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"Le ‘Prime Editing’, un nouvel outil d’édition génétique, résoudra-t-il les problèmes rencontrés avec l’édition du génome ?" par GMWatch

Traduction et compléments de Jacques Hallard

mardi 12 novembre 2019, par GMWatch


ISIAS Génétique

Le ‘Prime Editing’, un nouvel outil d’édition génétique, résoudra-t-il les problèmes rencontrés avec l’édition du génome ? Maintenant que cette nouvelle technique en la matière, supposée plus précise, est apparue, les promoteurs d’OGM reconnaissent que la technologie CRISPR est ’maladroite et sujette à des erreurs’.

Ajout : La notion d’Édition en biologie y compris les modifications de base

L’article d’origine a été publié le 01 novembre 2019 par GMWatchsous le titre « Will prime editing solve the problems of gene editing ? » et il est accessible sur ce site : https://www.gmwatch.org/en/news/latest-news/19201-will-prime-editing-solve-the-problems-of-gene-editing

Une nouvelle technique d’édition de gènes a suscité l’enthousiasme des cercles favorables aux OGM, partant du principe qu’elle pourrait résoudre les problèmes d’effets inattendus et d’erreurs causés par l’outil d’édition du génome CRISPR. GMWatch a constaté que cet enthousiasme est prématuré, car la nouvelle technique est toujours sujette aux erreurs et on se demande si elle sera même utilisée pour développer des plantes et des aliments génétiquement modifiés (OGM).

[D’après Wikipédia, « L’édition génomique ou modification localisée de séquence génomique (genome editing pour les anglophones) regroupe un ensemble de techniques de manipulation du génome visant à la modification du matériel (et donc de l’information) génétique. Ces techniques sont plus précises et ciblées que les techniques OGM historiques qui voient ces organismes transformés par transgenèse qui introduit des modifications génétiques au niveau d’un site « au hasard » dans le génome. Les termes « édition génomique » ou « édition du génome », bien que couramment employés, sont à éviter car contrairement au mot anglais « editing », le mot « édition » ne signifie pas « modifier, corriger, retoucher ». L’expression « édition génétique » est aussi à éviter car ayant un autre sens1. Ces techniques peuvent être appliquées aux plantes, aux animaux2, aux champignons et aux organismes unicellulaires, procaryotes ou eucaryotes. Certains laboratoires proposent aussi de les appliquer au génome humain… » - Article complet sur ce site : https://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89dition_g%C3%A9nomique ].

La nouvelle technique, appelée en anglais
‘Prime Editing’, a été décrite dans un article de la revue ‘Nature’ (voir résumé ci-dessous). Les auteurs décrivent ‘Prime Editing’ comme une ’méthode d’édition du génome polyvalente et précise’ qui ’élargit considérablement la portée et les capacités de l’édition du génome, et pourrait en principe corriger environ 89% des variants génétiques humains pathogènes connus’.

Un article du journal ‘Guardian’ décrit comment David Liu et Andrew Anzalone du ‘Broad Institute of MIT’ et de Harvard à Cambridge, dans le Massachusetts, ont créé la technique ‘Prime Editing’ en donnant une refonte à l’outil de modification du génome CRISPR. Au lieu de couper le double brin de l’ADN, comme dans CRISPR, la nouvelle technique ‘Prime Editing’ ne coupe qu’un seul brin, puis introduit une nouvelle section de l’ADN à la position spécifiée. L’intention est de contourner les mécanismes de réparation de la cellule, qui, après que l’outil d’édition de gènes CRISPR ait coupé le double brin initial dans l’ADN, peuvent apporter des modifications inattendues en insérant ou en supprimant des sections d’ADN sur les sites de coupe.

Bien que l’article de ‘Nature’ se concentre sur les applications de la technique des thérapies géniques, le ‘Guardian’ cite Robin Lovell-Badge, un promoteur de la dérégulation de l’édition de gènes, affirmant qu’elle pourrait être appliquée au génie génétique des plantes et des animaux.

[Selon Wikipédia, « La thérapie génique ou génothérapie est une stratégie thérapeutique qui consiste à faire pénétrer des gènes dans les cellules ou les tissus d’un individu pour traiter une maladie. La thérapie génique vise à remplacer ou complémenter un allèle mutant défectueux par un allèle fonctionnel ou à surexprimer une protéine dont l’activité aurait un impact thérapeutique… » - Article complet sur ce site : https://fr.wikipedia.org/wiki/Th%C3%A9rapie_g%C3%A9nique ].

