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"Les discordances du passage de l’information génétique de l’ADN à l’ARN sont très largement répandues" par le Dr Mae-Wan Ho

Traduction et compléments de Jacques Hallard

mercredi 25 janvier 2012, par Ho Dr Mae-Wan

ISIS Génétique
Les discordances du passage de l’information génétique de l’ADN à l’ARN sont très largement répandues
Mismatch of RNA to DNA Widespread
Le dernier épisode de la saga du génome fluide révèle des changements non-aléatoires dans les messages de l’ARN qui sont transcrits à partir de l’ADN génomique. Dr Mae-Wan Ho


Rapport de l’ISIS en date du 23/11/2011
Une copie entièrement référencée de cet article est accessible par les membres sur le site d’ISIS et il est par ailleurs disponible en téléchargement sous le titre Mismatch of RNA to DNA Widespread ; accessible sur http://www.i-sis.org.uk/Mismatch_of_RNA_to_DNA_widespread.php
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Le paradigme du déterminsime génétique est révisé

Rien n’a fait plus pour démêler le paradigme du déterminisme génétique que la recherche scientifique de la période post-génomique, même si certains d’entre nous avaient fait remarquer que le déterminisme génétique était déjà discrédité, même bien avant que le projet du Génome humain ait été conçu (voir [1, 2] Genetic Engineering Dream or Nightmare * and Living with the Fluid Genome, ISIS publications).
* Version en français : ‘La vie après le cauchemar des manipulations génétiques’ par le Docteur Mae-Wan Ho, traduction et compl éments de Jacques Hallard ; accessible sur http://www.i-sis.org.uk/isp/LifeAfterGEFR.php

Tout faure reposer sur les gènes est simplement une façon d’alimenter de mauvaises approches scientifiques et les pires préjudices humains avec nos propres faiblesses, ainsi que celles des autres êtres vivants. La nouvelle génétique du génome fluide n’est décidément pas la « table rase » mise en place comme un homme de paille par les apologistes qui attirent l’attention sur le déterminisme génétique, tels que Steven Pinker [3].

C’est une relation beaucoup plus profondément imbriquée et complexe entre l’hérédité et l’environnement, qui va au-delà de tout déterminisme brut, environnemental ou génétique, dans lequel les êtres humains façonnent activement leur propre vie, ainsi que la vie des générations futures (voir [4, 5] Development and Evolution Revisited, et Nurturing Nature *, ISIS Scientific publications).
* Version en français : "Comment les soins parentaux transforment les gènes" par le Dr Mae-Wan Ho, traduction et compléments de Jacques Hallard ; accessible sur http://yonne.lautre.net/spip.php?article4549&lang=fr

Un développement majeur de la période post-génomique réside dans l’épigénétique, un discipline en pleine expansion qui apporte de l’information sur les multiples façons dont l’expérience, le vécu d’un individu peut marquer et changer ses gènes, qui sont ensuite transmis à la génération suivante (voir [6] Epigenetic Inheritance - What Genes Remember et autres articles dans la même série, SiS 41) *.
* Version en français : "Hérédité épigénétique “What Genes Remember” " De quoi les gènes se souviennent-ils ? " par le Dr. Mae-Wan Ho, traduction et compléments de Jacques Hallard ; accessible sur http://yonne.lautre.net/spip.php?article3144&lang=fr
* Voir également : "Réécriture du texte génétique lors du développement du cerveau humain" par le Dr. Mae-Wan Ho, traduction et compléments de Jacques Hallard ; accessible sur http://yonne.lautre.net/spip.php?article4810&lang=fr

* Et encore : "Une hérédité épigénétique par l’intermédiaire des spermatozoïdes : l‘approche évolutive de Lamarck " par le Dr. Mae-Wan Ho, traduction et compléments de Jacques ; accessible sur http://yonne.lautre.net/spip.php?article4839&lang=fr

Pendant une brève période, les généticiens ont trouvé le réconfort dans le fait que les séquences d’ADN dans le génome restaient inchangées, tout simplement marquées, repérées : il s’est avéré que ce n’était pas le cas. Puis ils ont supposé qu’à quelques exceptions près, les messages de l’ARN, transcrits à partir des séquences des gènes figurant dans l’ADN génomique, restaient de fidèles copies qui étaient traduites en protéines. Ce n’est plus non plus le cas et la révolution continue.

