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"A cause du réchauffement, les océans sont en manque d’oxygène" par le Dr. Mae-Wan Ho

Traduction et compléments de Jacques Hallard

lundi 10 août 2009, par Ho Dr Mae-Wan

Le réchauffement planétaire provoque une diminution de l’oxygène dans les
eaux océaniques : la survie des activités de pêches et l’ensemble des
écosystèmes marins sont menacés, par le Dr. Mae-Wan Ho

Communiqué de presse en date du 10/08/2009

Titre de l’article original en anglais Warming Oceans Starved of Oxygen accessible par les
membres de l’ISIS sur le site www.i-sis.org.uk/Warming_Oceans_Starved_of_Oxygen.php

Une version électronique du rapport complet peut être téléchargée à partir du magasin en ligne ISIS.

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D’importants volumes d’eaux océaniques, à des profondeurs intermédiaires, sont privés
d’oxygène. Les dernières études confirment que cette zone de pauvreté en oxygène a
été en expansion exponentielle au cours des cinquante dernières années [1], et elle va se
poursuivre dans un avenir prévisible [2].

Les océans tropicaux sont privés d’oxygène

L’oxygène a une très faible solubilité dans l’eau de mer, dans la mesure où 99 pour cent
de celle-ci se trouve dans l’atmosphère à un moment donné. Pourtant, cette dissolution
de l’oxygène, non seulement soutient l’ensemble de la biosphère des océans, mais elle a
également des effets majeurs sur les cycles du carbone et de l’azote au niveau
mondial.

Ces concentrations sont très sensibles aux changements dans les flux entre air et mer
et aux dynamiques internes dans les océans. Des organismes importants, tels que les
poissons, sont stressés ou meurent dans des conditions d’hypoxie, ce qui peut se
produire n’importe où, entre 60 à 120 m mol / kg selon les espèces.

Le niveau pré-industriel convenablement oxygéné était d’environ 170 m mol / kg [2].
Des secteurs avec des concentrations en oxygène de moins de 10 m mol / kg sont dites
suboxiques, alors que les secteurs qui n’ont pas d’oxygène dissous sont appelées
anoxiques.

À l’heure actuelle, les couches à faibles teneurs en oxygène dans les
niveaux intermédiaires des profondeurs océaniques, sont appelées OMZ ou, en français,
ZMO = Zone de Minimum d’Oxygène ; ces zones sont suboxiques dans l’Océan Pacifique
tropical et dans le nord de l’Océan Indien tropical et elles sont hypoxiques dans la zone
tropicale de l’Océan Atlantique.

Des fluctuations importantes de l’oxygène dans les océans ont eu lieu dans l’histoire de
la terre.

A la fin du Permien, il y a 251 millions d’années, l’anoxie des océans a été
associée à une augmentation du CO2 atmosphérique et à une extinction massive des
espèces vivant sur la terre et dans les mers.

Un peu partout dans les océans du monde, on observe des perturbations des niveaux d’oxygène

Des enquêtes répétées ont indiqué qu’au cours des dernières décennies, la partie
supérieure - de l’ordre de 3 km à la partie supérieure des océans - se sont réchauffés,
alors que les eaux intermédiaires des hautes latitudes se sont rafraîchies [3].

Les études
avec des modèles appropriés ont confirmé le soupçon, que ce sont bien les conséquences
du réchauffement de la planète, par l’utilisation des combustibles et des carburants
fossiles, ainsi que d’autres activités humaines.

Les enquêtes ont aussi décelé une
diminution de l’O2 dissous dans les eaux intermédiaires dans tous les océans, avec de
faibles augmentations dans les eaux profondes du Pacifique Nord et dans le Sud de
l’Océan Indien.

De fortes fluctuations des teneurs en oxygène ont été observées, d’année en année et
au fil des décennies, dans la partie supérieure sur une centaine de 100 m, de même que
des changements à long terme ont été rapportés des régions subpolaires et subtropicales
[1].

Par exemple, à la Station Papa (50° N, 145° W) dans l’océan Pacifique subarctique, on
a enregistré des chutes des concentrations en oxygène à des profondeurs de 100 à 400
mètres, entre 1956 et 2006.

Une réduction globale en O2 dissous est prévue dans les modèles de circulation générale
des océans, résultant de l’augmentation des gaz à effet de serre, avec un réchauffement
de la surface de l’océan et un renforcement de la stratification (formation de couches
statiques), de l’eau dans les océans [3]. La stratification a deux effets opposés sur les
concentrations d’oxygène en dessous de la surface des océans.