Lovell-Badge ne perd pas l’occasion d’utiliser le nouveau document pour étayer son message de lobbying selon lequel les plantes cultivées modifiées génétiquement devraient être exemptées de la réglementation sur les OGM, déclarant que « parce que la procédure peut apporter au moins des modifications naturelles aux plantes, certaines plantes issue de la technique ‘Prime Editing’ ne doivent pas être réglementées ni considérées comme « génétiquement modifiées (OGM) ».

Cependant, personne n’a encore prouvé que l’édition du génome pouvait entraîner exactement les mêmes changements, du point de vue de la séquence génétique, que la sélection naturelle. Donc, Lovell-Badge s’est écarté de la preuve scientifique pour faire et publier cette déclaration.

Nouvelle technique, anciennes revendications

Ce qui est fascinant dans le battage publicitaire qui règne à propos de la technique ‘Prime Editing’, c’est que nous avons observé les mêmes revendications successives en matière de précision et de sécurité de la part de chaque technologie nouvelle qui concernait les OGM, suivies de réalisations trop prévisibles, selon lesquelles elle n’est pas, après tout, aussi si précise que cela.

Dans les années 1990, il s’agissait de techniques de modification génétique transgénique qui étaient supposées être plus ’précises’ et ’prévisibles’ que la sélection naturelle. Mais au fil des ans, les preuves des effets imprévisibles de la transgénèse se sont construites. Les OGM de première génération ont sombré sous le déluge de résultats inquiétants d’études sur l’alimentation des animaux : riz doré génétiquement modifié (OGM) à croissance retardée et morphologiquement mal formé, super-mauvaises herbes résistantes aux herbicides et organismes nuisibles ayant développé une résistance aux toxines insecticides génétiquement modifiées, etc...

[D’après Wikipédia, « La transgenèse1,2,3,4, ou transgénèse5,6 est le fait d’incorporer un ou plusieurs gènes dans le génome d’un organisme vivant. Ce transgène pourra être exprimé dans l’organisme transformé. Stratégie servant initialement aux chercheurs pour étudier la fonction des gènes, cette approche est également utilisée par les industries pharmaceutique et agro-alimentaire. Elle est entre autres la nouvelle stratégie d’obtention de variétés végétales ou animales résistantes au stress biotique (parasites, insectes) ou abiotique (sécheresse, faible luminosité). Ces nouvelles variétés sont généralement regroupées sous le terme d’organismes génétiquement modifiés (OGM)4. Les transformations génétiques d’organismes unicellulaires ou de virus sont relativement simples à aborder. Elles font appel à des techniques nettement plus complexes pour les animaux et végétaux… » - Article complet sur ce site : https://fr.wikipedia.org/wiki/Transg%C3%A9n%C3%A8se ].

[Voir aussi l’étude L’inventaire (transgénique) à la Prévert version PDF par Christophe NOISETTE - Date de rédaction / mise à jour : 18 janvier 2019 – « Au-delà des agrocarburants, les organismes génétiquement modifiés (OGM) sont utilisés pour de nombreux autres usages non alimentaires : textile, encres végétales, bioplastiques, feux d’artifices… et armes biologiques…] – A lire sur ce site : https://www.infogm.org/6667-inventaire-transgenique-a-la-prevert ].

Suite de l’article traduit

Puis, lorsque les techniques d’édition de gènes telles que CRISPR sont arrivées, elles ont été présentées comme le sauveur avec la toute nouvelle technologie de modification génétique présentée.

Le lobby des OGM et les médias pro-OGM ont fait valoir que les techniques d’édition du génome étaient plus précises par rapport aux transgénèses désordonnées antérieures, que les plantes cultivées et les animaux modifiés de cette manière étaient identiques à ce que l’on pouvait trouver dans la nature et que ces techniques devaient donc être déréglementées. Cependant, même au milieu de ces messages émanant du lobbying actif, de nombreuses preuves ont montré que la technique CRISPR n’était finalement pas aussi précise, et qu’elle pouvait entraîner des modifications non intentionnelles du génome, à la fois sur des sites non ciblés du génome et sur le site de montage prévu.