Une équipe de chercheurs scientifiques de l’Université de Pennsylvanie aux Etats-Unis, dirigée par Vivian Cheung, a présenté le dernier épisode dans la saga du génome fluide. Ils ont trouvé des discordances « très répandues » entre les messages de l’ARN et les séquences du gène de l’ADN dans le génome, à partir duquel les messages ont été copiés [7].

Ce n’est pas du tout la première fois que ces distortions ou discordances ont été détectées, comme dans les cas de l’édition (en biologie) de l’ARN, un processus qui change des bases spécifiques dans la transcription par l’ARN, et qui est connu depuis de nombreuses années. Mais la plupart des changements récemment découverts sont dus à des mécanismes qui restent encore inconnus à ce jour, et qui s’avèrent beaucoup plus répandus qu’on ne le pensait.

Les séquences d’ARN et d’ADN ont été comparées chez les mêmes individus

Les chercheurs ont comparé des séquences d’ADN génomique avec la séquence d’ARN correspondant, isolées de cellules B humaines immortalisées de 27 personnes, qui avaient pris part aux projets ‘International HapMap’ et ‘1.000 Genomes’ (voir [8] Ten years of the Human Genome, SiS 48) *.
* Version en français : "Dix ans d’études sur le génome humain : d’énormes quantités de données et pas de progrès en vue" par le Dr. Mae-Wan Ho, traduction et compléments de Jacques Hallard ; accessible sur http://yonne.lautre.net/spip.php?article4586&lang=fr

Ces chercheurs ont choisi de regarder uniquement les locus monomorphiques – des gènes qui ne varient pas entre les individus dans une population – et qui codent pour des protéines. Ils ont détecté 28.766 évènements en décalage – l’ARN diffère de l’ADN - dans 10.201 sites résidant dans 4.741 gènes parmi ceux qui sont connus [7].

Chacune de ces différences a été observée chez au moins deux personnes, dont beaucoup dans les cellules B, ainsi que dans les cellules primaires de la peau et dans des tissus cérébraux, prélevés à partir d’un ensemble distinct d’individus, et aussi dans des marqueurs de séquences exprimées à partir de banques d’ADN complémentaire de différents types de cellules.

Tous les 12 types possibles de discordances ont été observés. Environ 43 pour cent des différences sont des transversions (changement de base purique à base pyrimidique et vice-versa) et elles ne peuvent donc pas être le résultat d’une médiation par l’édition d’ARN typique.

Les différences étaient non aléatoires, car de nombreux sites étaient partagés par de multiples individus et se retrouvent dans différents types cellulaires, y compris dans les cellules primaires de la peau et dans les tissus du cerveau. Les peptides traduits à partir des séquences d’ARN discordantes ont aussi été détectés par la technique de la spectrométrie de masse.

Ces inadéquations ou discordances, récemment découvertes entre ARN et ADN, s’ajoutent à celles qui sont connues comme provenant d’erreurs dans la transcription et dans l’édition de l’ARN, réalisée par des enzymes qui changent l’ARNm après la transcription :

* les ADAR (les désaminases de l’adénosine, qui désaminent l’adénosine (A) en inosine (I), cette dernière étant reconnue, par la machinerie génétique de traduction, comme de la guanosine (G), d’une part, et
* les APOBEC (des enzymes apolipoprotéines B, intervenant dans l’édition de l’ARNm, et qui modifient la cytosine (C) pour donner l’uracile (U), d’autre part. Beaucoup de sites concernant le passage de A à G ont déjà été identifiés, alors que les changements de C à U sont rares.