Tout d’abord, elle réduit
la remontée d’éléments nutritifs provenant des eaux plus profondes vers la surface, - ce
qui réduit la photosynthèse - et elle réduit le flux des détritus organiques vers les niveaux
inférieurs de l’océan, ce dernier phénomène est souvent dénommé pompe biologique
ou cycle marin du carbone.

La réduction du taux de cette pompe biologique, augmente l’O2 en profondeur du fait
d’une réduction de son taux d’utilisation. Deuxièmement, la stratification limite le
transport vers les basses couches océaniques, à partir de la zone bien oxygénée des
eaux de surface, vers les couches inférieures de l’océan (remontée et renversement),
réduisant ainsi la concentration de l’O2 dans les basses couches. Il a été démontré dans
les études de modélisation, que l’effet de stratification sur le transport d’O2 est supérieur
à l’effet de son utilisation en profondeur, conduisant à une diminution nette de O2, comme
cela a été relevé.

Dans l’étude des projections futures de l’épuisement en O2 des océans [2], un
ralentissement de seulement 15 pour cent dans le renversement, par la stratification,
peut diminuer les échanges océaniques de près de 77 pour cent, et la moyenne de l’O2
dans l’océan jusqu’à 54 pour cent, par rapport à une baisse du taux d’O2 de 23 pour cent,
sans ralentissement de phénomène de renversement.
L’oxygène dans les océans peut diminuer beaucoup plus rapidement en raison de
réactions en retour positives (feedbacks), qui agissent à différents degrés spatiaux et
temporels.

Une reconstitution de l’histoire des océans au cours des 50 dernières années

L’équipe de recherche internationale, dirigée par Lothar Stramma à l’Université de Kiel
en Allemagne, a reconstitué et analysé les niveaux d’oxygène dans certaines zones des
océans tropicaux où in a collecté, depuis 1960, des données historiques de qualité
contrôlée.

Ils ont constaté depuis 1960 des réductions de la concentration d’oxygène minimale et
une expansion verticale des OMZ, Zone de Minimum d’Oxygène = ZMO, dans trois
secteurs de l’Océan Atlantique tropical.

Le plus frappant est observé dans la région
pauvre en oxygène de l’Atlantique Nord tropical (10o à 14o N, 20° à 30° W), où les valeurs
de base d’oxygène dans l’OMZ ont diminué et où l’OMZ s’est développée verticalement
avec le temps. L’étendue verticale de la couche avec une concentration en oxygène de
90 m mol / kg a augmenté de 85 pour cent, à partir d’une épaisseur de 370 m en 1960,
jusqu’à 690 m en 2006.

De même ordre, mais moins frappants, sont les changements
survenus dans l’OMZ du centre de l’Océan Atlantique équatorial (3o S à 3o N, 18° à 28° W),
et dans la zone tropicale de l’Atlantique Sud (14° à 8° S, 4° à 12o E).

Les OMZ des zones tropicales du Nord et du Sud de l’Océan Pacifique, atteignent des
niveaux suboxiques (et dans la plupart des régions privées d’oxygène, presque
anoxiques), de sorte qu’il est difficile de détecter de nouveaux changements, d’autant
plus que les données disponibles sont trop rares.

Dans l’Océan Indien, les plus faible valeurs en oxygène des OMZ ne sont pas situées
dans l’Est tropical, comme dans les Océans Atlantique et Pacifique, mais au nord dans la
mer d’Arabie et dans le golfe du Bengale.

En outre, les concentrations minimum d’oxygène dans les OMZ de l’océan Indien sont
généralement plus profondes (près de 800 m) que dans les deux autres océans. Les
teneurs en oxygène dans les OMZ sont suboxiques et les données sont trop éparses pour
révéler tout changement à long terme.

Le déclin du phytoplancton a-t-il un rapport avec les teneurs en oxygène dans les eaux des océans ?

Il a été observé que les teneurs en oxygène sont en baisse de 0,09 à 0,34 m mol / kg /
an, à des profondeurs de 300 à 700 mètres dans l’étude de reconstitution [1], soit un peu
moins que les teneurs signalées précédemment dans le Pacifique Nord, à 100 à 400 m de
profondeur [4], qui ont été de 0,39 à 0,7 m mol / kg / an. Ces tendances menacent non
seulement les écosystèmes marins et les activités de pêches, mais elles ont également
un impact négatif sur le cycle du carbone et sur le réchauffement de la planète.