Ces problèmes sont maintenant admis, même dans des revues telles que ‘Nature’, qui stimulent et encouragent les travaux et les publications sur les OGM. Un article paru dans la revue, qui publie un article sur la nouvelle étude sur la technique ‘Prime Editing’, est ainsi rédigé : « Malgré la facilité avec laquelle le très populaire outil d’édition des gènes CRISPR – Cas9 modifie les génomes, il reste encore un peu maladroit et sujet à des erreurs et à des effets non intentionnels. La méthode alternative, appelée ‘Prime Editing’, améliore les chances pour les chercheurs de n’obtenir que les modifications souhaitées, au lieu d’un mélange de modifications génétiques qu’ils ne peuvent pas prédire ».

Juste une question de temps

Bien sûr, ce n’est qu’une question de temps avant que des problèmes ne se posent également avec la technique ‘Prime Editing’. En raison du fait que les gènes fonctionnent dans des réseaux d’interactions et non pas en tant qu’entités individuelles, vous ne pouvez pas modifier un ou plusieurs gènes et vous attendre à ce qu’il n’y ait pas d’effets secondaires !

[Voir l’article Bound to fail : The flawed scientific foundations of agricultural genetic engineering (part 2) - Details - Published : 21 November 2018 - The new understanding of “omnigenics” tells us GM food and crop technology is conceptually flawed – and genome editing won’t change that, writes Dr Michael Antoniou].

Une autre technique, l’édition de bases, a déjà été présentée comme un moyen d’introduire des modifications dans les gènes tout en évitant les effets inattendus, tels que de grandes délétions ou des réarrangements, pouvant résulter des processus de réparation de l’ADN consécutifs à la rupture de l’ADN à double brin induite par CRISPR. Mais l’édition de base s’est avérée introduire plus de mutations indésirables que prévu dans les embryons de souris et les plants de riz.

[Consulter aussi notre ajout : La notion d’Édition en biologie y compris les modifications de base ].

[Voir l’article CRISPR spin-off causes unintended mutations in DNA - Details - Published : 13 March 2019 – « DNA base editors not as safe as previously thought… »].

Tapage médiatique autour de tout cela

Il est naturel que les auteurs de l’article publié par la revue ‘Nature’ souhaitent que leur découverte apparaisse sous le meilleur jour possible. Comme l’indique la déclaration ’d’intérêts concurrents’ dans le document, « les auteurs du Broad Institute ont déposé des demandes de brevet pour la technique ‘Prime Editing’. DRL [David Liu] est consultant et cofondateur de ‘Prime Medicine’, de ‘Beam Therapeutics’, de ‘Pairwise Plants’ et de ‘Editas Médecine, toutes ces entreprises qui utilisent l’édition du génome ».

Cependant, ils ont le mérite de ne pas exagérer leurs réalisations dans le nouveau journal, ni de minimiser les problèmes techniques. Le Dr Michael Antoniou, généticien moléculaire et spécialiste de la thérapie génique, a commenté ainsi :

« La technique ‘Prime Editing’ est une façon de faire élégante mais complexe, faisant intervenir plusieurs composants et manipulations moléculaires. Les auteurs soulignent qu’il faut encore beaucoup de travail avant de pouvoir l’utiliser en clinique. Il reste encore trop de bugs et d’inconnues ».

« Ils ne font pas de bruit, mais permettent aux données de parler. L’exagération réside dans la couverture médiatique. Les auteurs reconnaissent les limites actuelles et les lacunes dans les connaissances à ce stade.

Par exemple, ils affirment que la technique produit à la fois des effets indésirables au niveau du site ciblé mais aussi des effets non ciblés. Ils ont trouvé un nombre moins élevé d’effets effets indésirables non ciblés avec la technique ‘Prime Editing’ qu’avec l’emploi des outils CRISPR standard, mais ils ne l’ont pas comparé aux systèmes CRISPR de la dernière génération, plus fidèles, et qui ont déjà nettement réduit les effets non ciblés, comparativement à la technologie CRISPR-Cas9 de la première génération, qui était très sujette à des coupures non ciblées, et qui se sont avérés de loin supérieurs. Cependant, il en sera toujours ainsi lorsque des comparaisons seront effectuées avec des systèmes CRISPR plus avancés et présentant une plus haute fidélité.