Il y a des discordances chez plus d’un tiers des gènes et la position des sites concernés n’est pas aléatoire

Les 4.741 gènes connus avec des disparités trouvées seulement dans des loci monomorphes, représentent 36 pour cent des 13.214 gènes bien caractérisés qui ont été couverts par 10 ou plus des séquençages d’ARN observés dans au moins une partie du gène, chez deux ou plusieurs individus. Il y a 6.698 événements concernant un passage de A à G, ce qui pourrait être le résultat de la désamination, et 1.220 différences concernant le passage de C à T, qui pourrait également être médié par une enzyme connue par désaminase de l’édition d’ARN, APOBEC1. Cependant, cette enzyme n’est pas exprimée dans les cellules B. En outre, 12.507 autres transversions (soit 43 pour cent) ne pourraient pas être le résultat de l’édition classique médiée par la désaminase. Celles-ci sont appelées ‘différences ARN-ADN’ (RDD en anglais) et elles résultent de mécanismes encore inconnus.

Un exemple est donné par le changement de C en A sur le chromosome 12, du gène MYL6 codant pour la chaîne légère de la myosine, où 16 des sujets ont montré C / C dans leur ADN (deux copies du gène), mais A / C dans leurs séquences d’ARN.

Un autre exemple est celui d’un changement de A en C sur le chromosome 6, dans le gène HSP90AB1 codant une protéine de choc thermique, où huit personnes ont un génotype d’ADN homozygote A / A, alors qu’elles ont A / C dans leur ARN.

Au total, 8.163 (soit 80 pour cent) des sites ont été trouvés dans au moins 50 pour cent des 19 personnes ayant des gènes bien caractérisés. Certains de ces sites ont été trouvés chez presque chacun d’entre eux. Chaque personne a en moyenne 1.065 ‘différences ARN-ADN’ (une gamme allant de 282 à 1.863), qui ne montrent pas de corrélation significative avec l’expression ADAR, confirmant que les différences ARN-ADN ne résultent pas de l’édition de l’ARN connue.
Les sites ne sont pas uniformément répartis dans le génome. Le chromosome 19 a la plupart des sites, tandis que le chromosome 13 en a le moins, et le schéma reste le même après correction des différences en fonction de la taille et de la densité des gènes dans les chromosomes.

Les sites de ‘différences ARN-ADN’ sont considérablement enrichis chez les gènes qui jouent un rôle dans l’activité hélicase (protéines de mobilité qui séparent les brins d’ADN), ainsi que dans les liaisons des protéines et des nucléotides.

Parmi les 10.210 sites concernés, 44 pour cent (4. 453) sont dans des exons de codage (10 pour cent dans le dernier exon), 4 pour cent (386) sont dans les séquences 5’ non traduite et 39 pour cent (3.977) sont dans les séquences 3’ non traduites. Les sites ont également une tendance à se regrouper : 1.059 (10 pour cent) sont adjacents, et 26 pour cent sont à moins de 25 pb l’un de l’autre.
Compte tenu de cette constatation surprenante, la cartographie des études qui ont jusqu’ici porté sur l’identification des variantes de l’ADN comme "allèles de sensibilité à une maladie", peut être grandement insuffisante, et présenter beaucoup de lacunes (ce qui peut expliquer pourquoi cet exercice de cartographie génétique s’est révélé si remarquablement infructueux [8]).

Cheung et ses collègues pensent avoir besoin de cartographier également des variants de séquences d’ARN qui ne sont pas dans les séquences d’ADN. À mon avis, tous les exercices de cartographie de ce type sont d’une utilité limitée, simplement parce que le génome est fluide et dynamique, et donc la bonne mise au point d’une recherche post-génomique est la dynamique génomique, portant sur l’étude du comment et du pourquoi des changements dans les génomes, qui sont très probablement en relation avec l’expérience vécue par les individus, ou avec ce qu’ils choisissent de faire.

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Définitions et compléments

Traduction, définitions et compléments :

Jacques Hallard, Ing. CNAM, consultant indépendant.
Relecture et corrections : Christiane Hallard-Lauffenburger, professeur des écoles
honoraire.
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Courriel : jacques.hallard921@orange.fr
Fichier : ISIS Génétique Mismatch of RNA to DNA Widespread French version.3 allégée