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"La réglementation concernant les insectes transgéniques [OGM] est très insuffisante et présente un danger" par le Dr Mae-Wan Ho

Traduction et compléments de Jacques Hallard

vendredi 2 mars 2012, par Ho Dr Mae-Wan

ISIS OGM Insectes
La réglementation concernant les insectes transgéniques [OGM] est très insuffisante et présente un danger
Regulation of Transgenic Insects Highly Inadequate and Unsafe
L’USDA [Administration de l’Agriculture aux Etats-Unis] a créé un précédent dangereux avec un système de réglementation permissif pour la dissémination dans l’environnement des insectes transgéniques [organismes génétiquement modifiés ou OGM]. C’est cette réglementation d’origine américaine qui est maintenant adoptée partout dans le monde. Dr Mae-Wan Ho

Rapport de l’ISIS en date du 22/02/12
Une version entièrement référencée de l’original en anglais, intitulée Regulation of Transgenic Insects Highly Inadequate and Unsafe est accessible par les members de l’ISIS sur le site suivant http://www.i-sis.org.uk/Regulation_of_Transgenic_Insects.php
S’il vous plaît diffusez largement et rediffusez, mais veuillez SVP donner l’URL de l’original et conserver tous les liens vers des articles sur notre site ISIS

L’étude d’impact environnemental de l’USDA est "scientifiquement déficiente"

Tardivement, la communauté scientifique a pris conscience de l’état alarmant de la réglementation sur la dissémination dans l’environnement des insectes génétiquement modifiés ou transgéniques. Les scientifiques de l’Institut Max Planck de biologie évolutive à Plön en Allemagne ont évalué le processus réglementaire en détail : ils l’ont trouvé insatisfaisant dans un commentaire publié en janvier 2012 [1].

Cela fait plus de dix ans que l’Institut de la Science dans la Société ISIS s’est opposé à la dissémination dans l’environnement de papillons transgéniques des chenilles du ‘pink boolworm’ le ver rose du cotonnier, dissémination qui avait été proposée par le Département américain de l’Agriculture (USDA). ([2] Terminator insects give wings to genome invaders, ISIS report).

Au cours des 9 dernières années, 14 essais financés par le gouvernement ont pris place sur le terrain aux États-Unis ; ces essais concernaient un ravageur : la teigne génétiquement modifiée [OGM] du ‘pink boolworm’ le ver rose du cotonnier. Il n’y a pas eu de publication scientifique des données expérimentales pendant tout ce temps ; dans seulement deux cas, des documents ont été publiés pour les demandes de permis [1].

Lorsque les scientifiques allemands ont demandé des informations auprès de l’USDA sur les documents inédits, cela leur a été refusé et ils devaient présenter une demande d’accès à l’information. Mais aucun document fournissant les données expérimentales attendues ne sont arrivées, probablement parce que les données n’existaient pas, selon une procédure administrative qui permet aux autorités chargées de la rglementation aux Etats-Unis de s’appuyer sur des évaluations environnementales similaires qui ont été effectuées antérieurement, et que cette procédure est trop souvent appliquée.

Il n’est pas surprenant que la première déclaration d’impact environnemental (EIE) sur les insectes transgéniques, émise par le Département américain de l’Agriculture en 2008, ait été jugé [1] « scientifiquement déficiente », lors de l’examen des risques concernant l’environnement, en s’appuyant largement sur des données non publiées et en basant l’autorisation des disséminations sur seulement deux études de laboratoire portant sur la mouche méditerranéenne des fruits Ceratits capitata, qui est simplement l’une des quatre espèces traitées par le document. Les autres espèces sont le papillon du ‘ver rose’ du cotonnier Pectinophora gossypiella, les mouches des fruits mexicaines Anastrepha ludens et la mouche orientale des fruits Badrocera dorsalis. En fait, les mêmes déclarations EIS ont également affirmé « une certaine applicabilité » pour les moustiques transgéniques Aedes ou Anopheles.

La déclaration d’impact environnemental EIE fait un usage sélectif des « preuves » inédites, non examinées et non validées par des pairs, pour étayer les conclusions controversées, une pratique qui est explicitement interdite par la réglementation fédérale des États-Unis pour la rédaction de la déclaration d’impact environnemental EIE.

Un autre problème avec l’étude d’impact, c’est qu’il ne traite que de la technologie qui se rapporte à la première génération de l’insecte transgénique qui implique soit l’expression de marqueurs fluorescents pour surveiller la taille de la population, soit l’utilisation de répresseurs létaux dominants (RDL) pour tuer tous les descendants des individus relâchés dans l’environnement, ou encore tous les insectes femelles dans les programmes de libération, de lâchers dans la nature ne nécessitant que des insectes mâles, avec l’intention de réduire les effectifs des populations sauvages [3, 4] ((Terminator insects – a primer, Terminator Insects – The Killing of Females, rapports ISIS).