« En outre, bien que la fréquence des modifications hors cible observée après usage de la technique ‘Prime Editing’ soit bien inférieure à celle observée lorsqu’ils utilisaient les outils d’édition CRISPR-Cas pour créer le même événement d’édition, ils ont néanmoins assisté à des éditions hors cible avec ‘Prime Editing’ lors de chacune des manipulations d’édition qu’ils ont testées ».

« Ces effets non ciblés variaient selon l’outil principal utilisé et le gène ciblé. Dans trois cas, leur nombre était faible (0,1% ou moins des sites connus comme non ciblés), mais dans un cas, 2,5% plus ou moins 5,2% (donc jusqu’à 7,7%), des sites connus non ciblés ont été mutés ».

« De plus, à des degrés variables, en fonction de l’outil ‘Prime Editing’ utilisé et du gène ciblé, des ‘indels’ (insertions ou suppressions involontaires de petites portions d’ADN) ont toujours été trouvées. La fréquence de formation de l’indel ciblé était comprise entre 0,3% et 5% du total des modifications génétiques effectuées lorsque les auteurs ont tenté de corriger une mutation génétique du gène ciblé ».

[Selon Wikipédia, « Indel est un mot-valise utilisé en génétique et en bio-informatique pour désigner une insertion ou une délétion dans une séquence biologique (acide nucléique ou protéine) par rapport à une séquence de référence. On peut observer en particulier mettre en évidence des indels lorsqu’on effectue des comparaisons au moyen de programmes d’alignement de séquences. Le terme indel a été introduit parce que la notion d’insertion ou de délétion est relative suivant le choix de la séquence utilisée comme référence : à une insertion dans une séquence correspond une délétion dans la séquence qui lui est comparée. Indel permet ainsi de désigner globalement la variation biologique, sans préjuger de quelle séquence constitue la référence. Le mot indel a été inventé par le mathématicien Joseph Kruskal1. Les indels sont la conséquence de mutations génétiques donnant lieu à des variations de séquence, soit au sein de la même espèce (c’est un exemple de variation allélique), soit entre espèces, au cours de l’évolution. On estime par exemple que le génome humain contiendrait environ 500 000 sites polymorphiques correspondant à des indels2… » - Article complet à lire sur ce site : https://fr.wikipedia.org/wiki/Indel ].

Suite la traduction de l’article d’origine

« Les auteurs reconnaissent une lacune importante dans les connaissances actuelles, dans la mesure où ils n’ont examiné que les sites hors cible connus pour les gènes qu’ils ont essayé de modifier. Ils n’ont pas procédé à une analyse génomique complète pour identifier l’ensemble des résultats attendus ».

« Cependant, ils ont obtenu une bonne efficacité de l’édition : dans certains cas, plus de 50% des sites ciblés ont été modifiés de la manière souhaitée. Mais en raison du faible mais important degré de mutations hors cible, ainsi que de la formation de l’indel sur la cible, la technique ‘Prime Editing’ n’est pas prête pour l’annonce des applications de thérapie génique « aux heures de grande écoute », comme l’ont reconnu les auteurs. Sa précision doit être considérablement améliorée avant de pouvoir être envisagée pour une utilisation clinique ».

« Pourquoi ? Supposons que vous entrepreniez une thérapie génique ciblant les cellules souches de la moelle osseuse, par exemple pour la drépanocytose. Cela impliquerait l’édition en amont de millions de cellules et leur restitution au patient. Même une faible fréquence d’évènements non ciblés ou la formation d’indels hors cible peuvent induire la génération de milliers de cellules porteuses d’une mutation indésirable et qui peuvent être renvoyées au patient. Dans le pire des cas, si la fonction concerne un oncogène, qui régule la croissance cellulaire normale, est affectée, elle pourrait évoluer vers un état cancéreux ».

Quelques problèmes sont évités, mais pas tous

Des articles précédents diffusés par GMWatch ont soulevé la question des résultats imprévisibles au niveau de la cible, causés par le processus de réparation de l’ADN connu sous le nom d’assemblage d’extrémité non homologue (NHEJ). NHEJ est activé afin de réparer les extrémités coupées de la molécule d’ADN, une fois que le CRISPR a cassé son ADN double brin.

