre clairement ce que les petits agriculteurs et l’environnement ont perdu avec la libéralisation des échanges.
Les pays en développement doivent pouvoir exercer leur droit de stopper l’afflux de produits bon marché et subventionnés en provenance du nord ».

Guilhem Calvo, un conseiller de la division des sciences de la terre et de l’écologie auprès de l’UNESCO, l’un des auteurs du rapport, a déclaré lors d’une conférence de presse à Paris : « Nous devons développer une agriculture qui est moins dépendante des combustibles et des carburants fossiles, privilégier l’utilisation de ressources locales et explorer l’utilisation de processus naturels tels que la rotation des cultures et l’utilisation de fertilisants organiques ».

L’ONG Greenpeace s’est félicité de la publication [2] considérée comme « une occasion historique pour remplacer les produits chimiques destructeurs de l’agriculture intensive, par des méthodes qui travaillent avec la nature, et non pas contre elle."

Selon Pete Riley de l’ONF GM Freeze au Royaume-Uni : « Nous sommes ravis que le matraquage avec les affirmations sur l’évolution actuelle des plantes cultivées alimentaires issues d’OGM à travers le monde, a été rejeté.

Nous appelons les gouvernements, les industriels et les scientifiques à répondre positivement aux défis que le rapport fixe et à modifier leur approche de la recherche scientifique : elle doit être orientée vers la satisfaction des besoins de ceux qui devraient bénéficier - et non pas répondre aux besoins des entreprises ».

Pour adopter la gamme complète des affaires solutions pratiques à suivre et à mettre en oeuvre, d’après le rapport IAASDT, on peut utilement se reporter au rapport conjoint de l’ ISIS et TWN, Food Futures Now *Organic *Sustainable *Fossil Fuel Free [8] ; cet ouvrage a été lancé le 22 Avril 2008 au Parlement britannique à Londres. www.i-sis.org.uk

Références bibliographiques

« Are We Headed for a Sci-Fi Dystopia ? « Are We Headed pour un Sci-Fi Dystopia ?
Bush’s ‘Losership’ on Climate » Bush’s’ Losership "sur le climat »

1. “Africa : Reinventing Agriculture”, Stephen Leahy, Inter Press Service, (Johannesburg), 15 April 2008, http://allafrica.com/stories/200804150171.html

2.“Urgent changes needed in global farming practices to avoid environmental destruction” Greenpeace International Press Release, 15 April 2008.

3.“GM foods ‘not the answer’ to world’s food shortage crisis, report says”, Sean Poulter, The Daily Mail, 16 April 2008
http://www.dailymail.co.uk/pages/live/articles/news/news.html?in_article_id=559965&in_page_id=1770

4.GM food, biofuels and a hungry world, Editorial,
The Daily Mail, 16 April 2008
http://www.dailymail.co.uk/pages/live/articles/news/newscomment.html?in_page_id=1787&in_article_id=559945

5.What is the International Assessment of Agricultural Knowledge, Science & Technology, IAASD ? A compilation from its plenary decisions and official documents, http://www.agassessment-watch.org/docs/IAASTD_on_three_pages.pdf

6.International Assessment of Agricultural Knowledge, Science & Technology (IAASTD) Synthesis Report 25 November 2007, http://www.agassessment.org/docs/Synthesis_Report_261107_text.pdf

7.Ho MW. Food without fossil fuels now. Invited Keynote Lecture, 2nd Mediterranean Conference on Organic Agriculture in Croatia, Organic Agriculture - Contribution to Sustainable Ecosystem, 2-6 April 2008, Dubrovnik University. Dubrovnik, Croatia, http://www.i-sis.org.uk/foodWithoutFossilFuels.php

8.Ho MW, Burcher S, Lim LC et al. Food Futures Now, Organic, Sustainable, Fossil Fuel Free, ISIS TWN Report, London & Penang, 2008.

9.“Global food system ‘must change’” BBC News, 15 April 2008, http://news.bbc.co.uk/1/hi/sci/tech/7347239.stm

10.“Change in farming can feed world - report”, John Vidal, The Guardian, 16 April 2008, http://www.guardian.co.uk/environment/2008/apr/16/food.biofuels

11.Saunders PT. Marketing masquerading as scientific survey. Science in Society 38 (to appear).

12.Ho MW and Saunders PT. “UK farmers upbeat about GM crops” debunked. Science in Society 38 (to appear)
The Institute of Science in Society, PO Box 51885, London NW2 9DH
telephone : [44 20 8452 2729] [44 20 7272 5636]
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Complément en français :

Repenser demain - 15 avril 2008

(Publication autorisée par Hervé Kempf pour Yonne Lautre, ne pas reproduire sans autorisation).