De nouvelles techniques destinées à remplacer les populations naturelles plutôt que de les réduire ne sont pas considérées. En outre, le document envisage de traiter toutes les modifications génétiques comme équivalentes, ce qui n’est certainement pas le cas, car certaines modifications génétiques sont plus efficaces, ou moins risquées que d’autres.

Néanmoins, cette étude d’impact environnemental très insuffisante émanant de l’APHIS et de l’USDA a donné le ton à une réglementation permissive des disséminations des insectes transgéniques dans le monde entier.

La dissémination mondiale des insectes transgéniques [OGM] est calquée sur le modèle de l’USDA (Administration de l’agriculture aux Etats-Unis)

Dans les dernières années, il y a eu plusieurs rejets dans l’environnement d’insectes transgéniques qui suivent le modèle américain de l’USDA.
Oxitec, une société britannique basée à Oxford, est en première ligne pour le développement des moustiques transgéniques afin de lutter contre les maladies infectieuses comme la dengue. Leur intention de procéder à une série internationale de lâchers de moustiques transgéniques sur le terrain, a été mise en lumière en Malaisie en 2008 ([5] Terminator Mosquitoes to Control Dengue ? SiS 39).

Bien que cette dissémination particulière ait été interrompue, la société a eu recours à des lâchers secrets et illégaux sur le terrain à travers le monde, avec des pratiques aidées et encouragées par les autorités qui sont normalement chargées de la réglementation.

Selon une information de l’ONG ‘les Amis de la Terre’ aux États-Unis [6], la première dissémination de moustiques transgéniques dans les champs par Oxitec a eu lieu entre 2009 et 2010 dans les îles Caïmans, un territoire britannique d’outre-mer, et ce lâcher était composé de 3 millions de moustiques.
La Malaisie fut le deuxième pays à accueillir des expériences de la société Oxitec à la fin de l’année 2010 avec plus de 6.000 moustiques transgéniques libérés dans la nature. Puis, entre février et juin 2011, plus de 33.000 moustiques ont été disséminés au Brésil.

Les premières disséminations sur les Îles Caïmans ont eu lieu dans le secret et sans aucune consultation publique, et sans faire appel au consentement éclairé. Il n’existe pas de lois de biosécurité qui s’appliquent dans les îles Caïmans, en dépit du fait que le Royaume-Uni est l’une des parties et membre du Protocole de Cartagena sur la biosécurité. De même, la dissémination en Malaisie de 2010 n’a été rendue publique que dans un communiqué de presse daté du 25 janvier 2011, soit plus d’un mois après qu’un procès ait débuté le 21 décembre 2010.
Alors que les autorités réglementaires des Îles Caïmans avaient omis de publier tous les documents réglementaires avant les lâchers des moustiques transgéniques, les autorités malaisiennes chargées de la réglementation avaient omis de citer des résultats d’expériences publiés dans leurs documents réglementaires [1].

Un document [7] intitulé : "Analyse des risques - Moustiques Aedes aegypti OX513A pour la libération potentielle sur les îles Caïmans (Grand Cayman)" a été téléchargé sur le site parlementaire du Royaume-Uni le 13 janvier 2011, soit plus d’un an après que les lâchers aient commencé, et seulement à la suite de questions qui avaient été posées à la Chambre des Lords. Il y est fait référence à des rapports non publiés et à d’autres sources douteuses pour étayer des affirmations clés [1], telles que « Les caractéristiques de Aedes aegypti OX413A ont été soigneusement évaluées par plusieurs institutions à travers le monde, par exemple en France, en Malaisie et en Thaïlande... », et plus loin que « OX513A utilise des méthodes génétiques, au lieu de rayonnements pour obtenir la stérilité des insectes, par conséquent les insectes génétiquement stériles ont été reconnus comme étant en meilleure forme et plus compétitifs .. »

La société Oxitec avait prévu de procéder à plus de lâchers de moustiques transgéniques dans les Florida Keys au début de 2012, mais les opérations ont été retardées [6], peut-être en partie à cause du tollé général que cela suscite.
Les autres pays qui ont eu à évaluer des lâchers d’insectes transgéniques sont la France, le Guatemala, l’Inde, le Mexique, le Panama, les Philippines, Singapour, la Thaïlande et le Vietnam [1].

Les dangers des moustiques transgéniques pour la santé et pour l’environnement sont ignorés

L’aspect le plus troublant du document de la société Oxitec, selon les scientifiques allemands, est [1] « l’absence de toute discussion sur les dangers environnementaux potentiels ou sur la santé qui sont spécifiques au stock de moustiques OX513A disséminés dans la nature ».

La construction particulière des répresseurs létaux dominants (RDL) dans les moustiques OX513A est conçue pour exprimer la protéine synthétique tTA à des niveaux très élevés, et les moustiques femelles qui piqueraient les humains, pourraient leur injecter cette protéine dans le sang avec des conséquences potentiellement néfastes.

Les moustiques femelles exprimant des niveaux élevés de tTA peuvent survenir si une résistance à la construction RDL évolue chez des formes sauvages, ou si les moustiques femelles transgéniques ne sont pas complètement exclues par le mécanisme de tri sélectif.