[Pour Wikipédia, « La jonction d’extrémités non homologues (en anglais Non-Homologous End-Joining ou NHEJ) est un mécanisme de réparation de l’ADN qui permet de réparer des lésions provocant des cassures double brin (CDB). C’est un mécanisme non-conservatif (contrairement par exemple à la réparation par recombinaison) c’est-à-dire qu’il ne restaure pas la séquence initiale de l’ADN ; mais seulement la continuité de l’ADN endommagé par une cassure double brin. Cette réparation conduira ainsi au changement de l’information génétique, en général une délétion, et donc possiblement à l’apparition d’une mutation pour le gène concerné si la cassure survient à l’intérieur d’un gène. Cette réparation est possible grâce à l’intervention de la protéine Ku70/80 (dimère entre deux sous-unités : Ku70 et Ku80) qui va interagir avec les deux extrémités d’ADN résultant de la cassure. Cette protéine va ensuite agir par essais et erreurs pour tenter d’établir une interaction transitoire entre les deux extrémités d’ADN. Pour cela, Ku possède plusieurs activités :

  • activité nucléase : élimination des nucléotides endommagés par la cassure et incompatibles avec la ligature des extrémités. En particulier Ku permet de produire des extrémités 5’-phosphate et 3’-OH compatibles avec la suture des brins par l’ADN ligase.
  • Recrutement d’autres protéines impliquées dans la réparation : Une protéine-kinase ADN dépendante (DNA-PK), une ADN ligase spécifique, une terminal-transférase.
    À chaque fois, la protéine Ku70/80 vérifie si l’hybridation est possible et si oui, c’est-à-dire s’il y a homologie de 2 à 4 bases, la jonction est stabilisée et la cassure a été transformée en deux lésions simple brin. Il y a alors comblement des éventuels régions simple brin restantes par une ADN polymérase qui prend comme matrice le brin d’ADN qui vient d’être réparé par la protéine Ku. Ku recrute également une ADN ligase spécifique (ADN ligase IV chez les eucaryotes, ADN ligase D chez les bactéries) qui suture les brins en reformant les liaisons phopshodiester clivées. Lorsque les extrémités de la cassure du brin ne sont pas nettes, la protéine Artemis va agir en supprimant quelques bases. Son activité endonucléase est aidée par la transférase terminale TdT et va rendre possible la suture des brins par l’ADN ligase. C’est lors de ce processus dit ’processus de fin’ que certaines bases peuvent être détruites et ainsi mener à des mutations. La continuité initiale du chromosome a ainsi été réparée mais sa séquence nucléotidique est changée par cette réparation biochimique : il y a donc introduction d’une mutation consécutive à la réparation. Le mécanisme de réparation par jonction d’extrémités non-homologues est impliqués dans la formation de la diversité du répertoire d’anticorps, au travers d’un mécanisme appelé recombinaison V(D)J. Les souris déficientes dans la jonction d’extrémités non-homologues ont ainsi un phénotype d’immunodéficience sévère. Voir aussi : Réparation de l’ADN Recombinaison génétique Recombinaison V(D)J – Source : https://fr.wikipedia.org/wiki/Jonction_d%27extr%C3%A9mit%C3%A9s_non_homologues ].

Le Dr Antoniou a expliqué : « La technique ‘Prime Editing’ ne fait pas de cassures à double brin et n’active donc pas la voie de réparation NHEJ. Ainsi, certains types de résultats indésirables sur la cible, tels que les grandes délétions et les réarrangements de l’ADN, sont évités. Cependant, étant donné que la nature de la technique ‘Prime Editing’ dans sa forme actuelle aboutit toujours à la formation d’indels sur le site édité, même à une faible fréquence : il peut en résulter une modification de la séquence du gène ciblé de manière à produire un nouvel ARNm (ARN messager) et des protéines avec des conséquences inconnues.

« Si la technique ‘Prime Editing’ était appliquée aux plantes, il est fort probable que les mêmes résultats indésirables, décrits dans la nouvelle publication, se produiraient à la fois sur les sites ciblés et non ciblés. Ceux-ci seraient au-delà des mutations du génome causées par la culture tissulaire et le processus de transformation par modification génétique (OGM), qui seraient utilisés pour introduire l’outil de ‘Prime Editing’ dans des cellules végétales ».