Mais il peut y avoir une cause plus fondamentale de la diminution des teneurs en
oxygène dans les océans qui n’a pas été mentionnée dans les études citées
précédemment : c’est la défaillance du phytoplancton dans les océans pour régénérer
l’oxygène par la photosynthèse.

Dans les océans, le phytoplancton est en grande partie responsable de la productivité
primaire qui soutient toute la chaîne alimentaire marine et qui compte pour environ la
moitié de la production primaire de la photosynthèse au niveau de la planète.

Le
phytoplancton ne représente pourtant que 0,2 pour cent de la biomasse produite au
niveau mondial [5]. C’est parce que le phytoplancton se développe plus de mille fois plus
rapidement que les plantes vertes sur les sols terrestres, en se renouvelant en 2 à 6
jours, par rapport à un renouvellement moyen d’environ 19 ans chez les végétaux
croissant et se développant sur la terre ferme.

Cependant, le réchauffement et l’acidification des océans ont gravement endommagé le
phytoplancton [6] (voir Shutting Down the Oceans Act III : Global Warming and Plankton ;
Snuffing Out the Green Fuse et d’autres articles dans cette série parus dans la revue ,
Science in Society N° 31).

La respiration augmente plus rapidement dans l’écosystème océanique que la
photosynthèse, transformant une grande partie dans les océans en source de carbone
au lieu de puits de carbone [7] ( Oceans Carbon Sink or Source , SiS 31).

Cela est corroboré par l’inquiétante tendance à la baisse dans les océans de la
productivité primaire. Des études basées sur des mesures de la couleur de l’océan ont
montré que la productivité primaire nette (PPN) de l’océan, une mesure de la
croissance végétale en termes de carbone, a diminué, depuis les années 1980, de plus de
6 pour cent au niveau mondial [8].

Presque 70 pour cent du déclin global du paramètre PPN se sont produits dans les hautes
latitudes, au-dessus de 30 degrés. Dans ces hautes latitudes, les taux de croissance du
plancton ont diminué de 7 pour cent dans le bassin de l’Atlantique Nord, de 9 pour cent
dans le Nord du bassin du Pacifique, et de 10 pour cent dans l’Antarctique.

Cette tendance s’est poursuivie et elle est particulièrement forte dans les régions
tropicales [9]. La cause sous-jacente est la diminution de l’approvisionnement en
éléments nutritifs à la partie supérieure de la couche de mélange, car les changements
climatiques ont modifié la circulation océanique et la stratification verticale des couches
océaniques réduist les flux de nutriments.

La diminution de la productivité primaire des océans aura certainement des
répercussions sur la pêche. Une étude sur l’écosystème marin du plateau continental de
l’ouest de l’Amérique du Nord, publié en 2005, a révélé des liens étroits entre le
phytoplancton, le zooplancton et les poissons qui y résident, réduisant l’étendue des
régions à des zones très petites, de l’ordre de 10.000 kilomètres carrés [10].

Plus important encore que le phytoplancton, c’est la plus forte croissance des
organismes photosynthétiques sur la terre qui doit être considérée, car c’est littéralement
la limite vitale de toute la biosphère, à la fois terrestre et maritime, en termes de
régénération de l’oxygène.

Le déclin du phytoplancton peut causer une diminution simultanée de l’oxygène
atmosphérique ; cela s’ajoute à la quantité importante d’oxygène qui pourrait être prise
en compte et utilisée pour la combustion des carburants et des combustibles fossiles [11]
(voir O2 Dropping Faster than CO2 , Implications for Climate Policies , SiS 44).

Si le phytoplancton est affecté, nous pouvons nous attendre à des océans anoxiques et à
des extinctions massives des animaux vivants grâce à un appareil respiratoire, comme
cela s’est produit à la fin de l’époque géologique du Permien, il y a 251 millions
d’années ; mais, cette fois-ci, c’est l’espèce humaine qui sera comprise dans le nombre
des espèces disparues.

Définitions et compléments :


Traduction en français, définitions et compléments :
Jacques Hallard
, Ing. CNAM, consultant indépendant.

Relecture et corrections : Christiane Hallard-Lauffenburger, professeur des écoles
honoraire

Adresse : 19 Chemin du Malpas 13940 Mollégès France

Courriel : jacques.hallard921@orange.fr

Fichier : Eau Warming Oceans Starved of Oxygen ISIS French.4
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PDF (Traduction en français, définitions et compléments ) sur demande à yonne.lautre@laposte.net