Lu dans le journal Le Monde du jour cet article assez long mais riche, qui fait écho à l’interview du responsable d’Action contre la Faim entendu ce matin à la Matinale de Canal. D’après ce responsable, si à très court et moyen terme, l’urgence est de fournir de la nourriture aux populations affamées, à plus long terme la solution consiste à :

Repenser l’agriculture de demain

Les experts n’avaient pas prévu les "émeutes de la faim" qui secouent la planète, mais leur travail ne pouvait tomber plus à propos : dans un rapport publié mardi 15 avril, la communauté scientifique des agronomes appelle à soutenir les petits paysans et à intensifier les recherches en agro-écologie. Le document, approuvé par 59 gouvernements à Johannesburg, le 12 avril, a été rédigé dans le cadre de l’IAASTD (International Assessment of Agricultural Science and Technology for Development), EISTAD en français (Evaluation internationale des sciences et technologies agricoles au service du développement).

Il est le fruit d’un processus similaire à celui suivi - pour l’analyse du changement climatique - par le GIEC (Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat). Engagé en 2004, l’IAASTD a réuni plus de 400 experts internationaux, chargés de définir les voies que devrait suivre la recherche agronomique pour relever le défi alimentaire dans les prochaines décennies.

Le processus a été piloté par Robert Watson, ancien président du GIEC, et soutenu par la Banque mondiale et l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO). Point original : les organisations non gouvernementales y ont été associées, qu’elles soient écologistes ou qu’elles représentent des entreprises. Un membre de Greenpeace figurait ainsi dans le bureau de l’IAASTD, qui comptait 55 personnes.

Le rapport affirme une "prise de conscience" de la pérennité d’une grave pauvreté rurale, liée au manque de soutien des politiques publiques pour l’agriculture, alors que de nouvelles contraintes se profilent à l’horizon : changement climatique, disponibilités en eau, concurrence des agrocarburants, érosion de la biodiversité...

"On ne peut pas jouer seulement sur le facteur de la technologie"

Achim Steiner, secrétaire du Programme des Nations unies pour l’environnement, a ainsi estimé que "si nos systèmes agricoles continuent de mettre l’accent uniquement sur la maximisation de la production au coût le plus bas, l’agriculture connaîtra une grande crise dans vingt à trente ans".

Le document de l’IAASTD marque un renversement d’optique par rapport à la politique qui a favorisé depuis un demi-siècle les cultures d’exportation au détriment des cultures vivrières (cacao en Côte d’Ivoire, arachide au Sénégal, soja en Argentine, etc.). "L’IAASTD propose une réorientation autour des savoirs locaux et communautaires, afin de retrouver une autosuffisance alimentaire, explique le Français Michel Dodet, de l’Institut national de la recherche agronomique (INRA), membre du bureau de l’IAASTD. On ne peut pas jouer sur le seul facteur de la technologie."

La discussion a achoppé sur la question du rôle des organismes génétiquement modifiés (OGM). L’organisation Crop Life International, qui regroupe des entreprises comme Monsanto et Syngenta, s’est ainsi retirée de la discussion en octobre 2007. Le processus n’en a pas moins continué, conduisant à "une vision de compromis entre deux visions dures de l’agriculture : celle qui place la technologie au centre de tout progrès et celle privilégiant les savoirs locaux", selon Marianne Lefort, agronome et coauteur d’un des rapports. Par ailleurs, l’"agro-écologie", qui est la prise en compte des processus écologiques dans le système agricole, se voit pleinement reconnue par l’IAASTD.

Le rapport de synthèse a été approuvé par 59 des 63 Etats représentés au sein de l’IAASTD. Etats-Unis, Australie, Canada et Royaume-Uni ont indiqué "ne pas pouvoir [l’]approuver complètement". Mais, dans une déclaration liminaire, ces pays ont apporté leur soutien à la démarche engagée. De son côté, la Chine a approuvé l’ensemble des textes, exprimant cependant des "réserves" sur le chapitre relatif aux biotechnologies.

La position de l’IAASTD vient conforter un changement d’orientation amorcé par la Banque mondiale, dont le dernier rapport annuel constatait qu’"alors que 75 % de la population pauvre mondiale vit dans les espaces ruraux, seulement 4 % de l’aide publique au développement va à l’agriculture". En fait, observe Michel Dodet, "on redécouvre que la production est une condition du développement".

Les mouvements de paysans, de mieux en mieux organisés, contribuent aussi à cette nouvelle perception. De passage à Paris, Rajagopal P.V., leader du mouvement indien des sans-terre, qui a conduit en octobre une marche de 25 000 paysans sur New Delhi, résumait, lundi 14 avril : "Pendant des années, on a entendu dire que les petits paysans n’étaient pas viables, qu’il fallait laisser faire les grandes exploitations. Aujourd’hui, avec les pénuries alimentaires, les gens comprennent que cette production centralisée ne marche pas."

Auteur : Hervé Kempf (in Le Monde.fr du 15/04/2008) 16:38
Publié dans Miss Terre et bouts de blogs

Traduction et complément :

Jacques Hallard, Ing. CNAM, consultant indépendant.
Relectures et corrections : Christiane Hallard-Lauffenburger, professeur des écoles honoraire
Adresse : 19 Chemin du Malpas 13940 Mollégès France
Courriel : jacques.hallard921@orange..fr
Fichier : Agriculture biologique OGM GM-Free Organic Agriculture to Feed the World ISIS French.3