« En conclusion, bien que le potentiel de la thérapie génique pour la technique ‘Prime Editing’ soit important, il est douteux qu’elle offre quelque chose au monde de la biotechnologie végétale. Cela résout certains problèmes, mais pas tous ».

GMWatch pourrait ajouter qu’il est également douteux que les biotechnologues spécialistes des plantes se donnent la peine d’utiliser cette technique complexe d’édition de gènes. Il semble probable qu’ils continueront à utiliser les outils d’édition CRISPR standard moins précis, et impliquant la formation de cassures d’ADN à double brin - et qu’ils continueront simplement à éliminer les plantes présentant des résultats de mutation indésirables non ciblés.

Le problème avec cette approche est que les ingénieurs en phytogénétique veillent principalement à ce que la plante se développe bien et ait l’air en bonne santé. Ils ne soumettent pas le végétal aux tests nécessaires pour s’assurer que l’événement de montage n’a pas conduit à la production de toxines ou d’allergènes. Ils ne garantissent pas non plus que la plante cultivée sera sans danger pour la faune pendant la culture au champ ».

Il serait donc prématuré, voire irresponsable, d’utiliser la technique ‘Prime Editing’ comme la simple raison de soutenir et d’encourager le lobbying en faveur de la déréglementation de l’édition génétique dans les plantes vivrières et pour les animaux d’élevage.

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La nouvelle étude :

Search-and-replace genome editing without double-strand breaks or donor DNA (Edition du génome par recherche et remplacement sans rupture de double brin ni de l’ADN de donneur) - Andrew V. Anzalone, Peyton B. Randolph, Jessie R. Davis, Alexander A. Sousa, Luke W. Koblan, Jonathan M. Levy, Peter J. Chen, Christopher Wilson, Gregory A. Newby, Aditya Raguram & David R. Liu - Nature (2019) - https://www.nature.com/articles/s41586-019-1711-4

Résumé

La plupart des variants génétiques qui contribuent à la pathologie (1) sont difficiles à corriger efficacement et sans excès de sous-produits (2–5). Nous décrivons ici la technique ‘Prime Editing’, une méthode d’édition du génome qui est polyvalente et précise, et qui écrit directement de nouvelles informations génétiques dans un site ADN spécifié à l’aide d’un Cas9, déficient catalytiquement , fusionné avec une transcriptase inverse modifiée, programmé avec un guide ‘Prime Editing’, l’ARN (pegRNA), qui spécifie le site cible et code pour l’édition souhaitée.

Nous avons effectué plus de 175 modifications dans des cellules humaines, y compris des insertions ciblées, des délétions et les 12 types de mutations ponctuelles, sans nécessiter de cassures double brin, ni de matrices d’ADN donneur. Nous avons appliqué le traitement principal aux cellules humaines pour corriger efficacement et avec peu de sous-produits les principales causes génétiques de la drépanocytose (nécessitant une transversion dans HBB) et de la maladie de Tay-Sachs (nécessitant une suppression dans HEXA), afin d’installer une transversion protectrice dans le PRNP, et d’insérer divers marqueurs et épitopes, précisément dans les locus cibles.

Quatre lignées cellulaires humaines et des neurones corticaux primaires de souris post-mitotiques prennent en charge la technique ‘Prime Editing’ avec des efficacités variables. La technique ‘Prime Editing’ offre des avantages en termes d’efficacité et de pureté du produit par rapport à la réparation dirigée par l’homologie, des forces et des faiblesses complémentaires par rapport à l’édition de base, et une édition hors cible nettement inférieure à celle de la nucléase Cas9 sur des sites hors cible connus de Cas9.

La technique ‘Prime Editing’ étend considérablement la portée et les capacités de l’édition du génome et elle pourrait, en principe, corriger environ 89% des variants génétiques humains qui sont connus comme étant pathogènes.

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La notion d’ Édition en biologie selon un article Wikipédia

L’édition est une modification post-transcriptionnelle des ARN changeant la séquence codante existant au niveau de l’ADN. Elle peut se dérouler pendant la transcription ou de manière post-transcriptionnelle. Ce terme recouvre trois événements différents : l’addition de nucléotide(s), le remplacement d’une base ou la modification d’une base au niveau de l’ARN. Le processus d’édition a été découvert initialement chez les mitochondries des trypanosomes1.