Plus important encore, les moustiques mâles OX513A sont connus pour n’être stériles que partiellement, et quand ils s’accouplent avec des femelles sauvages, ils vont produire de 2.8 à 4.2% du nombre normal d’œufs, dont la moitié sera des descendants femelles capables de piquer.

Un autre risque majeur est le risque de transfert horizontal de gènes à travers une mobilisation nouvelle des vecteurs dérivés de transposons qui sont utilisés dans la création des insectes transgéniques de la première génération : nous avions mis cela en évidence dans une présentation originale de l’ISIS à destination de l’l’USDA [2], et nous l’avons réitéré à plusieurs reprises depuis, et encore tout récemment [8] Can GM Mosquitoes Eradicate Dengue Fever (SiS 50) *.
* Version en français "Des moustiques génétiquement modifiés peuvent-ils éliminer la dengue ?", par Prof. Joe Cummins. Traduction et compléments de Jacques Hallard, 8 décembre 2010 - Dernier ajout 16 juillet 2011 ; accessible sur le site http://isias.transition89.lautre.net/spip.php?article13

Nous avons fourni la preuve que le vecteur désarmé piggyBac portant le transgène, même s’il est débarrassé au strict minimum des répétitions à ses extrêmités, n’en était pas moins capable de se répliquer et de se propager, parce que l’enzyme transposase permettant aux inserts PiggyBac de se déplacer peuvent être fournis par des transposons présents dans tous les génomes, y compris dans celui du moustique.

La principale raison pour l’utilisation de transposons comme vecteurs dans la lutte contre les insectes a d’abord été précisément parce qu’ils peuvent propager rapidement les transgènes dans une population selon des mécanismes non mendéliens : c’est à dire par des copies de réplication et des sauts, des migrations dans les génomes, ce qui se traduit par la distribution des caractères dans les populations d’insectes.

Toutefois, certains chercheurs scientifiques ont négligé le fait que les transposons peuvent également sauter dans les génomes des hôtes mammifères, y compris chez les êtres humains. Bien que chaque transposon ait sa propre enzyme transposase spécifique qui reconnaît ses répétitions terminales, la même enzyme peut également interagir avec les répétitions terminales des autres transposons, et il semble exister une vaste diaphonie entre les familles de transposons apparentés mais distincts, au sein d’un seul génome eucaryote.
L’utilisation du transposon piggyBac a connu des problèmes d’instabilité chez les moustiques Aedes aegypti génétiquement modifiés [9], d’une part, et de grands inserts en tandem instables du transposon piggyBac prévalaient [10], d’autre part. En dépit de l’instabilité et de la génotoxicité qui en résulte, le transposon piggyBac a été largement utilisé aussi dans la thérapie génique humaine [11].
Un certain nombre de lignées cellulaires humaines ont été transformées, y compris même des cellules primaires T humaines, à l’aide du transposon piggyBac [12]. Ces résultats ne nous laissent aucun doute sur le fait que les transgènes ayant un transposon à l’origine, chez les moustiques transgéniques, puissent faire l’objet d’un transfert horizontal de gènes dans les cellules humaines. Il a été mis en évidence que le transposon piggyBac peut induire des mutations d’insertion à échelle du génome entier, ce qui perturbe les fonctions des gènes.

Selon une habitude bien établie, les moustiques femelles A. aegypti s’accouplent avant de prendre par piqûre un premier repas de sang [13]. Ainsi, le sang humain vivant sera exposé au transposon piggyBac qui est porté par la femelle accouplée.

Que faudrait-il pour que le transposon transmis par les moustiques soit activé et vienne infecter le sang humain ? Joe Cummins l’a déjà souligné [8] : « Pas plus qu’une rencontre fortuite avec un baculovirus [agissant comme un stimulus] qui pourrait pénétrer par des coupures ou des plaies ouvertes, ou simplement avec de la poussière inhalée. La construction du transposon piggyBac génétiquement modifié [OGM] pourrait causer des ravages dans le génome humain, en provoquant des mutations d’insertion et de nombreux autres dommages inconnus et imprévisibles ».

Et puis il y a encore d’autres raisons pour affirmer que les moustiques transgéniques ne sont pas une solution pour contrôler les vecteurs de maladies (voir [14] Transgenic Mosquitoes Not a Solution, SiS 54). §§§


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Définitions et compléments

La réglementation concernant les insectes transgéniques [OGM] est très insuffisante et présente un danger

Traduction, définitions et compléments :

Jacques Hallard, Ing. CNAM, consultant indépendant.
Relecture et corrections : Christiane Hallard-Lauffenburger, professeur des écoles
honoraire.
Adresse : 585 19 Chemin du Malpas 13940 Mollégès France
Courriel : jacques.hallard921@orange.fr
Fichier : ISIS OGM Insectes Regulation of Transgenic Insects Highly Inadequate and Unsafe French version.3 allégée