Définition

L’édition est un phénomène biologique qui permet à la cellule de modifier la séquence de l’ARNm après la transcription. La séquence polypeptidique qui résultera de la traduction de cet ARNm ne correspond donc pas à la séquence exacte du gène correspondant. C’est une forme de régulation post-transcriptionnelle, ou de maturation de l’ARN.

Historique

Le processus de correction a d’abord été observé sur les ARN, en 1986 chez des organismes unicellulaires flagellés, les trypanosomes2. Selon C.Marchand (2009) 3 « on définit par édition des ARN, l’ensemble des processus qui produisent des transcrits dont la séquence et l’information sont différentes de celles portées par le gène correspondant. Ces altérations peuvent être des insertions/délétions de bases ou des modifications de bases par désamination. Elles peuvent conduire à des changements d’acides aminés, la création de codons d’initiation ou de terminaison de la traduction, la création de nouveaux cadres de lecture. L’édition peut aussi influer sur la maturation ou l’épissage des ARN. Cette découverte du processus d’édition des ARN a été fondamentale, dans la mesure où elle a remis en question le dogme selon lequel l’information contenue dans le génome est transmise de manière linéaire jusqu’aux protéines ».

Le même processus a été découvert plus récemment dans les ADN, y compris chez l’homme où une famille d’enzymes dits APOBEC3, peut modifier l’ADN (par désamination, observée tant sur les ARN que sur les ADN).

Ces enzymes sont donc mutagènes et en tant que tels sont un danger pour la cellule, mais le processus - tant qu’il est contrôlé par l’organisme - semble être l’un des mécanismes de défense cellulaire : selon Harris et al. (2002)4 et Petersen-Mahrt & Neuberger, 20035, il permet d’éviter l’invasion du génome humain par des gènes exogènes. L’enzyme n’agit pas seul mais avec l’aide d’une ou plusieurs protéines qui l’aident à cibler le point de l’ADN où il agira (« l’ensemble formant un complexe appelé éditosome »3.

Modifications de base

Adénosine en Inosine

L’édition est effectuée par une enzyme nommée ’Adenosine Deaminase Acting on RNA’ (ADAR). Cette famille de protéine, recouvrant ADAR1, ADAR2 et ADAR3 agit sur les ARN double brin en forme d’épingle à cheveux, en transformant l’adénine (A) en Inosine (I). L’inosine n’est pas une base classique, elle sera reconnue comme un G par la machinerie cellulaire (régulation post-trancriptionnelle, traduction, etc)6.

Cytidine en Uridine

Ce type d’édtion des ARN se caractérise par la modification de cytosine (C) en uracile (U) dans la séquence de l’ARN. L’édition C vers U est présente dans les différents compartiments subcellulaires exprimant un génome (Noyau, Mitochondries, Chloroplastes). Également elle est retrouvée dans différents clades. Étonnamment, l’édition C vers U est effectuée par des mécanismes moléculaires différents d’un clade à un autre.

Chez les mammifères

Mis en évidence pour la première fois en 19877,8, l’édition d’un codon CAA (Q, Glutamine) en codon UAA (Stop) de l’ARNm de ApoB (dans le noyau) permet l’obtention de deux protéines : ApoB100 (dans le foie) et ApoB48 (dans l’intestin) plus courte. Le complexe protéique réalisant cette réaction d’édition est composé deux protéines : une cytidine désaminase (Apobec-1) et un co-facteur liant l’ARN (ACF, Apobec-1 complementation factor)9.

Chez les plantes terrestres

Chez les plantes terrestres, l’édition C vers U n’est retrouvée que dans les organites à génome (Chloroplastes et Mitochondries). Découvert en 1989 dans la mitochondrie du blé10,11 et d’Oenothera12. Puis en 1991 dans le chloroplaste du maïs13. C’est dans ce groupe qu’on retrouve le plus grand nombre de sites d’édition (i.e. de Cytosines éditées), l’espèce modèle Arabidopsis thaliana possède plus de 40 sites chloroplastiques et plus de 600 sites mitochondriales14. Le complexe protéique effectuant l’édition dans les organites des plantes terrestres (ou ’editosome’) est composée de nombreux acteurs, comme les protéines à motifs PPR, les protéines MORF/RIP, les protéines ORRM14,15. Le plus remarquable dans cet éditosome est sa grande flexibilité de composition. En effet, en fonction du site d’édtion, les protéines requises sont différentes. Les protéines à motifs PPR jouent le rôle de facteurs de spécificités en se liant à l’ARN, les autres (MORF/RIP, ORRM) sont des co-facteurs plus généraux (participant à l’édition de nombreux sites) dont la fonction n’est pas encore très bien comprise. L’enzyme catalysant cette réaction demeure inconnue mais de nombreux travaux, se basant sur la phylogénie et l’étude de mutants, suggèrent que c’est le domaine DYW porté par certaines protéines PPR qui joue ce rôle16,17,18,19.

Uridine vers Cytidine

L’enzyme uripidique va changer ce nucléotide U en C après la transcription.

Article complet avec notes et références sur ce site : https://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89dition_(biologie)

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Un nouvel outil d’édition génétique : le Prime Editing 22/10/2019 4 minutes – Enregistrement dans le cadre des émissions de France Culture
Savoirs
Le Journal des sciencespar Natacha Triou le vendredi de 16h à 16h10

Un nouvel outil d’édition génétique plus précis que les ciseaux moléculaires CRISPR-Cas9 et autres actualités scientifiques. Photo - Crédits : Fairfax Media - Getty

Un nouvel outil d’édition génétique a été présenté hier dans la revue Nature. Il n’a pas encore de traduction française mais il s’appelle le Prime editing. C’est une équipe américaine qui a imaginé cette technique, qui serait plus performante et surtout plus précise que celle des ciseaux moléculaires CRISPR-Cas9. Elle est toujours en phase expérimentale mais selon les premiers résultats, les modifications génétiques de cellules humaines in vitro ont eu des taux de réussite plus élevés que n’importe quel autre outil d’édition génomique. CRISPR-Cas9 fonctionne avec l’utilisation de Cas9, une nucléase guidée par un petit ARN qui agit comme un ciseau en coupant l’ADN à un endroit précis afin de modifier une séquence, mais sa principale limite réside justement dans cette cassure. En effet, une cassure ADN peut générer des effets indésirables hors cible, des effets off target, en introduisant des mutations non désirées dans le génome. Pour éviter cela, les chercheurs ont combiné l’enzyme Cas9 à une autre protéine.

Interview avec David Bikard, biologiste et responsable du laboratoire de biologie de synthèse à l’Institut Pasteur. Il trouve cette étude ingénieuse. Écouter 1 minute LA_METHODE_SCIENTIFIQUE - David Bikard

À écouter aussi 58 min > La Méthode scientifiqueCrispr-Cas9 : le ciseau moléculaire à la croisée des chemins

L’équipe de production : Natacha Triou

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Source : https://www.franceculture.fr/emissions/le-journal-des-sciences/le-journal-des-sciences-du-mardi-22-octobre-2019

Voir également : ’Prime editing’, un nouvel outil d’édition du génome encore plus précis que CRISPR Par Hugo Jalinière le 24.10.2019 à 11h32 Abonnés - Un nouvel outil d’édition du génome, le ’prime editing’, offre une précision plus fine et un meilleur contrôle des modifications de l’ADN par rapport au système CRISPR-Cas9… 

Compléments d’informations :

Nos travaux antérieurs sur CRISPR, l’édition en biologie et le forçage génétique sont accessibles respectivement chez ISIAS ici : https://isias.lautre.net/spip.php?page=recherche&recherche=crispr

et chez ’yonne lautre’  ici : https://yonnelautre.fr/spip.php?page=recherche&recherche=crispr

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Traduction avec ajout de compléments d’informations et intégration de liens hypertextes : Jacques HALLARD, Ingénieur CNAM, consultant indépendant 11/11/2019

Site ISIAS = Introduire les Sciences et les Intégrer dans des Alternatives Sociétales

http://www.isias.lautre.net/

Adresse : 585 Chemin du Malpas 13940 Mollégès France

Courriel : jacques.hallard921@orange.fr

Fichier : ISIAS Génétique Will prime editing solve the problems of gene editing French version.2

Mis en ligne par Pascal Paquin de Yonne Lautre, un site d’information, associatif et solidaire(Vie du site & Liens), un site inter-associatif, coopératif, gratuit, sans publicité, indépendant de tout parti.

http://yonnelautre.fr/local/cache-vignettes/L160xH109/arton1769-a3646.jpg?1510324931

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